Préambule
Compte tenu des défis climatiques actuels, il est difficile de contester la nécessité de soutenir fermement les énergies renouvelables comme base d’un nouveau modèle énergétique, notamment l’énergie solaire photovoltaïque. Tant les volontés marquées des Etats et des collectivités, que les avancées technologiques des chercheurs et des industriels ou le dynamisme des opérateurs, tout concourt à faire du solaire un incontournable de cette transition énergétique. Le photovoltaïque est amené graduellement et inévitablement à remplacer les énergies fossiles. L’élan est mondial et d’autant plus impressionnant, que cette énergie, plus que tout autre, est devenue « citoyenne ». Tout à chacun peut financer et devenir actionnaire d’une centrale solaire, sur un toit privé ou public, et percevoir en retour une rémunération. Ainsi, le solaire photovoltaïque (PV) est en passe de devenir l’énergie du XXIe siècle, sur la base d’un consensus mondialisé.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, à l’instar de tout progrès, le solaire et donc le photovoltaïque, n’échappe pas aux mêmes impensés de notre société de surconsommation. Depuis le premier tiers du XXe siècle, avec l’arrivée de nouveaux procédés industriels et de nouveaux matériaux – dont le plastique, les déchets s’accumulent et font déborder nos poubelles, mais pas que. Avec leur volume incontrôlable, ils forment un 7ième continent dans nos Océans. Hier miracle des années 70, le plastique est devenu notre compagnon d’infortune dans ce désastre écologique. Le solaire, et a fortiori le solaire photovoltaïque, génère des déchets. Auréolée aujourd’hui du nom d’énergie verte, le PV se fait-il l’annonce d’un nouveau désastre écologique ? Alors des voix dissonantes avec le discours ambiant, inaudibles encore très récemment, s’engouffrent dans la brèche béante, et viennent jeter le trouble. A trop vouloir idéaliser ce nouvel or vert, ne masque-t-on pas une face moins lumineuse ?
Dans ce 3e volet de La Cellule Solaire, je mets l’accent plus sur la technicité que la poésie pour aborder le thème de la recyclabilité : de la cellule au panneau solaire. Volontairement je ne mets que très peu de chiffres et laisse la place plutôt à des grandes lignes et des visuels, pour appréhender une réflexion et des actions qui se poursuivent à l’échelle mondiale.
Adoption planétaire
Au cours des vingt dernières années, les panneaux solaires sont passés d’une technologie marginale à un véritable engouement planétaire et très médiatisé. Les premiers panneaux photovoltaïques, jusqu’à la fin des années 1990, furent dédiés à l’électrification de sites isolés (off-grids). Grâce à la politique nationale de certains pays (Allemagne, Japon, Etats-Unis), cette source d’énergie est désormais majoritairement employée pour l’équipement de sites raccordés au réseau (grid connected). A partir de là, la capacité et la production mondiale d’électricité photovoltaïque n’ont cessé de prendre de l’ampleur. La baisse du coût de l’énergie solaire PV a rendu cette énergie renouvelable accessible à plus de personnes que jamais auparavant, et a entraîné une augmentation exponentielle de son adoption. C’est aussi « très tendance ». Pour preuve, les dernières annonces du serial-entrepreneur Elon Musk. Le patron de la firme Tesla s’adresse à l’Homme moderne, qui se doit d’avoir un toit solaire, sur sa voiture modèle 3. De la même façon, Tissot propose la première montre connectée « Swiss made », pour laquelle le Centre Suisse d’Electronique et de Microtechnique (CSEM) a développé un cadran photovoltaïque unique.
Les déchets de notre prospérité
Un déchet – c’est avant tout un bien, que son propriétaire destine à l’abandon. Dans notre Monde développé, tout a été fait pour faire disparaître les déchets. Nous avons la fâcheuse tendance à ne pas vouloir connaître la vérité, car peut-être trop insupportable. La différence notable est qu’au XXIe siècle, l’état des connaissances sur les déchets a grandement évolué. A commencer par savoir les nommer et les distinguer. Il en existe pléthore : déchets ménagers, hospitaliers, textiles, nucléaires, électroniques, … Il est désormais de mise que la vie entière d’un produit industriel se résume ainsi : extraction et collecte de matières dans l’environnement, transformation, fin programmée sous forme de déchet. Au pire, ce dernier est soit dispersé de façon incontrôlée dans notre environnement, soit utilisé comme du remblai. Il peut être mélangé à d’autres déchets. Par la suite, il est soit regroupé dans des stations d’enfouissement et des décharges, soit incinéré. Enfin au mieux, et de façon marginale … il est recyclé ! A ne pas confondre avec réemploi. On nomme « recyclables » les matériaux dont on assume la collecte vers l’envoi de filières de reprises adaptées et qui sont valorisées soit énergétiquement (waste-to-energy), soit au niveau de ses matières. Dans le premier cas, on utilise les déchets comme combustibles. Dans le deuxième cas, on utilise les déchets en substitut à des matériaux neufs, devenant ainsi « ressources », dites « matières premières secondaires ».
Le recyclage est de moins en moins un impensé de nos sociétés. Aujourd’hui, grâce aux nouvelles avancées de l’industrie, nous pouvons considérer que presque tout est recyclable. Réutiliser de manière rentable le déchet, c’est le faire rentrer dans un nouveau paradigme. Généralement considéré comme un problème, il détient désormais de la valeur (retrouvée) et grandissante. On parle alors de waste-to-value. Une nouvelle page s’écrit dans l’histoire des déchets.
Déchets PV
La filière PV génère des déchets solides que l’on ne peut ignorer et qui sont créés par le déclassement des panneaux solaires en fin de vie. Bien que très robustes, comme tout objet électronique, les panneaux solaires ont une durée de vie limitée. On recycle des panneaux solaires photovoltaïques usagés. Généralement, ce sont des produits qui ont vieillis, et sont arrivés au terme de leur durée de vie (soit après 30 ans dans le meilleur des cas), en bout de course de leurs performances. Ce peut être par ailleurs des panneaux qui ont des défauts de fabrication ou des défaillances prématurées, ayant subi des dommages de toute nature (par exemple, bris de verre, laminé défectueux ou pannes électriques), sans réparation possible. Dans ces cas-là, le panneau solaire devient alors un déchet. Il y a donc un long délai (approximativement générationnel) entre le moment où les panneaux sont produits, et celui où ils sont mis hors service. Dans le rapport « End-of-life management: Solar Photovoltaic Panels IEA-PVPS Task 12 », 2016, préparé conjointement par l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) et le programme sur les systèmes d’alimentation photovoltaïques de l’Agence internationale de l’énergie (IEA-PVPS), voici la projection actualisée des volumes de déchets de panneaux PV jusqu’en 2050. On passerait de 1,7-8,0 millions de tonnes en cumul d’ici 2030 et à 60-78 millions de tonnes en cumul d’ici 2050.
A noter que les panneaux solaires, pour la plupart, deviennent obsolètes avant d’être à proprement dit des déchets. La question de leur réutilisation (en seconde main) est donc particulièrement importante, d’autant que pour les centrales, les panneaux sont remplacés même avant la fin de leur vie normale, pour mettre des panneaux plus récents et plus efficaces.
Valorisation (PV Waste-to-Value)
Comme le titrait le World Economic Forum en 2019 : « Les déchets électroniques constituent un problème énorme dans le monde. C’est aussi une occasion en or ! » Comme le développe également Helen Micheaux dans son ouvrage « Responsabiliser pour transformer : des déchets aux mines urbaines », aux Presses des Mines (2019), le déchet n’est plus cantonné à son caractère polluant. Il est devenu une ressource de matière pouvant contribuer à diminuer la pression sur les ressources naturelles. On est face à de nouveaux gisements ! Ainsi, on est désormais en capacité de transformer le déchet PV, en précieuses matières premières secondaires et donc en valeur (PV waste-to-value).
Dès lors que le panneau PV est usagé, qu’il n’a plus d’utilité en l’état, il peut rentrer dans un circuit de valorisation énergétique ou de matières. Il sort du statut de « déchet », et se transforme alors en « ressource ». Les options de recyclage existantes des panneaux solaires signifient qu’une fois que le système atteint enfin la fin de sa durée de vie, on peut être sûr que les panneaux ne finiront pas dans une décharge à ciel ouvert. Qui plus est, quand la volonté de circularité guide le développement des produits, et promeut le recyclage dans l’industrie solaire, le potentiel de gain est impressionnant, si l’on s’en réfère aux projections de l’IRENA. A l’horizon 2030, en fonction du prix des matériaux, la valeur des matières premières incluses dans ces déchets serait estimée à 450 millions d’euros.
Ingénierie de recyclage
L’ingénierie de recyclage recouvre le développement de technologies pour trier et séparer les différents constituants (les matériaux, les molécules ou les éléments chimiques), les raffiner/purifier afin d’éliminer un maximum les traces d’impuretés (pour éviter de dégrader les propriétés attendues) et in fine, recycler les déchets de fabrication et les modules en fin de vie. Et ces étapes peuvent être effectuées à toutes les échelles : celle du système (câbles, châssis, boitiers de jonction, …), du panneau (type, génération, …), de ses modules (cellules solaires, enveloppes externes comme l’encapsulant, …), ou encore au niveau de la poudre résultant de successifs broyages. Les premiers obstacles ont été surmontés.
Toutefois à ce jour, aucun processus de recyclage intégré ne récupère complètement toute la masse, et des matériaux de haute pureté provenant de modules photovoltaïques.
Place du recyclage dans la filière photovoltaïque
En 2009, dans son livre blanc, la Silicon Valley Toxics Coalition (SVTC) posait déjà les bases d’un solaire vert. Nous pouvions lire que l’industrie devrait réduire et, à terme, éliminer l’utilisation de matériaux toxiques et développer des pratiques écologiquement durables. La première conférence européenne sur le recyclage des modules photovoltaïques a eu lieu le 26 janvier 2010 à Berlin, en Allemagne. L’événement visait à présenter l’état des connaissances sur le recyclage des modules PV et à fournir une opportunité de discussion entre l’industrie photovoltaïque et les acteurs du recyclage. La même année, le professeur à l’Université de Columbia, Vassilis Fthenakis dans son document de référence « End-of-life management and recycling of PV modules » insistait sur l’élimination des déchets, et qu’elle serait un défi remarquablement important dans 25 à 30 ans. Autrement dit pour 2025 et 2030. On y est ! A l’image du recyclage global, celui du PV suit l’organisation mondiale de la consommation. La situation dans les pays développés n’est pas celle des pays en développement. Dans ces derniers, en l’absence de meilleur système, c’est la récupération informelle qui permet de recycler une partie des déchets. Sans attendre que la solution soit jugée parfaite, des acteurs se mobilisent partout dans le Monde. C’est certes plus efficace, quand les Etats s’impliquent à leurs côtés. En France, des structures appelées éco-organismes, ont été créées pour organiser la collecte des produits et des équipements en fin de vie. Agréé dès 2007 par l’industrie manufacturière européenne du photovoltaïque, PV Cycle est celui de référence, pour la gestion des panneaux usagés. Entièrement financée par les producteurs et importateurs de panneaux photovoltaïques en Europe, PV Cycle compte des infrastructures de collecte dans tous les États membres de l’Union européenne et les États membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE), notamment l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein. Recycle PV Solar accepte les modules solaires provenant de tous les États-Unis, récupérant plus de 90 % de la matière. Cette structure a modelé son approche du cycle de vie complet du solaire sur le succès des programmes de recyclage du PV en Europe.
Dans ces organisations-là, le recyclage arrive en bout de chaîne, à la fin de la durée d’usage, ou de vie du produit. C’est ce que l’on appelle le recyclage post-consommation, pour le distinguer du recyclage pré-consommation, qui opère lors du processus de production. Le recyclage est en pleine effervescence. Il a pour vocation de devenir la pierre angulaire d’une nouvelle industrie de transformation des déchets en ressources. En France, il se trouve à la croisée de 6 Contrats de filières. C’est l’assurance d’avoir une stratégie long terme, traduisant les engagements conjoints de l’Etat, des Régions et des acteurs professionnels.
Tendances dans les technologies PV
Avec l’évolution qui a permis le développement d’une grande diversité de cellules solaires, les panneaux PV n’ont pas tous la même technologie. Ils n’ont ni les mêmes rendements ni les mêmes possibilités de recyclage, selon qu’on a affaire à des modules de 1ière ou de 2ième génération, ceux à couches minces, ou issus des concepts émergents, de la toute dernière génération, en pleine effervescence. Désormais il faut compter avec des panneaux d’une toute autre allure, sur la base de ces cellules solaires inédites. D’ailleurs on ne va plus parler de panneaux mais de films solaires, tellement les prouesses en termes de souplesse et de poids sont spectaculaires. De 10-15 kg par m² de panneau traditionnel, on peut passer à 500 grammes. Ces modules photovoltaïques-là sont relativement expérimentaux, et englobent un ensemble diversifié de technologies : cellules à base de colorant (DSSC / DSC), cellules organiques (OPV), cellules solaires à points quantiques (QD). Majoritairement, on en est encore au stade très théorique ou sur du spécifique et des marchés de niche. Tendance déjà amorcée avec la deuxième génération de panneaux, on migre vers des films flexibles, qui nécessitent moins de matières premières. On ne dépose que la quantité de matériau efficace, quelques microns d’épaisseurs suffisent. Pour le PV Organique, les molécules peuvent être pulvérisées sur des substrats en plastique rapidement, à peu de frais et à basse température. Dans le cadre d’un VIP (Vertically Integrated Project), l’UNSW (University of New South Wales – Australie) a lancé un challenge pour aller encore plus loin dans l’allègement de matière et créer des dispositifs de collecte d’énergie solaire de taille millimétrique pour alimenter des implants médicaux et des capteurs IoT.
Cependant, malgré l’élan – même en 2030, la part de marché des panneaux à base de silicium cristallin c-Si qui sont actuellement 95% du marché, resteront l’industrie dominante. Aucune des multitudes d’autres approches ne pourra prendre le relais d’ici au moins une décennie. En 2014, les panneaux basés respectivement sur la technologie CdTe au tellurure de cadmium et CIGS au cuivre, indium, gallium et séléniure plafonnaient à 5 % et à 2 %, et ils ne vont guère croître : le CdTe par manque de Tellure, le CIGS car trop cher. Quant à ceux fabriqués à partir d’autres matériaux (pérovskites, colorants, CPV, …), autrement dit les panneaux photovoltaïques de troisième génération sont amenés à augmenter alors qu’ils représentaient 1 % en 2014. Il pourrait y avoir une partie perovskite, en premier lieu sur wafer sicilium, et quelques autres de type HIPERION par exemple (https://hiperion-project.eu/hiperion-objectives-challenges/). Dans le cadre ce dernier projet, impliquant le CSEM et le Fraunhofer ISE, avec le produit innovant THEIA appliqué à l’agrivoltaïsme, la start-up suisse Insolight franchit le plafond d’efficacité des panneaux de silicium. On passe de 36,4% de la Proof Of Concept, à 29% sur la ligne de production. Mais il faut être très clair, que le recyclage pour les dizaines d’années à venir concernera davantage les modules silicium. Christophe Ballif livre plus de détails en introduction du livre d’Arvind Shah dans “Solar Cells and Modules” (https://www.springer.com/gp/book/9783030464851). Les technologies Silicium ne cessent de progresser, c’est cela qui empêchera les autres technologies de prendre autant de parts de marché que prévu. Le rendement moyen des modules augmentent de 0.4% par an (et atteindra 22 à 23% d’ici 2030), et rien qu’en 20 ans la quantité de silicium pour faire 1W de PV est passé de 20 g à 3.5g. Entre autre le sciage par fils diamantés a permis de réduire les pertes de sciage drastiquement (les kerf losses sont de l’ordre de 60 à 70 microns aujourd’hui). Le reste des tailles de lingots est immédiatement recyclé.
Tendances dans les matériaux PV
La palette des matières s’est largement ouverte, à l’image de l’industrie électronique. Au cours des 20 dernières années, le contenu élémentaire d’un téléphone portable est passé d’une vingtaine à plus de 50 éléments différents. Si on se réfère au tableau de Mendeleïev, presque chaque élément est utilisé en PV, on expérimente à tout va. On peut avoir du zinc (Zn), du plomb (Pb), du nickel (Ni), de l’étain (Sn), du molybdène (Mo), du germanium (Ge), du sélénium (Se), du cadmium (Cd), du tellure (Te), … L’antimoine (Sb) est utilisé dans le verre pour améliorer la stabilité du la performance solaire du verre lors de l’exposition aux rayons ultraviolets (UV) et/ou la lumière du soleil. Alors que le PV actuel n’utilise pas de Terres rares, un projet de l’Agence Nationale de la Recherche – ANR-12-PRGE [2013-2015] sur des technologies émergentes de cellules à colorant a creusé cette option, avec de l’oxysulfure de lanthane et de cuivre (LaOCuS).
On reste en effet, dans une ambivalence. Les meilleurs matériaux en pérovskite contiennent du plomb toxique qui présente un danger pour l’environnement. On dépose des brevets mettant en œuvre de l’halogénure de plomb à la préparation de matériaux pérovskites actifs. De l’autre, on a une coopération internationale entre le HZB (Helmholtz-Zentrum Berlin – Allemagne) et le FUNSOM (Institut des nanomatériaux fonctionnels et des matériaux souples-Université de Soochow – Chine) qui cherche une alternative au plomb, avec des pérovskites halogénées avec de l’étain. Ils devraient présenter d’excellentes propriétés optiques, en utilisant du PEACl (chlorure de phényléthylammonium) comme additif.
C’est aussi l’arrivée de plus de complexité dans l’architecture de la cellule. Afin de maximiser la collecte des électrons au cœur de la cellule solaire, on constate des sophistications dans les empilements de couches de matériaux, et le recyclage doit suivre ! A titre d’exemple, on assiste à l’arrivée de cellules solaires à hétérojonction de silicium et de cellules solaires en tandem. Il est possible de superposer deux types de cellules (voire plus …), fonctionnant en complémentarité, car optimisées pour des domaines optiques différents, comme des cellules solaires tandem pérovskite-silicium. C’est la venue aussi de nouvelles conceptions comme les cellules solaires bifaciales et semi-transparentes, qui utilisent des matériaux transparents conducteurs (TCO – Transparent Conductive Oxides) dans leur conception. À l’avant des cellules solaires, ces couches de TCO font office d’électrode optiquement transparente qui laisse entrer les photons dans la cellule solaire et transporte les électrons photo-générés vers les bornes du dispositif externe. Il est arrivé dernièrement sur le marché des panneaux solaires hybrides dit panneaux PV/T qui combinent les fonctionnalités des panneaux photovoltaïques et de ceux thermiques. Par ailleurs, certains fabricants font des efforts pour allier design ingénieux et utilisation de moins de matières couteuses. C’est par exemple la i-Cell, sans busbar d’Argent, de S’Tile.
Tant par la disparité des modules et de leurs architectures, la variabilité de leurs constituants et la complexité chimique des mélanges à traiter, il ne manque pas d’y avoir 1001 nuances dans leur recyclage.
Tendances dans l’ingénierie du recyclage
Les parutions scientifiques sur les technologies de recyclage PV n’ont jamais été aussi nombreuses que ces trois dernières années. Des start-ups en font même leur raison d’être, comme Rosi Solar et le silicium solaire. A pas feutré, des leaders industriels exécutent des pas de géant comme Veolia. Des pionniers ont montré la voie comme First Solar. Dans son rapport « End‐of‐Life Management of Photovoltaic Panels: Trends in PV Module Recycling Technologies », 2020 (idem de 2018), l’IEA recense 178 brevets relatifs à la recyclabilité, dont la moitié ont été déposés par la Chine. Depuis le 1er brevet remontant à 1995, elle observe une montée en puissance depuis 2011, avec une activité accrue notamment du côté de la Corée et du Japon. Au-delà des défis majeurs de transition énergétique, de convictions écologiques et de santé publique, le recyclage laisse entrevoir d’autres enjeux, aussi bien économiques de production d’énergie, que géopolitiques d’accès à des ressources clefs. Pour bien recycler et mettre au point les procédés adéquats, il est nécessaire de savoir quels matériaux seront pressentis, mais pas que. Il conviendra de savoir comment le sandwich a été laminé, pour in fine, mieux le délaminer.
Initialement, les procédés ont privilégié la récupération des éléments les plus représentatifs en poids, comme le verre et l’aluminium, soit 80%. En revanche, 80% de la valeur est constituée par le reste, comme notamment le silicium, le cuivre ou l’argent. Avec les couches minces, la tendance n’a fait que s’accentuer, du fait même que chaque matériau est présent en très petite quantité. Cela a ouvert la voie au développement de solutions technologiques permettant l’accès au matériaux encombrants, toxiques, précieux, en recherchant la pureté la plus élevée possible ; et en cherchant dorénavant à traiter, jusqu’au niveau des composants élémentaires.
Aujourd’hui il est de mise de : 1/ collecter, grâce à un solide réseau logistique ; 2/ gérer dans des installations dédiées, équipées à cet effet, et basées à proximité des gisements de déchets PV, voire mobiles ; 3/ séparer les constituants, par des procédés mécaniques, des méthodes physiques (utilisant les différences de densités ou de propriétés magnétiques) et chimiques avec des collaborations avec le génie des procédés qui s’oriente vers l’élaboration de voies de synthèses « propres »; 4/ trier, raffiner et récupérer toutes les fractions possibles aussi fines soient-elles et avec un niveau de pureté le plus élevé possible, en faisant appel à de la métallurgie extractive intégrant de la pyrométallurgie et de l’hydrométallurgie. 5/ revendre le maximum de matières « exploitables », -soit des matériaux recyclés fiables, à même de pouvoir remplacer de la matière vierge-, à l’industrie solaire ou à d’autres secteurs. 6/ repartir de matériaux recyclés pour faire de nouveaux modules. Autant la recyclabilité commence à être bien maîtrisée avec les panneaux « mainstream » – silicium, autant avec la multiplicité des types de panneaux qui arrivent, les difficultés de tous ordres s’accroissent.
Les potentiels de recyclabilité sont inégaux selon que cela a été pensé ou non, dès le début de la conception de la cellule. L’approche d’EpiWafers (Epitaxial Wafer) de la société NexWafe GmbH, une société issue du Fraunhofer ISE pour commercialiser la production est particulièrement intéressante. Sans sciage abrasif (Kerfless wafer), on n’a presque pas de déchets, pour beaucoup moins de consommation d’énergie. L’objectif reste de mettre au point de nouveaux procédés pour augmenter le taux de recyclage. Une chose est sûre, les prochains processus de recyclage nécessiteront davantage de traitements chimiques (pour dissoudre par exemple), avec une tendance à aller vers de la chimie douce, à l’encontre d’une chimie agressive, pour un coût réduit comme l’Institut Carnot MICA. Certains explorent l’utilisation de fluides supercritiques ou de liquides ioniques pour récupérer les métaux précieux dans des fractions métalliques.
Technologies de recyclage des modules PV
Aujourd’hui le constat est patent. Seuls 10 éléments chimiques sur 60, d’ordinaire présents dans les déchets électroniques, sont recyclés (l’or, l’argent, le platine, le cobalt, l’étain, le cuivre, le fer, l’aluminium et le plomb), et tout le reste finit par être gaspillé dans les décharges. Les progrès du développement de nouvelles technologies pour le recyclage des déchets électroniques, ne pourra que jouer en faveur du PV. Un document fait référence. “Marina Monteiro Lunardi, Juan Pablo Alvarez-Gaitan, José I. Bilbao and Richard Corkish. « A Review of Recycling Processes for Photovoltaic Modules », Solar Panels and Photovoltaic Materials, Beddiaf Zaidi, IntechOpen” (2018)
https://www.intechopen.com/books/solar-panels-and-photovoltaic-materials/a-review-of-recycling-processes-for-photovoltaic-modules. On constate que le passage à la commercialisation de ces procédés de recyclage est lent, et qu’aucun n’est parfait. Il est listé plus précisément tous les inconvénients que ce soient des émissions polluantes lors des traitements, le contrôle compliqué des réactions chimiques, le fait que certains matériaux se perdent dans les scories, ou le verre qui reste partiellement combiné avec la matière plastique EVA (Ethylene-vinyl acetate). D’ailleurs, 45% des brevets portent sur la séparation des composants du module par l’élimination de cet encapsulant polymère. Alors beaucoup d’espoir sont fondés sur les recherches actuelles. Le livre d’Alexandre Chagnes du laboratoire GeoRessources de l’Université de Lorraine résume bien les défis techniques liés aux procédés de séparation physique, les procédés pyrométallurgiques et hydrométallurgiques, pour concevoir des procédés de recyclage efficaces et durables – “Recycling of Waste Electrical and Electronic Equipment: Research, Development and Policies”, Elsevier, (2016).
Ci-après quelques travaux de recherche tout récents de par le Monde qui méritent toute notre attention : étude sur la lixiviation inactive Hydrométallurgie et bio-hydrométallurgie à SDU (Süleyman Demirel University) en Turquie, autour du charismatique Ata Akcil, group leader du MMR&R (Mineral-Metal Recovery and Recycling) – http://www.ataakcil.com/. Nouveau procédé en deux étapes permettant d’éliminer les polymères par l’Université de Naples. “Valeria Fiandra and al; Silicon photovoltaic modules at end-of-life: Removal of polymeric layers and separation of materials, Waste Management 87” (2019) 97–107. On peut citer les travaux proposés par l’Université de technologie de Chalmers (Suède) visent à développer des technologies et un savoir-faire en matière de recyclage de l’argent (et de l’indium) à partir de cellules solaires usagées https://www.chalmers.se/en/projects/Pages/Crucial-metal-recycling-from-waste-solar-cells-and-reuse-in.aspx. 1ers résultats publiés dans : Tao M, Fthenakis V, Ebin B, et al. « Major challenges and opportunities in silicon solar module recycling », Prog Photovolt Res Appl. 2020;28:1077–1088, ou de la Technical University of Košice en Slovénie avec des japonais et des italiens, Francesca Pagnanelli and Al. « Physical and chemical treatment of end of life panels: An integrated automatic approach viable for different photovoltaic technologies », Waste Management 59 (2017) 422–431. De la même façon l’Ines ou le Fraunhofer CSP, sont très actifs dans la récupération des fractions les plus petites, voire des poussières emprisonnées dans les filtres après broyage, lors du processus de recyclage, https://www.csp.fraunhofer.de/en/areas-of-research/-pv-recycling.html#tabpanel-1.
Des consortiums à dimension européenne et/ou internationale se forment pour surmonter les verrous technologiques, aussi bien pour l’élaboration de modules à partir de matière premières vierges, avec aussi la préoccupation de partir de matières recyclées. Le projet CABRISS (https://www.spire2030.eu/cabriss) formule et teste de nouvelles encres et pâtes conductrices, en utilisant de l’argent recyclé. La validation est encore nécessaire pour passer à la phase d’industrialisation. Il s’agira de stabiliser le processus de formulation des encres et des pâtes, afin d’aboutir à des produits stables et reproductibles. Afin d’éviter des émissions de fluor, ce projet favorise la mise au point de procédés non thermiques et non chimiques, à base d’eau et de lumière. La vision principale du projet CABRISS [2015-2018] est de développer une économie circulaire principalement pour l’industrie photovoltaïque, mais aussi pour l’industrie électronique et du verre. Le projet européen ReSiELP [2017-2020] rassemble des technologies innovantes de différents domaines pour récupérer et purifier des matières premières critiques et précieuses (Si, Ag). On s’attelle aussi à la réalisation d’une usine TRL 7 (Technology readiness level) sans déchets, pour le recyclage des panneaux solaires PV. Quant au projet européen SUPERPV [2018-2021] il fera entre autre la démonstration d’un outil de recyclage en laboratoire pour tous les types de modules considérés (c-Si et CIGS) afin d’évaluer les possibilités de recycler et de réutiliser les matériaux du module.
Depuis maintenant quelques années que ce soient les symposiums, le Virtual Perovskite Conference animé par Michaël Saliba (ViPerCon) professeur et directeur de l’IPV, le SER-Colloque national Photovoltaïque, les feuilles de routes de l’IPVF (Institut Photovoltaïque d’île de France), et pour bien d’autres encore, certes les performances techniques et économiques sont mises en avant, mais en intégrant les prérogatives de recyclage.
De la Recherche à l’Industrie : quelques cas d’étude de recyclage
Procédé d’extraction – La chimie et plus précisément la chimie séparative, est incontournable dans le développement de la plupart des solutions technologiques de demain. Le laboratoire conjoint NTU (Nanyang Technological University of Singapore)-CEA (Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives) dans le cadre du projet SCARCE (Singapore CEA Alliance for Research in Circular Economy) développe des technologies de recyclage, et notamment un procédé d’extraction liquide-liquide innovant. Cette opération de base de l’hydrométallurgie, reste essentielle pour le recyclage de métaux ou la décontamination de solvants. Les équipes de l’alliance viennent de réussir de miniaturiser et d’intégrer dans un seul et même dispositif microfluidique automatisé, tout l’équipement nécessaire pour une étude de procédé. Aujourd’hui validé à très petite échelle, le procédé est en cours de maturation, pour en faire un outil industriel, à même de prendre en charge des laminés PV multi-matériaux, pouvant également contenir des Terres rares. Propos recueillis de Jean-Christophe P Gabriel co-directeur du laboratoire SCARCE.
Silicium solaire recyclé – Majoritairement aujourd’hui, la production de panneaux solaires fonctionne en boucle ouverte, dit OLMS (Open-Loop-Material-System). Plus de 40% du silicium solaire purifié à grands frais est perdu pour passer des lingots aux cellules, puis le reste est sacrifié dans les panneaux en fin de vie. C’est ce qui a motivé la création de Rosi Solar, qui en valorisant le silicium de haute qualité contenu dans le Si-kerf, issu des déchets de fabrication (déperditions liées à la découpe du silicium), contribue à l’économie circulaire de la filière PV, dit CLMC (Closed-Loop Material Cycle). Avec le concours du laboratoire grenoblois SIMaP (Science et Ingénierie des Matériaux et Procédés), la start-up (vainqueur du BIC/EIT Raw Materials 2017), a développé un procédé combinant deux technologies. Propos recueillis de Daniel Bajolet, Directeur Général de Rosi Solar.
Backsheet recyclable – Dans la technologie PV c-Si, le fluorure d’hydrogène (HF) est utilisé pour produire la couche arrière, appelée polyvinyle le fluorure (PVF). Sachant que 1 GW installé, c’est 2 500 tonnes de backsheet ; avec près de 521 GW en 2018, on dépassera les 1 million de tonnes susceptibles d’être recyclées. Partant du cycle de vie complet du produit, Coveme privilégie le process de recyclage de pyrolyse d’un PET 100% eco-friendly, sans fluor à base de polyéthylène téréphtalate, sans dégagement d’halogénure à des backsheet usuelles contenant du fluor toxique (PET/fluoropolymère). A travers sa collaboration avec l’Institut Fraunhofer UMSICHT, l’analyse du cycle de vie (ACV) est venu en appui, de l’utilisation de matériaux respectueux et recyclables. Avec sa solution COOLBACK ® backsheet – frame intégrée au design empilable, l’entreprise italienne du même nom, se veut une entreprise verte. Elle a une vision de durabilité mondiale et s’efforce de fonctionner et de produire de la manière la plus écologique possible. https://www.coolback.com/. Propos recueillis de Luigi Marras, CTO COOLBACK Company (ex Coveme).
Outil industriel – Sans attendre, il y a plus de 20 ans, l’industriel américain First Solar, s’est mobilisé sur le processus de recyclage de ses modules CdTe. Il peut afficher aujourd’hui des installations de recyclage ultramodernes, opérationnelles aux États-Unis, en Allemagne et en Malaisie, avec des processus de recyclage éprouvés, et une capacité modulable permettant de traiter un volume important de recyclage, à mesure que les modules arrivent en fin de vie. First Solar a été pionnière dans l’anticipation de la criticité de son matériau phare, le Tellure, qui contrairement au Cadmium par exemple est peu abondant. Selon le United States Geologic Survey, la réserve mondiale de Tellure est de 47 000 tonnes. Si tout cela était utilisé pour fabriquer des cellules solaires, on pourrait produire 0,68 TW pendant les périodes de pointe, soit environ 0,14 TW en moyenne sur la journée. Les besoins sont supérieurs à 5 TW. Propos recueillis de Andreas Wade, Global Sustainability Director pour First Solar.
Innovations et enjeux croisés ressources <=> déchets
Produire de l’électricité grâce au photovoltaïque n’émet aucune pollution, ne produit aucun gaz à effet de serre, et n’utilise aucune ressource limitée de combustible fossile. Mais ce qui pèsent dans le bilan, concernent d’autres étapes, et ce quelle que soit la technologie retenue. L’impact environnemental des modules est généralement évalué à l’aide de l’analyse du cycle de vie (ACV).
Angélique Léonard, professeur à l’Université de Liège, dirige une équipe d’analyse du cycle de vie, avec plus de 10 ans d’expertise. Elle alertait dès 2014 sur le fait que l’indicateur dominant, l’EPBT (Energy Payback Time) ainsi calculé, était biaisé. L’ACV devrait systématiquement comprendre : les étapes d’extraction et de purification des matières premières PV, l’exploitation et la maintenance des systèmes PV, et celles de son retrait du marché, lors de la fin de vie du produit : les étapes de démantèlement, de logistique et du recyclage des composants du système PV. Partant de ce postulat désormais admis, des études arrivent à pointer que la majorité des impacts du processus de recyclage sont liés au transport des déchets photovoltaïques vers le site, aux processus d’incinération des plastiques et aux traitements ultérieurs (y compris le tamisage, la lixiviation acide, l’électrolyse et la neutralisation) pour la récupération des métaux (y compris l’argent) et des cendres résiduelles. Ainsi, quand des déchets PV du Panama et du Sénégal sont embarqués dans des containers jusqu’au port d’Anvers, même si un centre de recyclage se trouve à proximité, le bilan carbone n’est pas optimal. Il convient de souligner que grâce à l’amélioration de la technicité des outils, cela permet d’argumenter en faveur d’une meilleure implantation géographique des centres de recyclage, soit au plus près des gisements. Pour montrer l’exemple, PV Cycle réfléchit à une mission consistant à aller récupérer près de 10 000 panneaux en Guyane … en pirogues. PV Magazine se fait le relai régulièrement de ce genre d’initiatives et d’alertes.
Avec une compréhension plus fine des paramètres du système, on joue en faveur de l’adoption du recyclage. Avec son outil à la pointe « Evaluation Carbone Simplifiée » CERTISOLIS, avec l’appui de l’ADEME, est capable d’investiguer, depuis la conception du wafer jusqu’à la centrale, pour vérifier le bilan carbone induit dans la chaîne PV.
Le projet GENERATE (Géopolitique des énergies renouvelables et analyse prospective de la transition énergétique), mené en partenariat avec l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (IFPEN) et financé par l’Agence nationale de la Recherche (ANR) est très éclairant.
Son objectif est d’analyser les conséquences économiques, géopolitiques et technologiques d’une diffusion des énergies renouvelables (ENR) au niveau mondial. Les travaux se focalisent sur trois enjeux majeurs pour traiter cette question à savoir la criticité des matériaux intégrant les technologies de la transition énergétique ; la nouvelle géographie de la propriété intellectuelle des ENR et les interrogations relatives au modèle de développement des pays producteurs d’hydrocarbures dans ce nouveau contexte mondial. Régulièrement Emmanuel Hache, ingénieur de recherche et chef de projet, économiste et prospectiviste à l’IFPEN, communique les résultats d’études publiées dans les médias. Il est élaboré notamment l’ensemble des chaînes de valeur de différents matériaux (cobalt, cuivre, lithium, nickel et terres rares) dans le modèle TIAM-IFPEN (TIMES Integrated Assessment Model) pour évaluer, à l’horizon 2050, leurs demandes sous différents scénarios (2°C et 4°C) en incluant des hypothèses sur différents types de mobilité (soutenable et business as usual) et sur le recyclage. Autre éclairage intéressant d’Ata Akcil, sa dernière publication dans NATURE “COVID-19 disruptions to tech-metals supply are a wake-up call” : https://media.nature.com/original/magazine-assets/d41586-020-03190-8/d41586-020-03190-8.pdf.
Les évolutions du contexte de l’activité du secteur PV et de façon plus large dans l’énergie, impose un changement du modèle économique des entreprises. Traversées par un nouveau mantra, celui de la sobriété énergétique, elles doivent orienter leur stratégie, vers la réduction de leurs déchets, et dans la création de valeur par le recyclage, et le réemploi des matières.
Conclusion
Quand on pense recyclabilité, chaque technologie PV a des atouts et des faiblesses dans le choix et la mise en oeuvre de ses matériaux constituants. On le voit bien le recyclage de la 3ième génération PV ne s’avère d’ores et déjà pas aussi trivial que cela en a l’air. Penser recyclabilité dès le démarrage de tout projet au même titre que la performance est incontournable. S’intéresser à la vie future du matériau devient incontournable, dès lors que l’on conçoit des modules PV. Il s’agira de bien peser les tenants et les aboutissants, entre la disponibilité du matériau, sa capacité de réutilisation, ses associations incompatibles au sein d’un même sandwich.
Qu’on le veuille ou non, le XXIe siècle est également celui de l’épuisement. A commencer par les ressources de notre planète Terre qui s’amenuisent inexorablement, faute d’une gestion raisonnée. Un tel phénomène ne manquera pas d’affecter le processus de transition énergétique, et de rendre les pratiques du recyclage incontournables. Pour assurer sa pérennité, et couper court par là-même aux critiques, la filière photovoltaïque ne cesse de s’organiser pour collecter, et valoriser au mieux ses déchets. Sur la base d’un nouveau business model d’économie circulaire, les parties prenantes se mobilisent autour de la récupération des panneaux usagés et de leurs matériaux constituants. Avec l’appui d’une solide logistique, l’industrie PV bénéficie de processus de recyclage de premier plan. Mieux que finir en décharge ou en combustible, les matières premières secondaires sont réinjectées dans diverses filières, et deviennent par là-même des ressources. Il serait alors dommage d’accuser la filière PV de « greenwashing », au risque de discréditer tous les efforts faits depuis près de 20 ans.
Année après année, l’industrie gagne en efficacité de manière spectaculaire. Cela sera justement un des challenges de l’industrie du recyclage. Moins on met d’Argent, de Cuivre dans les modules, moins les modules sont attractifs pour le recyclage !
Le recyclage ne doit pas décevoir, car il vient soulager l’humanité de la destruction de l’environnement de notre Planète. Une autre réalité se dessine, complémentaire ou pas, pour atténuer la crise environnementale actuelle. De nouvelles mines dans l’espace pourraient fournir presque tous les métaux ou éléments dont nous pourrions avoir besoin, voire être à la source d’éléments rares. La ceinture d’astéroïdes regorge de métaux, du fer, du cobalt, du nickel, de l’or, du platine, de l’iridium, …. Sur la base de technologies minières spatiales avancées, pourrait se construire les bases d’une nouvelle industrie florissante. On peut citer des acteurs privés comme la société privée britannique Asteroid Mining Corporation ou Planetary Resources. Chacune prévoit de commencer des opérations minières dans l’espace d’ici 2030. Il s’agira alors de ne pas retomber dans une certaine forme d’opulence qui nous fera oublier une forme de sobriété durement acquise.
Malgré tout, une conscience environnementale émerge et monte inexorablement. La population commence à prendre acte des effets néfastes de nos sociétés consuméristes sur l’environnement et la santé. La multiplication des déchèteries et l’incitation aux changements de comportements pluriels (des citoyens, des scientifiques, des industriels, des politiques …) permettront alors une prise en charge de plus en plus fine du déchet – et ce, pour être davantage en phase avec les défis de notre époque. Mais le combat (déjà de tout à chacun) ne fait que commencer.
En y associant très tôt des politiques contraignantes, en faisant appel à une autre filière, celle des recycleurs, en nouant des alliances de Recherche et Développement par-delà les frontières, le solaire photovoltaïque a de quoi tenir les promesses d’un Monde meilleur. La vue d’ensemble des possibilités de recyclage et du devenir des matériaux photovoltaïques donnent à voir le chemin parcouru, et laissent une large place à des améliorations possibles. En faisant de la recyclabilité une préoccupation majeure, et en essaimant les bonnes pratiques à plus grande échelle, l’industrie PV profitera d’évolutions technologiques et d’innovations enthousiasmantes, et ce au crédit d’une énergie toujours plus verte.
Cet article est extrait d’un rapport plus détaillé et technique réalisé dans le cadre de mon Executive Master à l’Ecole Polytechnique de Paris (2019-2020). Autour de cet état de l’art, j’ai pu fédérer une communauté très large autour de la recyclabilité dans la filière photovoltaïque et cela m’a amené à voyager (par visioconférence) de Singapour aux USA, de la Turquie à l’Italie, du Royaune-Uni à Israël, en m’attardant sur la France et la Suisse. Passionnant !
Moodboard : réalisé grâce à mon partenaire du blog, le graphiste et illustrateur Gilles Esparbet (Gilles Esparbet : Portfolio (ultra-book.com))
@Shutterstock pour le cuivre, @PIXABAY-neta623 pour la mine de cuivre en Suède, @PEXEL pour la décharge à ciel ouvert, @PV-CYCLE-VEOLIA pour les mains d’une opératrice dans l’usine VEOLIA de recyclage PV en France, à Aix-en-Provence, @PV-CYCLE avec le revêtement de panneaux photovoltaïques couvert de craquelures, marques de son usure et de la baisse de productivité, @Mind pour le morceau de silicium, @Blog “Curiosités Technologiques” – Gilles Esparbet et @DARGATECH- SARL, photo transmise par Arouna DARGA, qui enseigne l’électronique embarquée et la conversion d’énergie à l’école d’ingénieurs Polytech-Sorbonne – référence à des étudiants en Master Energie Renouvelable de l’Université Gaston Berger, Saint Louis du Sénégal. Photos prises lors de l’Atelier solaire organisé par la commission Physique Sans Frontières de la société française de physique avec l’appui de l’Agence Universitaire de la Francophonie.
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