Formation ou immigration?

Dans nos sociétés d’individus atomisés, où les nouvelles technologies font crépiter à chaque minute une multitude d’informations disparates, il est devenu difficile de faire émerger une pensée vaste et structurée.

A cet émiettement des consciences s’ajoute pour la Suisse le morcellement de ses institutions. Vingt-six cantons qui se croient uniques, vingt-sept collèges exécutifs, en incluant le Conseil fédéral, où s’additionnent d’abord des individus, des partis tantôt gouvernementaux, tantôt dans l’opposition, ces géométries infiniment variables font de la Confédération le paradis du pointillisme mental.

Ainsi, le thème des bourses d’études peut être abordé par certains sans la moindre corrélation avec l’immigration. M. Freysinger propose de limiter les montants destinés à soutenir les étudiants valaisans. D’autres cantons y songent. Dans tous les cas, on s’aperçoit que la Suisse investit souvent moins que ses concurrents dans les bouses d’études.

Comment peut on conduire ce débat sans rappeler qu’un pays qui refuse de consacrer les moyens nécessaires à la formation de ses jeunes ressortissants s’expose à devoir importer les cadres qualifiés dont il a besoin? Formation ou immigration, il faut choisir.

Dans moins de trois mois, nous votons sur une initiative de l’UDC qui veut mettre fin à la libre circulation des personnes. Il serait peut-être temps d’aborder cette échéance cruciale en effectuant une corrélation systématique entre les questions de fond et les divers sujets qui agitent nos médias au quotidien.

L’an prochain verra la Suisse confrontée à des choix lourds de conséquences. Dans cette course vers son propre destin, un de ses handicaps sera son déficit chronique de pensée globale.

François Cherix

Spécialisé dans la communication politique, François Cherix travaille depuis des années sur la réforme du modèle suisse, l'organisation de l'espace romand, la question européenne, les liens entre politique et médias. Essayiste, il a publié plusieurs ouvrages et de nombreuses analyses. Socialiste, il a été membre de l'Assemblée constituante vaudoise et député au Grand conseil. Aujourd'hui, il est co-président du Nouveau mouvement européen suisse (Nomes).