Les relations publiques sont mortes, longue vie aux relations publics !

Puisque tout le monde se méprend quant à la vraie raison d’être et à l’utilité des relations publiques, changeons le nom de la profession ! Il est vrai qu’à fin 2012, il y a encore passablement d’âmes peu curieuses qui associent notre métier aux simples relations médias ou à l’organisation de soirées mondaines pour enseignes prestigieuses. C’est le « syndicat (français) de référence de la profession, Syntec Conseil en Relations Publics », qui a eu cette idée de génie: désormais, on dira les relations publics !

Grâce à ce coup de baguette magique, Germaine et Marcel sauront désormais que les RP englobent des activités aussi nobles que la communication interne, la communication de crise, la publicité et le sponsoring institutionnels, les issues management, les affaires publiques, les publications institutionnelles ou encore la stratégie de communication corporate en ligne.

Comment, vous ne le saviez pas ? Oui, les pros des RP s’occupent de « publics » aussi diversifiés que les collaborateurs, les analystes financiers, les autorités publiques, les voisins, les associations professionnelles, les groupes d’intérêt, les concurrents, les clients (oui, même les clients !) ou encore, accessoirement, les journalistes. Et les professionnels de la profession vont jusqu’à offrir des formations continues permettant d’obtenir un CAS et même un Master en communication. Transformer le nom de la profession en néologisme hermaphrodite et tout ceci devient évident, n’est-ce pas ?

Soyons sérieux ! Au lieu de trouver d’obscures parades verbales, que les communicateurs fassent leur travail de manière irréprochable, sur les plans éthique et qualitatif. C’est ainsi qu’ils obtiendront la reconnaissance justifiée à laquelle ils aspirent. A cet égard, force est de constater que le rôle stratégique de la communication institutionnelle – les relations publiques dans leur vraie acception –  a clairement progressé dans les entreprises et au sein des organisations de tous ordres, au cours des vingt dernières années.

Par ailleurs, l’avènement des réseaux sociaux représente une fantastique opportunité pour mettre en œuvre les compétences spécifiques des professionnels en relations publiques. En effet, la raison d’être des RP a toujours été de soigner le dialogue avec les multiples parties prenantes de leurs employeurs ou clients. Or, les réseaux sociaux offrent une plateforme rêvée pour renforcer ce dialogue, avec des outils et une dynamique dont le potentiel commence à peine à émerger. Le véritable défi des RP se situe bien davantage dans ce type de réflexions que dans la modification de genre à laquelle certains aspirent. Longue vie aux relations publiques !

Cachez ces valeurs que je ne saurais voir

Vous me direz que les valeurs d’entreprise, c’est un peu le dada des DirCom, des DRH et autres responsables de la communication interne des grandes sociétés en quête de Best Practices managériales. Pourquoi perdre du temps à définir les valeurs d’une entreprise et à les partager avec les collaborateurs, alors que la majorité d’entre eux s’en fichent éperdument ?

Toute organisation porte en elle une manière de faire et d’être, des principes formels ou informels qui composent sa spécificité. Ces éléments la distinguent de ses concurrents, mais ils permettent surtout d’inscrire la stratégie d’entreprise dans un cadre pertinent, applicable à tous ses domaines d’activité. Les valeurs permettent de donner du sens au travail de chacune et chacun, au-delà (ou au-dessus) des tâches concrètes définies par la hiérarchie directe.

Là où le bât blesse, c’est lorsque les valeurs sont promulguées mais aussitôt relativisées – voire bafouées – par le management lui-même, à quelque niveau que ce soit. A titre d’exemple, les mots «tradition» ou «proximité» sont inscrits dans bien des chartes d’entreprise romandes, alors qu’un nombre croissant de cadres de ces mêmes entreprises ont découvert notre pays en même temps que leur nouveau contrat de travail. Même des années plus tard, nombre d’entre eux n’ont jamais vu Darius Rochebin et n’ont jamais lu Le Matin Dimanche. Et quid de la Migros, des Dar-Vida ou de la Super League? Ou encore des principes les plus élémentaires de notre système politique?

Je vous entends déjà me rétorquer que connaître Darius et le géant orange ne détermine pas l’efficacité d’un chef marketing international, d’un attaché de presse EMEA ou d’un responsable qualité Europe. Tel n’est pas mon propos. Je dis juste que pour devenir l’un des ambassadeurs de notre tradition industrielle ou entrepreneuriale, il faut faire preuve d’un minimum de respect et d’intérêt pour ce qui en fait le terreau.

La diversité culturelle est éminemment bénéfique pour les entreprises suisses. Mais les nombreuses dérives dont j’entends parler depuis quelque temps me font craindre pour l’ADN à croix blanche, celui qui a fait le succès de tant d’enseignes prestigieuses. Le respect et la discrétion, par exemple. Ou encore la confiance mutuelle, la précision et la ponctualité. Autant de valeurs qui résonnent comme des évidences à nos oreilles, mais qui inspirent une condescendance déplacée auprès de certains.

A mon sens, l’une des principales utilités des chartes d’entreprise est de servir de référentiel pour tous les collaborateurs, quel que soit leur rang hiérarchique ou leur domaine de spécialisation. Et pour que ce référentiel fonctionne, il devrait être utilisé en amont (lors des entretiens d’embauche) et tout au long du parcours de l’employé au sein de l’entreprise. Il devrait notamment être intégré dans les entretiens d’évaluation des performances individuelles.

Dans ces conditions, les valeurs d’entreprise ne seraient plus le dada des seuls DirCom, DRH et autres responsables de la communication interne. Elles seraient un maillon essentiel de la cohabitation harmonieuse des cultures au sein de l’entreprise, et donc du développement durable de celle-ci. A quelques jours de Noël, on a le droit de rêver, non?

Bienvenidos a Suiza ! Habla francés o alemán ?

La crise fait mal aux Espagnols et ils ont perdu toute confiance en leur élite politique et économique. Ils ne voient qu’un horizon sombre et incertain, à court et moyen termes. Un petit film humoristique tourné par la télévision basque (etb) est révélateur de la gravité de la situation : il montre des autochtones qui, pour fuir la péninsule, s’emparent d’une barque d’émigrés africains venant d’accoster.

Quelque 100'000 Espagnols vivent en Suisse, selon le site espanoles.ch. A en croire les nombreux messages que je reçois d’amis ou de cousins plus ou moins éloignés, ceux qui vivent au pays les envient et voient la Suisse comme un eldorado possible.

Mais il n’y a plus beaucoup de routes à construire en Helvétie et – surtout – le candidat à l’exil a bien changé en comparaison avec les sinistres années 60. Contrairement à ses grands-parents et parents de la génération Franco, le jeune Espagnol en recherche d’emploi est plutôt universitaire et branché. Il est parfaitement à l’aise dans notre monde globalisé et potentiellement soluble dans l’économie moderne de quelque pays que ce soit, y compris la Suisse. Enfin presque.

Boostée par l’Euro providentiel, gonflée à bloc par une économie surfant sur la vague artificielle d’un marché immobilier incontrôlé, l’Espagne de ces dernières décennies a continué de vivre sur un mode quasi-autarcique – culturellement, par exemple – qui péjore les chances de succès des nouveaux migrants potentiels. Même Erasmus n’a pas fondamentalement amélioré les choses. Connaissez-vous beaucoup d’Espagnols d’Espagne maîtrisant vraiment une autre langue que le castillan ? Pouvez-vous citer les principaux chanteurs et groupes espagnols qui ont caracolé en tête des hit-parades du pays au cours des vingt dernières années ? Avez-vous déjà essayé de visionner un film étranger en version originale à Madrid, Barcelone ou Séville ?

Il faut impérativement que l’Espagne profite de cette période de marasme économique pour repenser son rapport au monde, notamment à travers son système d’éducation. La prochaine génération devra enfin savoir jongler avec les langues, composer avec les différences culturelles de notre monde interconnecté, prendre l’initiative et s’affirmer dans l’économie globalisée. Pour que Zara, la Roja, Nadal, Javier Bardem-Penelope Cruz ou El Bulli ne soient pas que des exceptions cachant une forêt d’anonymes centrés sur eux-mêmes. Les gens de ce pays portent en eux une force créative, une joie de vivre et une énergie qui forment un terreau exceptionnel. Qu’ils sachent maintenant apprendre de leurs erreurs et construire les bases d’un nouvel essor. Durable, cette fois.

La fin du monde selon Maya. Non, pas l’Indien, l’abeille!

Voilà, nous y sommes, plus que quelques jours avant la date fatidique du 21.12.2012. Depuis des décennies, toutes sortes de savantes exégèses et d'interprétations farfelues ont été publiées, donnant lieu à des succès littéraires ou cinématographiques planétaires et alimentant les discussions des cafétérias universitaires et ouvrières. « On arrivera tous en même temps à Noël », disait l’autre, sauf que cette fois on n’en est pas vraiment sûr. Alors vivons à fond ces quelques derniers jours, faisons ripaille frénétiquement, buvons en chœur à perdre la raison et aimons-nous les uns les autres encore plus fort !

Ceci dit, les supposées prédictions des ancêtres amérindiens ne sont rien en comparaison du risque bien réel que nous fait courir une autre Maya, en l’occurrence notre amie l’abeille. La situation est grave et, pour une fois, je n’ai aucunement envie d’ironiser sur ce sujet. Les feux sont au rouge dans le secteur apicole, car les menaces sont réelles et difficiles à contrer. On parle notamment de l’effrayant varroa et des pesticides dévastateurs. Même la Confédération prend le cas très au sérieux.

Comme la plupart des humains sur terre (où d'autre?), j’aime le miel. Dans mon cas, c’en est devenu une quasi-manie, puisque je ne peux quitter un pays sans un bocal du précieux nectar concocté par les travailleuses indigènes. La perspective qu’un jour, à cause d’un horripilant parasite et de la chimie à croix rouge ou d'ailleurs, je ne pourrai plus m’offrir ma dose de miel quotidienne, me paraît proprement insupportable.

Mais surtout – la science l’a clairement démontré -, les abeilles jouent un rôle-clé au coeur de l’équilibre naturel. Sans elles, le maintien de la biodiversité telle que nous la connaissons aujourd’hui n’est pas garanti. Ce constat sans appel mérite une prise de conscience et des actions rapides.

Tous les moyens sont bons pour sauver Maya. Enfin, presque tous. Si la science a prouvé le rôle des abeilles et l’urgence de leur protection, rien ne justifie l’absence de rigueur et d’honnêteté dans leur défense. Ainsi, certains continuent de colporter une sorte d’hoax citant Albert Einstein de manière erronée : «Si l’abeille disparaissait de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre». Einstein n’aurait jamais prononcé cette phrase, comme l’ont révélé plusieurs recherches. Une demi-vérité répétée cent fois ne deviendra jamais une vérité. A méditer longuement avant de citer ses sources sans les vérifier.

Un clic et des claques

Son prénom et son nom. C'est ce qu'il m'a laissé sur mon répondeur téléphonique, sans bonjour ni au-revoir. Alors je l'ai rappelé pour lui dire que la raison pour laquelle je voulais m'entretenir avec lui – une semaine plus tôt – était désormais marquée du sceau de l'obsolescence. Sa réponse? Le "clic!" du téléphone qu'on raccroche sèchement. C'était un patron romand bien connu.

Je me dis qu'il doit être difficile d'être poli et avenant dans cette entreprise, si l'on veut progresser en respectant les valeurs exprimées par le grand chef. Le style de communication du CEO influence fortement celui des collaborateurs et, par voie de conséquence, l'image de l'entreprise auprès de ses multiples cibles. "Kommunikation ist Chefsache".

 

Le lait tue, l’abstinence au volant aussi

C’est bien connu: on peut faire dire (presque) n’importe quoi aux statistiques, ainsi que son contraire. Ainsi, à titre d’exemple, «il est estimé en règle générale que l'alcool est responsable de 30% des décès par accident de la route»; c’est le site stop-alcool.ch qui nous le dévoile. Le constat est sans appel: 70% des accidents sont causés par des conducteurs sobres. Il faudrait immédiatement amender ou incarcérer, éthylomètre à l’appui, tous les conducteurs qui auraient omis de boire avant de prendre le volant.

Dans le même esprit, on peut faire dire beaucoup de choses à la science. Ainsi, d’aucuns militent pour l’abandon du lait dans notre alimentation. Ils basent leur combat sur une approche factuelle inébranlable : «Dans la nature, aucun animal, excepté l’être humain, ne consomme le lait d’une autre espèce.» Et le raisonnement complet du site «Sport Santé Vie» pourrait culpabiliser bon nombre de mes amis en plein apprentissage parental.

Comment faire la part des choses dans ce fatras d’informations invérifiables, de contre-vérités, de communications dirigées? Il est un baromètre auquel on oublie trop souvent de se référer: le bon sens, mon bon Monsieur, le bon sens, y'a qu'ça de vrai!

L'alcool au volant tue et je vous laisse conclure vous-même quant à la place du lait dans notre alimentation.

 

 

 

Tu t’ennuies dans ton job? Fais de la comm’!

Si vous saviez le nombre de personnes, jeunes ou moins jeunes, qui m’abordent pour me demander si je peux les aider à «entrer dans la communication» ! Elles trouvent que «la comm', c’est cool !», comme le leur ont dit des «ami-es qui adôôôôôrent leur job».

 Je veux bien voir cela de manière positive, en me disant que telle est la preuve de l’attrait croissant de notre beau métier pour les esprits brillants cherchant à embrasser une carrière fascinante. Mais la réalité est plus banale: à défaut de trouver leur épanouissement dans leur travail actuel, ces personnes se disent que leurs qualités relationnelles et leur goût pour l’écriture (sic !) devraient faire le bonheur de toute agence ou département de communication en mal de talents. Soyons clairs : entre les événements glamour et les photo-shootings avec des mannequins de rêve, les tournages de clips en Afrique du Sud et les tournois de golf, ou encore les discussions sur les valeurs managériales des grandes marques horlogères de La Vallée, il y a de quoi titiller les neurones et aiguiser l’appétit du plus grand nombre de candidats.

 Certes, il faut savoir mieux écrire que le citoyen lambda et démontrer des qualités d’empathie supérieures à la moyenne pour performer dans notre environnement. Mais les aspirants communicateurs sous-estiment trop souvent les autres qualités indispensables dans notre métier, telles que la résistance au stress, l’humilité ou encore la flexibilité en termes d’horaires. La communication, c’est avant tout être au service d’une entreprise, d’une institution ou d’une personne. C’est un métier d’écoute, de curiosité et de soutien. On y fait des rencontres passionnantes et on y vit des moments d’une rare intensité, mais on passe beaucoup de temps et on met beaucoup d’énergie à des tâches simples, pragmatiques et opérationnelles, voire répétitives. La dimension stratégique est la plus passionnante à aborder, mais elle n’a de vraie valeur qu’une fois mise en œuvre, avec des résultats concrets. Comme dans l’univers du spectacle, le vrai travail se réalise en coulisses, dans l’ombre, avant la mise en lumière qui n’en est que l’aboutissement. Stratégie et réalisation, réflexion et action.

 Oui, la comm', c’est cool, et j’adore mon job, mais j’aimerais parfois que mes confrères en parlent de manière plus honnête. C’est ce que j’essayerai de faire dans ce blog, avec l’espoir fort peu modeste de vous y retrouver régulièrement.

Maître Chiffelle découvre la théorie de la relativité

Il nous a fait une belle Chiracquerie, Pierre Chiffelle. Tel le grand Jacques pris en flagrant délit de drague éhontée par une Bernadette légitimement outrée (pour rappel : vidéo), le voilà découvert dans une affaire valaisanne aux relents de possible faute professionnelle. Alors que certains politiciens sont poursuivis pour «comportement inopportun», Pierre Chiffelle se contente de pécher par procédure inadéquate.

Cet épisode a d’ores et déjà inspiré de multiples piques médiatiques et il ne manquera pas de générer des suites juridiques dont nous voyons poindre les prémices. Mais il soulève également la question de l’image des personnes publiques et de son impact sur la logique de communication et de médiatisation. Prenez Franz Weber : aussi sympathique que virulent, il peut se permettre presque toutes les dérives verbales, notamment aux yeux des médias. En effet, son enthousiasme faussement naïf couvre d'un voile virginal les arguments tour à tour fondés ou fallacieux qui parsèment ses campagnes héroïques. Mais que Pierre Chiffelle se défende en évoquant une « erreur marginale » noyée dans une masse d'actions parfaitement en règle, ça passe plus difficilement dans le landerneau romand.

L’une des raisons de ce traitement médiatique asymétrique est précisément l’image de Pierre Chiffelle, construite depuis des années autour d’une attitude que certains qualifient de suffisante. C’est sans doute son tempérament – excessif parfois, à l’aune de la légendaire réserve vaudoise – qui a permis à l’avocat veveysan de défendre avec succès plusieurs causes auxquelles il croyait profondément. Mais ces combats ont laissé des traces dans la mémoire collective et il en devient difficile, dès lors, de faire appel à l’indulgence populaire lorsque l'on commet une erreur crasse dans un dossier sensible.

On pardonne facilement à Jacques Chirac (aujourd'hui) ou à Franz Weber, car ils ont ce petit grain de folie qui leur procure une sorte d'immunité réputationnelle. C’est plus difficile pour Pierre Chiffelle. Il a certes admis son erreur, ce qui est bien, mais on lui pardonne moins de tenter de la minimiser. Faute mineure ou non, il aurait été certainement plus habile – en termes de communication – de ne pas jouer la carte de la relativisation à stade. Cette tactique a donné un os à ronger aux adversaires de Pierre Chiffelle et ils ne le lâcheront pas de sitôt.

Mais cela m’a donné une idée : je vais contester l’amende salée reçue pour un dépassement de vitesse de quelques misérables km/h, en invoquant le fait que ma conduite est globalement irréprochable. Tout est relatif, n’est-ce pas ?