Il a eu, un peu, beaucoup, le malheur d’ouvrir les feux de la 66ème édition du Festival du Film de Locarno. D’abord en présentant avec le cinéaste Andrea Segre Indebito, un documentaire qu’il a co-signé sur la Grèce en crise – et aussi la musique qui en parle, de cette crise. Ensuite, sur la Piazza Grande, en offrant au vaste public présent un petit aperçu de ses talents, chantant et racontant cette Grèce abandonnée à sa crise…
Le geste du directeur du Festival Carlo Chatrian était juste, et beau. Celui de faire participer son immense public à cet autre geste courageux d’un cinéaste et d’un musicien. Mais le public venu voir 2 guns de Baltasar Kormákur et le prix à la carrière à Christopher Lee ne connaissait pas vraiment ce drôle d’invité surprise, chanteur musicien parlant de politique, et a commencé à faire sentir (doucement, on est en Suisse), son agacement…
Je peux les comprendre, d’autant que la performance du chanteur n’était pas des plus ébouriffante. Mais je me fends de ce texte pour vous dire que vous avez vu, là, sur la scène, un des meilleurs auteurs-compositeurs-interprètes italiens contemporains. Vinicio Capossela est considéré comme le Tom Waits italien par sa voix, la complexité de ses arrangements, et parce que c’est plus facile de le définir comme ça. En réalité, je le rapproche aussi d’un Fabrizio de Andrè (qu’on décrivait à tort comme le Georges Brassens transalpin), avec lequel il partage le goût du folklore. Ses disques sont autant de voyages extraordinaires dans des mondes magiques et inquiétants. Le dernier, tout frais, s’appelle Rebetiko Gymnastas et évoque justement la musique grecque et plus particulièrement le Rebetiko, ce genre musical très varié et à la très longue histoire qui a toujours représenté la voix du peuple, des pauvres, des marginaux, des opprimés. Donc si vous ne connaissez pas VInicio Capossela, allez faire un tour dans sa musique. Vous en ressortirez conquis.
