Candy Crush: du deal de drogue?

Un jeu qui est conçu pour traire les gens comme des vaches à lait sans contre-prestation valable: voilà le modèle d’affaires vers lequel tend malheureusement aujourd’hui une grande partie de l’industrie du jeu vidéo.

Particulièrement énervé contre ce «business model» honteux et inapproprié, je vous explique pourquoi, à mon avis, si la production artistique et ludique continue à aller dans ce sens, nous sommes mal. Et j’en profite pour vous dire (si vous ne savez pas déjà) comment faire pour contourner sur l’iPhone ou l’iPad la plupart des barrières absurdes qui vous obligent aujourd’hui à payer pour continuer de jouer à ce jeu.

Rémunerer le travail

Il en a déjà été question dans un précédent billet, il est normal qu’un travailleur reçoivent une rémunération lorsqu’il produit quelque chose, et il en va de même dans le domaine des jeux vidéo.

Le modèle du deal de drogue

Candy Crush, vous connaissez peut-être, on peut y jouer partout ou presque. Et c’est gratuit. Enfin au début. C’est un jeu plutôt amusant, très classique, mais qui a comme la drogue la propriété d’être addictif. On a de la peine à s’arrêter d’y jouer, même si c’est simple. Un peu comme Tetris avant. Comme la drogue, la première dose est gratuite. Mais assez rapidement, si on joue beaucoup et qu’on doit recommencer certains niveaux, il faut payer ou attendre longtemps. Après si on veut aller plus loin, il faut payer ou attendre très longtemps entre chaque niveau. Enfin, certains niveaux sont difficiles et si on veut les passer sans payer, cela peut devenir extrêmement difficile. Et c’est là que vient l’arnaque. Comme la drogue, une fois qu’on est accro, c’est cher.

In-App Purchase

Au fait, si on ne paye rien pour rémunérer le vrai travail (la production du jeu), il y a des gens qui ont programmé le jeu pour le rendre EXPRÈS moins agréable et plus frustrant. Ainsi, en payant, on peut enlever ces barrières que les gens ont pris du temps à ériger… temporairement, parce qu’après il faudra repasser à la caisse. C’est donc ce qui est choquant dans ce type de jeu: ce que vous payez ne coûte rien à produire, et on vous force à prendre une décision d’achat à des moments de faiblesse. Et ce modèle marche bien, la société gagne des millions avec ce jeu.

Une industrie en déroute

Ce qui est dommage, c’est la mauvaise qualité des jeux qui en résulte. Les sociétés ont meilleur temps à passer peu de temps dans la qualité d’un jeu, et beaucoup dans les stratégies pour que les gens jettent des centaines de francs dedans. Il est aujourd’hui plus rentable de faire des jeux moins amusants. C’est encore un bon indice qui montre que notre système économique n’est pas du tout adapté à l’économie numérique, car il incite à la médiocrité.

Jouer gratuit à Candy Crush

Outre militer contre ce genre de modèle et surtout pour une culture de qualité (Ce qui inclut les jeux vidéo), je peux au moins donner un petit conseil à celles et ceux qui ne le savaient pas encore pour pouvoir jouer gratuitement au jeu (sans hacking bien sûr). Si vous jouez sur téléphone mobile, le jeu utilise la montre de votre appareil pour déterminer le temps que vous avez à attendre avant de pouvoir jouer à nouveau (regagner vos vies ou jouer le prochain niveau quand vous devez attendre 24  heures). Il vous suffit pour pouvoir jouer tout de suite de:

–          Quitter le jeu

–          Avancer manuellement la montre de votre appareil de deux jours (sur iPhone : Réglages, Général, Date et Heure)

–          Lancer le jeu

–          Hop, vous avez récupéré vos vies

–          Remettez ensuite la montre à la bonne heure et continuez à jouer J

Amusez-vous, et espérons que d’autres sociétés se battent pour des jeux vidéo de qualité (comme par exemple Valve, dont je parlerai à l’occasion d’un prochain billet, qui est une société qui fonctionne sans chefs)

Samuel Bendahan

Conseiller national socialiste vaudois et Docteur en sciences économiques, Samuel Bendahan enseigne à HEC Lausanne (UNIL) et à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), au Collège des humanités et y fait de la recherche. Il est également président de BSC Association, une entreprise organisée sous forme d'association à but non lucratif.