Exploration spatiale

Elon Musk confirme : son premier vaisseau spatial atterrira sur Mars en 2022

Le 28 septembre à Adelaïde (Australie) dans le cadre du 68ème IAC*, Elon Musk a fait le point sur l’avancement de son projet annoncé il y a un an de créer une colonie terrienne sur Mars. Le public n’a pas été déçu. L’objectif de 2022 pour l’atterrissage des premiers vaisseaux (cargo), est confirmée. Le premier vol habité devrait avoir lieu lors de la fenêtre suivante, en 2024.

*International Astronautical Congress

Cette année, certains tests nécessaires pour atteindre ces objectifs ambitieux ont été effectués avec succès, d’autres sont en cours. (1) L’énorme réservoir d’oxygène liquide (cryogénique) en fibre de carbone (1000 m3) a résisté à la pression nécessaire plus marge de sécurité. (2) Le moteur « raptor » dont 31 exemplaires doivent équiper le lanceur « BFR » (pour « Big Fucking Rocket » !), peut donner l’impulsion nécessaire pour le temps nécessaire pour la mise en orbite basse terrestre (« LEO ») et à l’atterrissage sur Mars. (3) Le système de récupération du lanceur a fonctionné 16 fois de suite sans échec (sur la fusée plus petite en service actuellement, « Falcon 9 »). (4) L’automatisation de la manœuvre de rendez-vous en orbite (qui sera nécessaire pour le remplissage des réservoirs avant le saut vers Mars) est en cours avec les vaisseaux-capsules Dragon-1 qui desservent l’ISS. Elle se déroule correctement. La prochaine étape, qui conduira à l’automatisation totale, doit se faire en décembre de cette année avec le vaisseau Dragon-2. (5) La technologie de protection thermique par bouclier contre les températures extrêmes que le vaisseau devra supporter pendant les rentrés atmosphériques, est également testée avec les Dragons.

Par rapport au projet martien présenté l’année dernière il y a deux différences importantes. Le lanceur BFR avec son vaisseau sera plus petit que l’ITS (« Interplanetary transport System »), 106 mètres de hauteur et 9 mètres de diamètre au lieu de 127 mètres et 12 mètres. Compris dans ces dimensions, le vaisseau proprement dit, « Mars Transit », sera à peu près de même hauteur (48 m / 49,5 m) mais plus fin (9 mètres au lieu de 17 mètres). Surtout le lanceur proprement dit sera nettement plus petit (58 mètres au lieu de 77 mètres). Le groupe moteurs sera donc nettement moins puissant (31 moteurs raptors au lieu de 42). Le résultat c’est que la poussée sera de 5.400 tonnes (au lieu de 13.000 tonnes !) pouvant emporter 4400 tonnes (au lieu de 10.500 tonnes !). Le vaisseau ne pourra donc monter que 150 tonnes en orbite basse terrestre (LEO) au lieu de 550 tonnes. Cette réduction de puissance est très importante mais le Saturn V qui a permis les missions Apollo sur la Lune et qui était jusqu’à présent le plus gros lanceur, ne pouvait lever que 135 tonnes. La nouvelle configuration (complétée par 6 moteurs au lieu de 9 pour la partie vaisseau du système) permettra quand même d’emporter, comme précédemment, 100 tonnes ou 100 passagers plus leur support vie à la surface de Mars. Après l’arrivée sur l’orbite basse terrestre, le vaisseau sera réapprovisionné en carburant (méthane et oxygène) pour lui permettre de donner l’impulsion pour atteindre Mars (au moyen de quatre BFR version tanker). Une fois l’impulsion donnée, le BFR lanceur retournera sur sa base et sera réutilisé. La partie vaisseau continuera seule vers Mars et pourra en repartir avec l’impulsion de ses seuls moteurs car la gravité martienne est seulement d’un tiers de celle de la Terre (vitesse de libération de 5 km/s au lieu de 11,2 km/s). La poussée pourra lui permettre de remporter jusqu’à 50 tonnes sur Terre.

Les conditions de voyage seront assez confortables puisque le volume pressurisé du vaisseau sera de 825 m3 soit plus que celui d’un A380). Les passagers pourront disposer de 40 cabines (pour 2 ou 3 personnes) et d’espaces communs assez vastes.

La deuxième différence par rapport au projet présenté en 2016 c’est que le système lanceur plus vaisseau sera non seulement 100% réutilisable mais aussi universel. Elon Musk veut simplifier, pour rationnaliser, modulariser, produire en chaîne, afin de réduire les coûts. A terme, il n’y aura plus de Falcon 9, de Falcon Heavy (dont le premier vol n’aura lieu qu’en décembre !) ou de capsule Dragon mais un seul lanceur et un seul vaisseau (version cargo ou habitable). Cette structure unique pourra être utilisée pour n’importe quelle mission dans l’espace, soit mise en orbite de satellites de quelque taille que ce soit (10 fois Hubble !), soit récupération de satellites en fin de vie, soit missions vers d’autres destinations dans l’espace (Lune !) et même, vols intercontinentaux sur Terre. Elon Musk a conclu sa présentation en montrant que n’importe quel point de la Terre serait accessible en moins d’une heure. Avec cette versatilité, le coût unitaire des lancements quels qu’ils soient, vont plonger. Elon Musk estime qu’il coûtera moins que celui du Falcon 1 pourtant aujourd’hui le moins cher et qui ne peut lever que 0,7 tonnes en LEO. La réutilisabilité a déjà donné à SpaceX un avantage compétitif extraordinaire. La croissance du nombre de ses lancements est exponentielle. En 2020 la société devrait réaliser 20 lancements et en 2018, 30 lancements soit la moitié de tous les lancements effectués dans le monde. Les grandes agences (dont l’ESA) vont souffrir !

Sur ces bases, les perspectives financières sont bonnes et le rêve devient possible. Les deux vaisseaux cargos de 2022 rechercheront des sites où la glace d’eau sera exploitable, vérifieront les risques (radiations ou microbes martiens), mettront en place les équipements pour produire l’énergie, extraire les matières premières et l’infrastructure de support vie pour les premiers colons. En 2024 les quatre vaisseaux suivants (deux cargos et deux habités) débarqueront l’usine de production d’ergols (méthane et oxygène) à partir de l’atmosphère et de l’eau martienne et les premiers colons commenceront à construire la première base. Ce sera la première page de l’histoire humaine sur Mars. Je le verrai peut-être malgré mon âge !

NB : vous aurez remarqué que lors de cette conférence, le nom du COSPAR et des règles de précaution biologique ultra-strictes que ce docte organisme international a édictées, n’ont même pas été mentionnés ! A trop demander, on n’obtient rien.

Image à la Une :  Le premier vaisseau Mass Transit se pose sur Mars (illustration SpaceX).

Lien vers la présentation d’Elon Musk : http://www.spacex.com/mars

Images ci-dessous : le vaisseau Mars-transit et la comparaison des coûts de lancements (images SpaceX)

Lire aussi dans le Temps:  https://www.letemps.ch/economie/2017/09/29/big-fucking-rocket-elon-musk-prepare-conquete-mars

Quitter la version mobile