Transidentité: l’impossible débat?

La question du changement de sexe ou de genre semble passer d’un tabou à l’autre. D’abord, et pendant longtemps, le sujet était inabordable à cause d’une morale qui interdisait tout écart à l’hétérosexualité et toute échappatoire au sexe de naissance. A notre époque, de ce qu’il paraît, il est devenu inabordable par excès contraire, les transactivistes voulant interdire tout discours s’écartant de leurs revendications. Cela alors que, somme toute, l’idée que l’on puisse changer de sexe – respectivement, de genre – a fait son chemin dans nos sociétés occidentales.

Peut-être un peu rapidement, pourrait-on dire, tant le débat n’a pas vraiment eu lieu, la permissivité nouvelle ayant souvent découlé d’un refus de discriminer aux accents pavloviens. Ce qui est en soi honorable, mais ne peut dispenser d’une réflexion approfondie sur les modalités d’un tel changement et ses implications sociétales et médicales.

Ça n’est d’ailleurs pas un hasard si le holà est venu du milieu médical, qui est le premier observateur du phénomène1. La Suède, qui avait été pionnière dans sa permissivité, a suspendu sa politique pour les mineurs suite à plusieurs constats2: l’augmentation importantes des demandes, la relative inefficacité à réduire le mal-être, l’écart important entre les « sexes de départ » (les jeunes filles souhaitant changer de sexe sont largement majoritaires), les effets secondaires et une augmentation de gens souhaitant revenir en arrière au bout de quelques mois ou années et la quasi-impossibilité de le faire.

En France3, le milieu médical s’inquiète également et, en Suisse, une tribune récemment publiée par Le Temps4 alerte sur la transition chez les mineurs.

De telles questions doivent être abordées avec sérieux et l’on se doit de tenir compte des constats d’expériences similaires dans d’autres pays. Cela pour éviter d’enclencher des processus irréversibles sans mesurer leurs possibles conséquences, positives comme négatives.

Mais voilà, les transactivistes refusent ne serait-ce que d’aborder ces questions, comme l’ont tristement illustré les deux récentes actions ayant empêché la tenue de débats publics à l’Université de Genève5. Manifestement, seule l’idéologie qu’ils professent a droit au chapitre et que l’on ne s’avise pas de s’en écarter, de la disputer, même de la discuter ou gare à ses fesses sur les réseaux sociaux. Peu avares de pétitions virtuelles et d’appels à l’interdiction professionnelle des critiques relégués à la condition de blasphémateurs, les meutes cybernétiques transactivistes ne s’embarrassent pas de grand chose et passent des écrans aux auditoriums universitaires.

On pourrait s’étonner que des gens si déterminés sur la toile soient si fébriles à l’idée que leurs revendications fassent l’objet de critiques et soient discutées dans l’agora. Après tout, quand on est sûr de soi, on affronte le débat sereinement, voire avec appétence, non?

Et pourtant, ils paraissent frappés d’une sévère “agônaphobie” (du agôn grec, la confrontation, le débat). Est-ce parce qu’ils doutent de la solidité de leurs arguments ou de leur capacité à les tenir face à une contradiction, comme le laisse entendre un sujet de la RTS6? Où est-ce par intégrisme idéologique, qui refuserait l’idée même qu’on ose discuter leurs revendications? Un mélange des deux? Le meilleur moyen de le savoir serait de justement pouvoir mener ces débats.

On m’objectera que si même des sketchs d’humoristes sont source de panique sur Twitter, c’est mal parti pour un débat de fond. A en croire son annonce de changement de politique interne réaffirmant son attachement à la liberté d’expression artistique7, Netflix avait anticipé les cris d’orfraie des activistes, tirant la leçon des remous autour du dernier “special” de Chappelle, avant de sortir celui de Ricky Gervais8.

Ce qui rappelle que le périmètre de la liberté d’expression est, de facto, celui de l’exercice de la démocratie, puisque celle-ci repose sur le débat public. Et que des décisions concernant des traitements médicaux administrés à des mineurs engagent la société toute entière. D’où la légitimité de débattre sans interdits, de telles décisions ne pouvant se prendre sur la seule crainte de tweets rageurs.

On saisit ainsi que l’auto-attribution d’un pronom ne peut suffire à régler ces questions, qui dépassent la seule dimension individuelle. En pointant d’ailleurs cet aspect, l’humoriste britannique Ricky Gervais ne verse pas dans la « transophobie » que la meute de twittos rageurs voudrait lui attribuer, mais aborde un élément central de la problématique: l’indifférenciation.

Cela parce que la définition – ou son absence – de ce qu’est une femme ou un homme n’est pas anodine et ne regarde pas uniquement celles et ceux qui voudraient opérer un changement de sexe, mais bien la société toute entière. Il est au demeurant paradoxal que cela puisse échapper à des activistes s’inscrivant dans un courant de pensée qui confère aux constructions sociales une origine sexuée ou genrée.

On pourrait même oser dire qu’au moment où les regards sont tournés vers la Cour Suprême américaine et le sort du droit à l’avortement9, sans même évoquer la loi scélérate adoptée il y a quelques jours en Oklahoma10, la question de la réalité du sexe biologique est plus d’actualité que jamais depuis un demi-siècle.

Car tout le monde voit bien que l’enjeu concret et direct de la maîtrise de son corps concerne en l’occurrence un sexe en particulier, du fait de sa capacité à engendrer la vie, celui de la femme au sens biologique.

C’est pourquoi il n’est pas possible de refuser de débattre de telles questions et qu’il est dangereux et illusoire de vouloir les trancher par la menace ou les pressions virtuelles ou réelles, c’est-à-dire en réduisant toute critique au silence. Ne serait-ce que parce qu’une telle stratégie ne peut qu’échouer, elle doit être abandonnée.

Il nous faut donc reprendre le chemin de la controverse et trouver ensemble un équilibre qui permette à chacune et chacun de vivre selon ses désirs, tout en évitant la négation de la condition féminine, de ce qui constitue une part importante de l’Histoire des femmes. En ce sens, vouloir régler les modalités de la transition de manière rationnelle, réfléchie et concertée n’a rien d’une phobie.

Et un tel chemin est forcément jalonné de cases « débat » car c’est ainsi que nous tranchons nos désaccords en démocratie et faisons, cas échéant, évoluer nos sociétés.

 

Illustration: portrait de Lili Elbe par Gerda Wegener

Matthieu Béguelin

Saltimbanque protéiforme, tour à tour comédien, metteur en scène, podcasteur ou auteur, Matthieu Béguelin se consacre au théâtre sur les planches et le bitume comme sur les ondes. Cinévore et phile, il défend la liberté artistique comme condition première de la liberté d’expression.

12 réponses à “Transidentité: l’impossible débat?

  1. De dire que le débat n’a pas eu lieu surprend un peu, à en juger l’encre qui a coulé (et qui continue de couler) depuis l’opus major de Butler qui date quand même de… 1990, et l’augmentation exponentielle de publications, colloques, débats consacrés à la question. Qu’une large partie du public (et des décideurs) se soit tenue largement à l’écart de ces débats reste évident par ailleurs (mais on ne peut pas faire boire une vache qui n’a pas soif…). Mais du coup, on peut quand même se demander s’il est vrai que “l’idée que l’on puisse changer de sexe – respectivement de genre – ait fait son chemin” – du moins cela reste-t-il un chemin assez sinueux…
    je lis encore que “les transactivistes refusent ne serait-ce que d’aborder ces questions, comme l’ont tristement illustré les deux récentes actions ayant empêché la tenue de débats publics à l’Université de Genève”… Diable, deux manifestations perturbées par des activistes et voilà “LES transactivistes” qui se voient attribués le “refus de tout dialogue”; n’est-ce pas aller un peu vite en besogne?
    Quant à l’évocation de l’autorité médicale, elle suppose justement ce qui est en question: le noyau dur de la revendication transidentitaire consiste précisément dans ce refus de la normativité médicale au profit d’une conception du genre comme pure affirmation. On peut en penser ce qu’on veut (et je conviens qu’une affirmation purement monologique est peut-être une forme dévoyée de communication), mais au moins peut-on en débattre, justement (alors que la parole sacro-sainte du corps médical, en principe, n’est jamais discutée, même quand la compétence scientifique est instrumentalisée pour masquer l’idéologie – pas besoin d’exemples ici). De manière assez emblématique, les témoignages des détransitionneurs du documentaire suédois transtrain semblent tout imprégnés d’une assez étonnante nostalgie d’un tel paternalisme médical (“j’aurais voulu qu’on me dise juste ce que je dois faire pour aller mieux – c’est eux les spécialistes”); il faudrait peut-être ici en effet rappeler que partir pour une transition (une vraie, avec réassignation et tout), c’est un peu comme aller chez le tatoueur, au carré: si vous êtes là, il vaut mieux savoir pourquoi…
    Enfin, dans la dernière partie de ton texte, on trouve la défense classique des féministes no-trans: le brouillage des frontières risquerait de dissoudre le “sujet” que sont les femmes, et donc de compromettre la lutte. Persuadé que c’est dans les vieilles casseroles qu’on fait la meilleure soupe, je ne peux m’empêcher de revenir à de Beauvoir: chez elle, ce qui définit le sujet, c’est la situation – base de la critique de toute aliénation par essentialisation (je ne t’apprends rien). Que les situations soient infiniment plus multiples et plus complexes qu’elle ne l’avait elle-même imaginé ne me semble pourtant pas incompatible avec son idée centrale: c’est dans l’interprétation de la situation (et notamment du rapport de force lié à ladite situation) que se révèle l’injustice, ce qui rend la lutte possible. Butler a toujours tenu à ce grand écart, et “Trouble dans le genre” se veut un livre… féministe. Face à un “front du refus” plus actif et moins innocent qu’on ne l’imagine, le “front commun” formé par les différentes minorités ne reste-t-il pas la moins mauvaise réponse? Et pour terminer par une petite mise en abyme, pensons à la réception du livre même de de Beauvoir: oeuvre visionnaire, le deuxième sexe a fâché des auteurs dont l’identité surprend (Camus, Maurois), et ceux qui l’ont vraiment compris sont rares; parmi eux figure Mounier, qui aurait dit, ailleurs, quelque chose comme “on ne reproche pas ses cris à celui qui souffre”, dans quelque situation analogue d’une lutte par ailleurs légitime dont on ne voyait que les quelques excès. Les maladresses de quelques activistes un peu trop zélés ne mériteraient-elles pas la même indulgence aujourd’hui?

    1. Ce billet s’inscrit dans un contexte contemporain et n’a donc pas vocation à constituer un bilan du débat depuis la parution du grand œuvre de Butler. Il ne t’aura d’ailleurs peut-être pas échappé, Gauthier, que la teneur du débat en question a grandement changée depuis les années 90.
      Aujourd’hui, les “identity politics” fleurissent et réclament non pas leur participation légitime au débat, mais de policer celui-ci.
      C’est donc dans cette perspective – et avec la question de la liberté d’expression en point de mire que j’ai fait ce billet.
      Ceci posé mon souci est justement ces velléités de groupuscules identitaires d’imposer leurs vues plutôt que d’en débattre – et, éventuellement, convaincre. Cela parce que ça revient à escamoter tout obstacle, à refuser la complexité de ces questions et, in fine, empêche toute progression raisonnée de la société.
      Car, hélas, il n’y a pas que deux pauvres cas. Ils sont légions dans les universités anglo-saxonnes et la pratique a visiblement traversé l’Atlantique.
      Tu mentionnes Butler d’entrée de cause et ça n’est pas un hasard que le groupe d’étude empêché ait justement prévu d’entendre une voix dissonante de la sienne. « Tout ce qui n’est pas mon avis doit se taire » n’est pas une attitude démocrate, ni intellectuellement recevable. Encore moins dans une université.
      La première à avoir été empêchée portait sur les traitements proposés aux mineurs. A ce titre, ton analogie avec le tatouage est interessante car on l’interdit aux mineurs alors que des filles de 14 ans peuvent demander des interventions chirurgicales irréversibles (au contraire du tatouage, qui peut, moyennant passablement de souffrances, s’effacer). N’y aurait-il pas là comme un léger emballement? Voire une relative irresponsabilité de la part des autorités, médicales comme politiques? J’en suis assez certain. Quoi qu’il en soit, poser la question de la possibilité d’un consentement éclairé à 14 ans (ou parfois 12) ne me paraît ni rétrograde, ni relevant d’une phobie.
      Enfin, sur la question de la réalité du sexe biologique, je vois mal en quoi Simone serait d’un quelconque secours. Elle parle justement de situation et celle d’un homme devenu femme face aux décisions législatives relatives à l’avortement est la même que la mienne: nous ne sommes pas directement visés car nous n’avons pas la capacité d’être enceints. Notre liberté n’est donc pas entravée.
      Mais la piste d’Emmannuel Mounier est intéressante. En bon catholique, il n’est pas étranger au dolorisme, qui connaît une nouvelle jeunesse avec la logique victimaire qui nourrit la morale des identitaires. Pourtant, il ne s’agit pas de leur interdire de faire valoir leurs aspirations ni même de combattre ceux qui s’y opposent. Mais de dire qu’ils ne peuvent se passer du nécessaire débat de celles-ci et doivent, se faisant, intégrer le commun au lieu de se retrancher dans des bastions identitaires où seules leurs complaintes résonneraient.

      1. J’excuse d’avance mon Français car ce n’est pas ma première langue.

        “Aujourd’hui, les “identity politics” fleurissent et réclament non pas leur participation légitime au débat, mais de policer celui-ci.”

        Ceci est un argument de droite historiquement qui refuse en effet de se confronter avec les idées présentées par ceux qui les critiquent. Il est important de se rappeler des dynamique de pouvoirs et matérielles dans cette discussion: qui est un auteur publié, qui ment sur un débat qui a été fait il y a 30 ans? Qui sont les étudiants qui remettent en question le status-quo et un “whitewashing” de transphobie à travers un fond de teint intellectuel? Je fais allusion évidemment à la dernière intervention des activistes à Genève, et en examinant un simple instant les propos exécrables de Marty dans son nouvel ouvrage, ne pas se revolter contre une telle propagande est de l’ignorance ou/et de la violence envers les personne transgenre.

        Voici un analyse du livre qui donne un peu de perspective pour ces activistes, dépeints comme “zélés” et qui “policent” les discours publics, alors qu’ils n’ont concrètement aucun pouvoir dans l’espace public, politique, universitaire, devant utiliser leur corps et leur voix pour combattre un système qui les démonisent.

        https://blogs.mediapart.fr/antoineidier/blog/170522/propos-du-sexe-des-modernes-et-d-un-probleme-plus-general-la-critique-de-gauche

        Pendant ce temps, Mr. Marty, qui est un sioniste convaincu, a son ouvrage maladroit publier et célébrer par des journaux libéraux. Qui est réellement censuré dans cette discussion?

        “Tu mentionnes Butler d’entrée de cause et ça n’est pas un hasard que le groupe d’étude empêché ait justement prévu d’entendre une voix dissonante de la sienne. « Tout ce qui n’est pas mon avis doit se taire » n’est pas une attitude démocrate, ni intellectuellement recevable. Encore moins dans une université.”

        Je suis d’accord, pourquoi donne-t-on une plateforme uniquement à un point de vu transphobe? Et pourquoi les médias demonisent-ils des activistes, qui foncièrement, n’ont fait qu’un peu de boucan pour revendiquer leur voix? C’est le moment de réaliser que de taire des étudiants “n’est pas une attitude démocrate, ni intellectuellement recevable. Encore moins dans une université.”

        “Cela parce que ça revient à escamoter tout obstacle, à refuser la complexité de ces questions et, in fine, empêche toute progression raisonnée de la société.
        Car, hélas, il n’y a pas que deux pauvres cas. Ils sont légions dans les universités anglo-saxonnes et la pratique a visiblement traversé l’Atlantique.”

        Ceci montre une myopie sur la réalité que vivent les personnes transgenre aujourd’hui. En lisant votre texte et votre réponse, je pense que vous êtes de bonne foi en voulant discuter ce sujet, et je doute que je vais changer votre avis, malgré la réalité que je vous propose. Mais mon but ici est de vous faire réaliser l’absurdité de ce type de discours: pourquoi prenez-vous la défense par principe d’institutions qui oppressent et renient l’existence des personnes transgenre systématiquement?

        Un exemple parmi des centaines: https://www.oxfordsu.org/resourcehandler/c494a2d7-3ace-4a76-b609-aef78ee7f821/

        Pour quelqu’un qui prêche le débat et la liberté d’expression, pourquoi n’essayez vous pas de comprendre le point de vu de ces activistes sans pouvoir matériel ou politique?

        Il me semble que vous refusez la complexité de ces questions et, in fine, empêchez toute progression raisonnée de la société.

        1. Merci, tout d’abord, de me considérer de bonne foi quant à ma volonté qu’il puisse y avoir débat. C’est en effet là-dessus que porte ce billet. Il ne s’agit donc pas, au contraire de l’intention que vous me prêtez, de défendre le livre de Marty (dont je vois mal ce que l’éventuel sionisme vient faire ici). La question de la liberté d’expression ne se résume d’ailleurs pas du tout à défendre uniquement les opinions que l’on partage, mais bien toutes les opinions et donc aussi celles qui nous sont contraires.

          Mon problème est donc cette absence de débat, ce refus de laisser l’autre exprimer son point de vue. Vous citez Barthes, vous connaissez sans doute ce qu’il dit du fascsime: “ce n’est pas d’empêcher de dire, mais d’obliger à dire.” De là, refuser la parole à qui ne dit pas comme soi est une attitude fascisante.
          Pour ce qui est de l’unilatéralité que vous prêtez à l’université, je ne peux me prononcer, ne connaissant pas assez bien la situation genevoise. De ce que j’ai pu en lire ou en entendre, tant du recteur que de la CUAE, j’ai l’impression que les choses sont plus nuancées que vous l’avancez. Et, en toute honnêteté, l’étude d’Oxford me paraît peu probante, attendu qu’elle se base sur 52 réponses alors que l’université compte 25 mille étudiants.

          Quoi qu’il en soit, rien ne justifie que l’on empêche des prises de parole sur des sujets qui engagent la société, ne serait-ce que par souci de cohérence (l’exemple du tatouage vs la chirurgie de transition). Et l’argument voulant que l’un soit publié me paraît atrocement bancal. La littérature s’inscrivant dans le sillage des travaux de Butler ne manque pas, au contraire. Si l’on prend la petite recension qu’en fait Renaud Garcia dans son excellent ouvrage « Le désert de la critique », la tendance est bien plus de ce côté que de l’autre.

          Enfin, je ne pense pas que la question relève d’un clivage gauche/droite ou même progressiste/conservateur. Nous sommes plutôt en présence d’une fracture entre universalisme et individualisme ou identitarisme/communautarisme.

          En tout état de cause, c’est bien parce que je considère que le sujet est complexe et que je suis, en soi, partisan de l’émancipation, que je pense que le débat doit avoir lieu et que les pratiques de censures sont inadmissibles. Comme nous le faisons ici, même si nous ne nous convaincrons pas, l’échange amène de la dialectique et du frottement des idées jaillit parfois l’étincelle qui permet l’évolution.

          1. “La question de la liberté d’expression ne se résume d’ailleurs pas du tout à défendre uniquement les opinions que l’on partage, mais bien toutes les opinions et donc aussi celles qui nous sont contraires.”

            J’aimerais déjà clarifier que je n’ai pas répondu a votre poste pour débattre. Ceci n’est pas un débat: j’ai présenter un point de vu qui me semble absent dans votre analyse et c’est a vous de le prendre ou de le laisser. Votre réponse, aussi civile soit-elle, est réactionnaire. De plus, je ne projette pas sur vous les propos de Marty, dont le sionisme est présent pour démontrer son intolérance et son caractère exécrable à travers d’autres articles et oeuvres de ce dernier. Je comprend que c’est toute une autre discussion, donc continuons.

            Le problème fondamental de votre position d’absolutisme à la liberté d’expression est qu’elle ne représente pas la réalité. Ce n’est pas une question d’absence de débat, mais de qui a le pouvoir de débattre. L’autre, ou Marty dans mon example, a une bien plus grande audience et plate-forme que les activistes ont accès, d’où le besoin d’intervenir.

            De plus, comprenez que ce n’est pas une simple question d’avoir une discussion. Je suis un homme-cis comme vous (corrigez moi si je me trompe) et nous avons le luxe de pouvoir discuter de question qui regarde le futur et l’existence des personnes transgenres. Ces dernières ont 10 fois plus à risques de commettre un suicide, et ce chiffre implique seulement les personnes qui ont put se revendiquer transgenre. 1. Je ne suis pas sûre que ces personnes fondamentalement en danger ont le luxe de laisser des personnes dépassé par leur existence ralentir des initiatives pour leurs donner des droits et de se faire protéger aujourd’hui.

            Je ne voulais pas discuter directement de la question transgenre, car je ne suis pas un académique ou un représentant de mouvement sur le sujet, mais je retiens a préciser aussi que la transition implique principalement de la prise d’hormone, et non pas d’une opération – qui entre vous et moi, la décision de l’individu qui l’entreprend ne nous regarde pas. Revenir au sujet du changement de sexe est un argument a nouveau de droite pour effrayer une société fondamentalement transphobe. 2. (Cette source en particulier exprime le même point de vu que le sondage d’oxford, à travers toute l’Europe)

            La prise d’hormone est complètement réversible, et encouragé d’être faite autour de 16 ans, voir plutôt. Ceci est reconnu par la plupart des experts du domaines et les opérations de changements de sexe sont non seulement extrêmement difficile à accéder en Europe – rendant les opérations à l’étranger pour des prix cassés communes et extrêmement dangereuse – mais toujours prises par des adultes avec des suivis psychologique.

            “Si l’on prend la petite recension qu’en fait Renaud Garcia dans son excellent ouvrage « Le désert de la critique », la tendance est bien plus de ce côté que de l’autre.”

            Je ne connaissais pas cet auteur, ni de son ouvrage, mais à nouveau les symboles et stratégies de droite transparaisse à travers ses discours de cette article https://comptoir.org/2015/11/11/renaud-garcia-democratie-representative-failite-totale/ :
            l’utilisation de “wokeism” dilué par l’extrême droite 3., une position anarcho-capitaliste qui déguise des arguments TERF à travers la légitimation de Christine Delphy, ou encore la création d’un “homme de paille” pour représenter les féministes queer, sans démontrer une situation ou son récit a été avéré. Je ne veux pas généraliser son travail, mais à travers cet article, prétendre que cet personne est neutre politiquement et essaye de décortiquer des clivages sociétal est tout simplement faux.

            Pourquoi est-ce que je prend le temps d’expliquer ce qui n’est qu’une parenthèse de ce que représente l’existence d’une personne transgenre? Pourquoi est-ce que je ramène la discussion sur une question de position politique droite-gauche? Pourquoi est-ce que je rappelle des dynamiques de pouvoir entre Mr.Marty qui est non seulement publié, mais aussi un professeur à l’université de Paris et membre senior l’Institut universitaire de France si vous trouvez cela plus pertinent, et un groupe d’étudiant qui risque leur scolarité pour revendiquer des droits? Pourquoi est-ce que je prend le temps d’écrire ce commentaire?

            Comme j’ai dit dans mon commentaire précédant, vous ne me semblez pas être de mauvaise fois, mais vous répétez des talking points employés par la droite à travers le monde afin de renier l’existence des personnes transgenres, et autres groupes sous-représenté. Là ou vous pensez défendre la liberté d’expression, vous êtes au contraire en train de défendre la voix d’un nombre limité d’institution et de personnes dans des positions de pouvoirs qui on le monopole de la parole et propage un discours qui, à travers un discours conservateur de droite, pousse activement les personnes qui font parti de la communauté LGBTQ+ à mourir. Mon commentaire a pour but d’élargir votre regard sur cette question, au lieu de répéter des arguments que j’ai entendu des centaines de fois.

            De plus, je tiens a re-proposer l’analyse du livre de Marty que j’ai partagé lors de mon dernier message, qui démontre que son livre manque de rigueur académique et spécule sur une imagination de ce que Butler pensait durant l’écriture de ses ouvrages, tout en propagent des mythes transphobes.

            En conclusion, déjà je n’ai pas cité Barthes, et je reviens a mon discours systémique: qui a le pouvoir de censurer qui? Pourquoi est-ce exclusivement la droite qui utilise le terme “cancel culture” en parlant de liberté d’expression? 4. 5. 6. Pourquoi n’êtes vous pas aussi militant pour défendre le droit des activistes à avoir une plate-forme si vous prêchez la liberté d’expression et la non-censure, quand les journaux Suisse condamne ces dernier en les accusant de violence, alors que Marty continu à propager des idées haineuses qui statistiquement mènes au suicides de personnes transgenres? La liberté d’expression n’est pas l’absence de responsabilité, et les activistes n’ont pas le pouvoir de censurer qui que ce soit. La seul chose qu’ils peuvent faire c’est de mettre en évidence leur cause et espérer d’être écouter au lieu de retomber dans une guerre culturel mené par les médias autour d’une discussion immatériel de la liberté d’expression.

            Une citation d’un libéral, Karl Popper: “Si l’on est d’une tolérance absolue même envers les intolérants, et qu’on ne défende pas la société intolérante contre leurs assauts, les tolérants seront anéantis et avec eux la société tolérante.”

            1. (https://stopsuicide.ch/wp-content/uploads/2017/07/Publications_STOP_Suicide_et_LGBT.pdf)
            2. (https://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/fra-2020-lgbti-equality-1_en.pdf)
            3. (https://www.vox.com/culture/21437879/stay-woke-wokeness-history-origin-evolution-controversy)
            4. (https://time.com/5735403/cancel-culture-is-not-real/)
            5. (https://lecourrier.ch/2022/05/24/la-cancel-culture-nexiste-pas/)
            6. (https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/00323217211037023?journalCode=psxa)

          2. Je constate que pour quelqu’un qui ne veut pas débattre, vous ne ménagez pas vos efforts.

            Pour ce qui regarde la question de la liberté d’expression, vous aurez sans doute remarqué que je la lie à celle de l’exercice de la démocratie. Précisément parce que celle-ci a besoin du débat public pour se matérialiser. De là, en démocratie, tout le monde a accès au débat. Les évènements annulés étaient publics et permettaient d’apporter une contradiction. Il était également envisageable de tenir un autre évènement afin de développer d’autres vues que celles des intervenants. Les moyens de faire valoir son avis ne manquent donc pas et il n’y a aucune justification à empêcher les autres de donner le leur. Depuis Aristote, on considère que le débat argumenté est source de progrès car il conduit sinon à un consensus, au moins à la compréhension dépassionnée des uns et des autres.

            La cancel culture, qui existe bel et bien hélas, est à l’opposé de cette approche dialectique puisqu’elle vise l’interdiction ou l’empêchement des avis contraires. Elle n’a donc rien de démocratique. Par ailleurs, et quand même, on ne mesure pas l’action à son résultat, mais à son intention. Et il n’y a aucun doute sur la réalité de cette dernière.

            Pour la justifier, vous mettez en avant la mal-être des personnes trans – ce que personne ne conteste. Mais il ne peut suffire à empêcher tout discours critique des revendications ou de la théorie du genre. Au contraire, ces critiques sont nécessaires car elles procèdent d’un examen rationnel qui seul peut conduire à des changements sociétaux admis par la majorité. Une fois encore, pour que les problèmes d’une minorité soient pris en compte, il faut que la majorité les fasse siens. Cela ne peut se réaliser sur un seul discours victimaire qui se passerait de toute réflexion. En discuter n’est donc pas un “luxe”, mais une nécessité.

            En ce sens, non, ma réponse n’a rien de réactionnaire. Elle est réfléchie au lieu d’être émotionnelle et cherche les moyens de trouver un terrain commun, qui ne lèse pas d’autres combats qui sont aussi légitimes.

            Pour conclure, voyant qu’un simple article vous fait considérer un penseur anarchiste comme étant “de droite”, je vous invite à tenter une approche non-binaire de ces questions, c’est-à-dire ouverte à la critique comme au débat et dépourvue du réflexe pavlovien renvoyant tout discours non-aligné sur la doxa identitaire à la droite.

            Ne serait-ce que parce qu’il y a une part importante de la gauche qui n’est pas du tout encline à abandonner l’universalisme au profit des identity politics (qui relèvent, elles, d’une conception absolument droitière).

  2. (hypothèses)
    Si je vous dis que je suis une femme?
    C’est bien pour vous.

    Si je vous dis que je suis femme noire?
    C’est bien pour vous.

    Si je vous dis que je suis une femme noire qui aime les femmes?
    C’est bien pour vous.

    Si je vous dis que je suis une femme noire qui aime les femmes et qui a 14 ans?
    C’est bien pour vous.

    Et si je vous dis que je fréquente les mêmes cours de sports que votre fillette de 14 ans et que je vais me doucher avec elle et ses copines ce soir ?

    Au fait, je suis un homme, blanc, de plus de 50 ans, multicondamné.

    A un moment donné, dire le réel, est une preuve de bonté, pas d’inhumanité.

  3. Du coup, la femme trans qui a tapé la vitre protégeant la Jocande et étalé une tarte, c’est … bien ?

  4. En hommage à Jean Genet et aux funambules, je risque cette formule que m’inspire votre page ci-dessus: Serait trans-sexuel.le qui n’ose pas être sexuel.le.

  5. Vous n’avez pas engagez avec les points que j’ai mis en avant, ni avec la thèse que j’ai sourcé avec des articles scientifiques et journalistique dans mon commentaire. Vous pouvez citer Aristotes tant que vous voulez, cela ne change pas la réalité et les preuves que j’ai présenté, que vous renier avec des discours idéologiques personnels non-empirique. Je ne vais pas débattre quelqu’un qui me dit que le ciel est rouge, tout en activement poussant à la mort des communautés minoritaire. Cette personne n’a pas de respect pour mes idées, ni a envie d’avoir une discussion honnête et sincère.

    Non seulement le faite de penser que la démocratie s’exerce à travers des débats libre est non-historique, en plus d’être une claque à toutes les personnes à travers le monde qui ont dédié une vie entière de combat sociaux et d’action organisationnel pour une justice sociale qui n’est pas encore aboutit. Vos suggestions d’accès au débat sont une farce, que vous pouvez seulement entretenir si vous avez complètement ignoré toutes les sources que je vous ai offert. Ironique de plus de faire appel à un démocratie Athénienne, ou le débat était accessible seulement par une caste réduite de citoyens, ces derniers faisant l’usage d’esclaves.

    “Il était également envisageable de tenir un autre évènement afin de développer d’autres vues que celles des intervenants.” Ce n’est pas parce que vous êtes ignorant sur les activités collectives qu’elles ne se déroulent pas. C’est un excellent exemple du manque de couverture médiatique que vous ne entretenez même pas l’existence de forum de discussion alternative au status-quo.

    Enfin, votre tirade sur la cancel culture est à nouveau réactionnaire: elle ne présente aucune source ou point de vue recherché, mais simplement informé par vos préavis. Si vous aviez au moins pris le temps d’apprendre quelque chose à travers ce que je vous ai offert comme perspective, peut-être que nous pourrions avoir un réel échange d’idée, ou un fameux “débat”.

    Vous m’accusez d’avoir une réponse émotionnelle au lieu d’être réfléchie: ceci est juste insultant. Sachez que les deux ne sont pas exclusif, tout en vous démasquant comme désintéressé par la cause transgenre à travers l’implication que vous n’êtes pas émotionnel sur le sujet. Je n’ai pas peur de l’admettre, vu que mon discours est la pour défendre la communauté transgenre.

    Et non-merci, je n’ai pas besoin de vos suggestions “non-binaire” d’approche. A nouveau, vous tenez une position condescendante qui implique que je ne comprend pas, ou ne reconnait pas le type de discours qui se fait sur le sujet. Je me répète, mais je vous ai offert des lectures qui peuvent vous informer de mon point de vue, que vous avez ignorée.

    “Ne serait-ce que parce qu’il y a une part importante de la gauche qui n’est pas du tout encline à abandonner l’universalisme au profit des identity politics (qui relèvent, elles, d’une conception absolument droitière).”

    Part importante de la gauche = ?????? Qui est cette part importante de la gauche? Un énième homme de pail?

    Pour quelqu’un qui se dit pour la démocratie et le débat, il me semble que comme l’auteur que vous m’avez suggérée, êtes en effet pour préserver une chambre d’écho en ignorant une opinion dissidente.

    De plus, je ne sais pas si c’est votre site, ou vous même, mais je ne peux répondre directement à votre dernier commentaire. Peut être quelque chose à corriger.

    Ceci est mon dernier commentaire, j’espère vous avoir offert une perspective nouvelle, malgré votre refus de l’engager aujourd’hui. J’ai l’espoir que vous faites éventuellement l’effort de sortir de ce ce gouffre intellectuel et de réellement engagé avec des idées scientifiques et journalistiques alternatives à la votre.

    1. Je ne sais pas pourquoi il ne vous a pas été possible de répondre sous le fil, je transmettrai aux responsables du site (c’est un blog du journal Le Temps).

      Pour le reste, j’ai répondu à vos liens, en disant que non, le seul état psychologique ne peut justifier qu’on accède sans réflexion ni pesée d’intérêts à toutes les demandes d’un groupe. Un tel procédé nous conduirait très vite dans des impasses, attendu qu’il existe des intérêts contraires même au sein des luttes sociales. Preuve en est avec les frictions entre des transactivistes et des militantes féministes, pour prendre un exemple qui s’applique au sujet.
      Qui plus est, cet argument du mal-être est à double tranchant, puisqu’il permet à ceux qui veulent psychiatriser le débat de s’en donner à cœur-joie.

      Et si je n’ai pas remis une couche sur ces éléments, c’est parce que ce que nous enseignent les expériences suédoises et finlandaises est que ce mal-être ne trouve que peu de répit même après transition (où il y a bien des opérations au programme, comme en témoignent les deux sujets mis en note du billet). Et c’est donc bien un constat empirique dont il est question.

      Sinon, je dois à la vérité de confesser que vos tentatives répétées de disqualifier toute critique ou toute interrogation en la taxant d’être de droite ou réactionnaire est immature et binaire au possible, d’où mon conseil. Auquel j’ajoute celui-ci: lisez donc les auteurs au lieu de vous contenter d’articles allant dans votre sens pour vous en dispenser.
      Car, contrairement à ce que vous croyez, je connais les discours des transactivistes, des chantres de la déconstruction compulsive et des nouveaux identitaires qui se croient de gauche. Tout comme j’avais déjà lu la position invertébrée des Verts genevois. La cancel culture existe bel et bien, et relève de mœurs empruntées aux pires réactionnaires. Je préfère nettement le discours de Laure Murat, qui assume son existence et tente de la justifier. Cela me semble bien plus intellectuellement honnête que les dénégations qu’on peut lire ça et là et notamment dans ce communiqué des Verts, quand bien même je n’adhère pas à son analyse.
      Cela parce qu’il se trouve qu’on peut être critique ou dubitatif autrement que par ignorance, c’est-à-dire parce qu’on a lu des revendications et qu’on voit les obstacles qu’elles comportent.

      Et, pour la bonne forme, je n’ai pas parlé de la démocratie athénienne, mais des mérites que l’on reconnaît au débat argumenté depuis Aristote. Ça n’est pas la même chose. J’aurais pu citer Levinas pour être plus contemporain, mais je sens que vous allez nous parler de la démocratie lithuanienne…

      Enfin, pour votre question qui n’en est pas une sur les gens de gauche qui à tout le moins se méfient de la dérive identitaire anglo-saxonne, il se trouve que de très nombreux militants n’ont heureusement pas abandonné le terrain de la lutte des classe et des thématiques sociales. Comme le disait Gérard Noiriel, s’il est évident que d’autres facteurs entrent en jeu dans le champ des inégalités, il y a un moteur social, qui tient à l’organisation de l’économie. Et si l’on perd cela de vue, on comprend fatalement les enjeux de travers. Un peu comme ces activistes qui prennent l’intersectionnalité comme une méthode pour déterminer un apex oppresseur, ce qu’elle n’est pas.

      Pour conclure à mon tour: il faut se confronter aux contradicteurs, débattre et débattre encore. Il n’y a pas d’autre moyen probant de faire évoluer la société. Aucun ukase moral n’y suffira et tout le monde devrait se méfier des incantations à la pureté idéologique.

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