Cher Pierre Morath,

Il est des rencontres trop furtives pour que naissent les amitiés solides. Qu’importe, on ne les oublie pas de sitôt.
Mai 2016, vous veniez défendre votre documentaire “Free to run” à la première édition d’un jeune festival “Lettres et Images du Sport” à Bressuire, en France. Je me souviens de votre bienveillance à notre organisation, vous qui en avez vu d’autres. Je me souviens du débat qui s’en suivit, viril parfois, mais correct. Je me souviens de vos prises de paroles, éclairées, vives, construites et érudites. Je me souviens de vous avoir salué, quelques heures avant votre retour pour la Suisse, le lendemain. Se promettant de nous revoir. Ce ne fut jamais le cas. Je me souviens de n’avoir pas pris le temps de savourer ces moments-là.
Et puis, 2 ans après, j’apprends la sortie, d’une déclinaison papier de votre film. L’aventure continue ! Le plaisir aussi.
Comme le film, ce livre sème un vent de liberté à chaque page. La liberté de pouvoir courir tout simplement. Peu importe qui nous sommes, ce que nous représentons. Peut importe l’âge, le sexe, le niveau social. Peu importe ses valeurs, ses ambitions, ses envies, ses pratiques, ses idéologies politiques. Peu importe ses performances. Être simplement libre de prendre des baskets et de courir. Sentir le vent, les odeurs. S’approprier les kilomètres, les miles. Courir pour oublier le quotidien, les soucis. Courir pour aller chercher l’inspiration, l’idée géniale. Courir pour exister tout simplement. Et surtout, surtout, pour mon cas personnel, courir parce que, comme le précise Noël Tamini le fondateur du quotidien Spiridon : “parce que la douche et la bière sont bien meilleures après avoir couru” !
Courir pour mettre un pied devant l’autre. Geste en l’occurrence le plus banal qui soit, mais qui est sublimé quand on accélère le pas. La sensation n’est plus la même.
Avec cet ouvrage, vous nous en remettez, une couche. Car rien n’est jamais acquis. Les combats d’hier reviennent fleurir les crises d’aujourd’hui. Mon fils ne me croira pas si je lui dis qu’il n’y a pas si longtemps, les femmes étaient interdites de courir sur de longues distances, pour des raisons médicales, mais pas que ! J’ai retrouvé ci-dessous, une citation qui aurait très bien pu figurer dans votre ouvrage :
“Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public : oui d’accord. Mais qu’elles se donnent en spectacle, à certains jours de fêtes, où sera convié le public, qu’elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n’est pas entourée de murs épais, voilà qui est intolérable !”
(Henri Desgrange)
Cher Pierre, “Free to run”, n’est pas un livre, c’est un bel objet. De ceux que l’on offre à ceux que l’on aime. Il sera du plus bel effet au pied du sapin.
Une fois le livre refermé et comme à la fin de la projection de “Free to run”, nous voici, envahi d’une douce sensation, mieux, d’une terrible envie. Celle de prendre des baskets et d’aller courir. Pour rien, juste comme ça. Pour se sentir libre…encore une fois.

Achetez, offrez, lisez : “Free to run”
Pierre Morath
Hugo et cie

Sebastien Beaujault

Rédacteur web freelance, ici je vous parle de littérature sportive. Et plus généralement de la culture et du sport. Du livre de sport, de la bande dessinée de sport et même, parfois, de documentaire sportif. Malheureux à plus de 3 mètres d'un livre.