Berne agit (enfin) pour la fiscalité des start-up

Le Conseil fédéral va améliorer le traitement fiscal des start-up. A contrecoeur. Après le National, le Conseil des Etats a adopté mardi 24 septembre une motion allant dans ce sens, en commençant par les participations de collaborateurs. Le Parlement charge ainsi le Conseil fédéral d’agir. Depuis des années, l’administration s’oppose à des mesures spécifiques pour les start-up, considérant, en gros, qu’une start-up n’existe pas. Et que si elle existe, elle doit être soumise au même régime fiscal qu’une multinationale. Un régime taillé sur mesure pour… la multinationale. C’est problématique, notamment pour la charge fiscale des participations détenues par les collaborateurs. Le Conseil des Etats relève que « les start-up sont ainsi soumises en Suisse à des conditions-cadres moins favorables que dans d’autres Etats ». Le Conseil fédéral va donc devoir corriger le tir. Le Réseau se bat pour ça depuis des années, et se réjouit de la décision du Parlement.

La sécurité du droit n’est plus garantie pour les start-up

On se souvient de l’étonnante dérive du Canton de Zurich qui, en 2016, s’est mis à valoriser des start-up selon le dernier tour de table, à savoir à la valeur idéale que la start-up espère atteindre un jour. Des entrepreneurs zurichois furent ainsi taxés de manière totalement excessive, sur une fortune qu’ils n’avaient pas (et n’auraient sûrement jamais). Certains cas apparurent dans d’autres cantons – heureusement pas tous, chaque canton y allant de sa formule pour valoriser fiscalement les entreprises non cotées. La situation est devenue confuse et instable pour les entrepreneurs en Suisse. La Commission de l’économie du Conseil des Etats le relève: « Si les entreprises peuvent s’entendre avec l’autorité fiscale cantonale compétente sur une valeur établie selon la formule – qui correspond à la valeur vénale – cette valeur doit toutefois être négociée au cas par cas entre l’entreprise et l’autorité fiscale en question. La sécurité du droit est donc insuffisante ». Nous partageons ce constat. Clairement, la sécurité du droit n’est plus garantie.

L’enjeu: attirer en Suisse les meilleurs talents 

L’enjeu est central: la Suisse doit attirer les meilleurs talents. Pour être attractives, les entreprises suisses doivent avoir un cadre précis et prévisible sur la taxation des collaborateurs qu’ils engagent. En leur promettant un salaire acceptable avec un minimum de cash, et sans pénalisation fiscale sur les participations. Le Département fédéral des finances avait pris conscience de l’enjeu, en créant en 2016 un groupe de travail avec les cantons afin de trouver des solutions. Mais depuis deux ans, rien ne bouge. Le groupe de travail est au point mort. La motion du Parlement arrive donc à point nommé pour lui rappeler qu’il faut agir. Tant au niveau des cantons que de la Confédération, il y a urgence: la concurrence internationale est féroce dans ce domaine central pour la force d’innovation de notre pays. Nous devons nous donner les moyens d’attirer les meilleurs talents.

Un premier pas fiscal pour les entreprises non cotées

C’est un premier pas salutaire. Mais ce n’est qu’un premier pas. Il est temps d’ouvrir un débat plus large sur l’impôt sur la fortune, et la taxation de l’outil de travail pour l’ensemble des entreprises non cotées, notamment les PME familiales. En mars 2017, dans son rapport en réponse au postulat 13.4237, le Conseil fédéral admettait « que l’impôt sur la fortune peut entraîner une charge fiscale élevée et des problèmes de liquidités pour les jeunes entrepreneurs ». Le Conseil fédéral estime également, je cite, « qu’il vaut la peine d’envisager un allègement supplémentaire de l’impôt sur les fonds propres et la fortune, qui entament la substance de l’entreprise et donnent ainsi de mauvaises incitations économiques ». Il affirme qu’il serait prêt, si le Parlement lui en donnait le mandat, à envisager cet allègement. Nous l’avons donc demandé au Conseil fédéral dans un postulat, qu’il soutient. L’après « PF 17 » a déjà commencé.

3 réponses à “Berne agit (enfin) pour la fiscalité des start-up

  1. L’impôt sur la fortune aurait du baisser vu que les taux d’intérêts ont baissés ?

    Le “taux de l’impôt anticipé” normalement représente plus que l’impôt sur la fortune. Hors ce n’est plus le cas.

    Le “travail” ayant déjà été taxé, il n’a pas à être taxer une autre fois – sa plus-value devrait être taxée. Hors si la plus-value est égal à 0 (taux d’un compte bancaire) – elle n’a pas à être taxée. Sinon il y a double taxation.

    Autre exemple, si on a une maison – qu’elle double de valeur pour des raisons X ou Y – il n’y a pas de raison que nos impôts sur la fortune prennent l’ascenseur.

    En plus dans la débilité Vaudoise – on déduit en plus cette fortune dans le droit au subside de l’assurance maladie (les 10% de limite). En gros la personne qui c’est offert un gros voyage à crédit par exemple va être “récompensée” par l’état au travers des impôts – subsides – celle qui met de côté pour s’offrir ce voyage (ou un autre truc) va être punis par l’Etat. La lutte contre le désendettement devrait commencer par changer ces incitatifs….

    Bref on cherche l’argent ou il est…. mais aussi ou il n’est pas et c’est problématique.

  2. Le point 6 propose un Fond de Fonds. Il est certain que cela pourra aider, mais je ne suis pas sûr que c’est ce qui est nécessaire au stade Startup. En effet, il y a beaucoup de moyen pour lever des fonds quand on démarre, qu’ils soient institutionnels, venant de fondations, ou tout simplement des “Friends & Family”. Je ne pense que l’on soit à court de possibilité, et que ce qui existe est suffisant. Il n’est pas faux non plus que ce soit difficile à ce stade, car beaucoup de projets sont sans issue… Et, de toute façon, il est tellement difficile de prévoir le succès ou l’échec. Il faut savoir que les fondateurs de Google ont du faire plus de 300 présentations à des investisseurs avant de trouver un qui soit d’accord de les financer…
    C’est au stade suivant que les chances de succès sont plus importantes, mais pas dans une ambiance autant “glamour” que les premiers pas, et à un stade ou la réalité a souvent rattrapée l’entrepreneur, et où il intéresse beaucoup moins. Bref, il est assailli par les problèmes de cash, et il doit se battre constamment pour maintenir la tête hors de l’eau. C’est en tout cas le scénario le plus fréquent.
    Une fois les premiers fonds rentrés pour une startup, de façon optimale, elle doit coute que coute prouver que son idée marche. A ce moment là il faut essayer de lever des fonds pour l’expansion. Il s’avère que c’est ce stade là, qui est le plus difficile pour le recherche de fonds.
    Alors c’est peut-être rêver trop fort, mais plutôt qu’un Fond de Fonds, une équipe d’entrepreneurs confirmés, qui ont déjà fait avec succès le trajet de la startup au “breakeven” soutenu, qui seraient sponsorisés par l’état me parait plus indiqué. Foncièrement, une entité au niveau fédéral à créer de toute pièce, favoriserait un financement plus facile (avec un système ou l’état pourrait garantir un prêt des différentes banques cantonales), à un stade critique où la décision d’un investisseur est plus dur à obtenir, à un stade ou les financements bancaires sont quasi impossibles. L’encadrement devrait être des entrepreneurs “confirmés” en majorité, avec des financiers qui connaissent les PME et qui ont l’habitude de les analyser.
    En fait une sorte de CTI, sans nécessairement une qualification au niveau technologique.

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