“Le fitness gratuit, c’est ici!”, s’exclame-t-elle en souriant des yeux derrière ses lunettes de soleil. Quelques rires échangés, puis elle s’en va d’un bon pas, armée de ses bâtons et de sa bonne humeur.
J’ai passé quelques jours en montagne en famille, loin du stress citadin de la plaine. Une bonne façon de recharger un peu les batteries, largement vidées par une fin d’année sur les chapeaux de roues. La neige tombée en abondance aura réjouit les amateurs de ski, même si dans cette petite station peu “huppée” des Alpes, il nous aura semblé que les pistes méritaient une meilleure fréquentation. La tempête Eleanor aura eu raison d’une bonne partie des skieurs qui ont déserté la station en ce dernier dimanche de vacances. Au vu de la grisaille, nous avons opté pour une petite balade en direction du superbe restaurant d’alpage des Fers. Après 10 minutes de marche, nous la rencontrons sur le petit sentier (trop) enneigé de forêt, où nous peinons à trouver nos appuis sans s’enfoncer dans la lourde neige mouillée. Elle a peut-être 70 ans, et avance prudemment dans la neige, sans déséquilibre, le pas sûr, l’un après l’autre, tandis que je surveille les enfants qui se demandent combien ils vont encore devoir monter avant d’atteindre le restaurant. Elle nous précède en nous rassurant sur le chemin bel et bien existant, et nous indique les bonnes traces solides à emprunter.
Je parle souvent de l’importance et des bénéfices d’une activité physique à la retraite. Et j’en reparlerai ici régulièrement. Mais les paroles ne permettent en rien de transmettre la valeur de ce moment échangé en marchant. En sortant de la forêt pour retrouver un chemin mieux tassé et facile, nous marchons ensemble et faisons connaissance. Ces moments sont finalement trop rares aujourd’hui, où des inconnus partagent des éléments de leur vécu spontanément, librement, au gré des pas. Connaissant bien la région, elle me parle de ces chemins de montagne au diverses saisons, chemins qu’elle connaît sous toutes les couleurs et habillements pour les fouler quotidiennement. Elle a abandonné le ski après une attaque cérébrale, craignant probablement la chute qui pourrait avoir des conséquences plus fâcheuses. Tandis que la randonnée lui procure le plaisir et le contact avec la nature qui lui tient à cœur. Mon œil médical peine à discerner de quelconques séquelles de cette attaque, pour ne constater que cette aisance physique en montant, gage d’une condition physique exemplaire à n’importe quel âge. Quel bel exemple de résilience (une notion dont je reparlerai ici dans le futur) face au vieillissement et à un problème de santé qui (trop) souvent mène à une sédentarisation délétère. Surtout, je pense à ces chemins qui s’offrent à nous, à l’écart des remonte-pentes, dans la quiétude de la montagne. Autant d’opportunités de s’évader, tout en étant propices aux rencontres et aux moments partagés.
Nous voici arrivés à une bifurcation, où nos chemins se séparent. Elle fera une boucle pour allonger le parcours, nous atteindrons le restaurant à la grande joie des enfants.
Je ne peux m’empêcher d’esquisser un sourire en pensant à cette brève rencontre, finalement banale pour toutes celles et ceux qui ont l’habitude de s’élancer sur le chemins de randonnées. Banale, vraiment? De plus en plus rare en tous cas, et c’est pourquoi je me promets d’y repenser de temps en temps.
Quant aux enfants, ils garderont le souvenir d’une descente faite de course dans la neige, de glissades et culbutes dans les pentes, et de la découverte que l’on peut aussi atteindre les pistes de ski à pied!
Bonne semaine à toutes et à tous, et merci à notre inconnue d’un jour.
Je partage complètement ce point de vue !
Bonne reprise !
Et oui! Bienvenue hors des pistes, sur des chemins sans trafic où les bipèdes ne sont pas ‘’juste’’ tolérés mais s’y sentent en sécurité et légitime. De mémoire, je n’ai pas souvenir où je n’ai pas échangé au moins quelques mots plaisants avec d’autres promeneurs, joggeurs, cyclistes ou autres adeptes de peau de phoque selon la saison. Je me suis souvent posé la question pourquoi dans cette station les contacts sont plus aisés qu’ailleurs. Peut-être qu’une ébauche de réponse résiderait dans la simplicité des lieux, paisibles, accueillants et où le paraitre n’a aucune importance ? En tous les cas, merci pour votre texte, il m’a permis de revivre un ressentit familier.
Bel article sitôt partagé sur ma page FB. Merci