Dura Lex USA, Sed Lex USA

Toutes ces affaires bancaires qui nous occupent depuis des années sont déjà compliquées, mais alors en plus quand on ne nous dit pas tout, ça devient impossible!

C’est ce que doivent se dire bien des personnes depuis l’épisode de la « Lex USA ». Comment alors juger nos parlementaires qui ont du se décider, pour certains avec pas beaucoup plus d’informations que nous ?

Une question de risque

On peut commencer par raisonner avec ce que l’on sait. Il y a un principe très important en finance, celui du rapport entre rendement et risque. Les acteurs économiques choisissent le niveau de risque qu’ils veulent prendre. En général, comme nous n’aimons pas ce risque, les comportements les plus risqués sont aussi les plus rentables. Comme on peut le constater sur le schéma ci-dessus, si vous placez votre argent en prenant très peu de risque, vous pouvez espérer un retour sur investissement très faible.

Plus de risque, plus de profits

Plus vous prenez de risque, plus vous pouvez attendre de rendement. Des actions sont plus risquées que des obligations des confédérations. Les produits dérivés, eux, peuvent-être plus risqués, mais rapporter beaucoup plus. En effet, certains d’entre eux sont basés sur l’effet de levier, qui consiste à amplifier les effets de rendement d’un autre titre boursier. En achetant une Option sur une action, par exemple, on peut gagner beaucoup si cette action monte que si on avait acheté l’action.

Le summum du risque

Le summum du risque, consiste à se lancer dans des activités illégales. Les risques sont élevés, mais les rendements sont souvent, eux aussi, très juteux. C’est probablement pour cela que des banques se sont lancées dans ces activités : les profits promis ont fait oublier un peu les risques de sanctions. C’est aussi ce qui se passe dans l’économie souterraine en général : l’ensemble des activités criminelles ou illicites sont accomplies parce qu’il s’agit de l’endroit où les rendements peuvent être les plus élevés. Si ce n’était pas le cas, les gens se cantonneraient à ce qui est légal.

Lex USA : réduire le risque qu’on ne veut pas faire prendre…

On peut voir la Lex USA comme une réduction des conséquences pour les établissements qui ont choisi l’activité illicite aux Etats-Unis. On peut comprendre que l’on veuille que les acteurs économiques soient prêts à prendre des risques, mais il y a une limite. S’il est vrai que l’état devrait plus aider les acteurs qui prennent des risques dans les secteurs d’activité légaux (comme par exemple les start-ups qui sont très risquées), il doit être ferme vis-à-vis des acteurs qui ont contrevenu à la loi. Ainsi, Ceux-ci se cantonneront plus tard à l’activité légale, car ils savent que nous ne serons pas là pour les aider.

Les parlementaires aussi n’aiment pas le risque…

Il y a une autre bonne raison pour laquelle le parlement n’avait pas à accepter cette loi. Il ne connaissait pas les tenants et les aboutissants. Il faut être honnête : personne ne sait vraiment ce qui se serait passé dans les deux cas (acceptation, refus). Mais une chose est claire, les personnes qui décident devront répondre des conséquences de leurs actes. Or, peut-on vraiment reprocher à un parlementaire de dire non, alors qu’il aurait du politiquement assumer les conséquences du oui, sans savoir de quoi il s’agit ? 

Samuel Bendahan

Conseiller national socialiste vaudois et Docteur en sciences économiques, Samuel Bendahan enseigne à HEC Lausanne (UNIL) et à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), au Collège des humanités et y fait de la recherche. Il est également président de BSC Association, une entreprise organisée sous forme d'association à but non lucratif.