Merci Monsieur Maurer!

Monsieur le Président de la Confédération,

Vos interventions dans la presse du dimanche 29 septembre m’enlèvent un poids considérable et j’aimerais vous en remercier. Je croyais que 2014 serait une année particulièrement difficile, où il faudrait se battre dos au mur contre le nationalisme dominant pour sauver la Suisse de ses propres fantasmes. Déjà, je me sentais accablé par ce sempiternel combat contre l’isolement et la fermeture des frontières qui incomberait une fois de plus aux citoyens raisonnables.

Heureusement, vous êtes intervenus et vous m’avez délivré de mes tourments. Au vu de vos analyses, je pourrai voter oui à l’initiative de votre parti contre l’immigration et ne plus me faire le moindre souci pour mon pays.

En substance, vous avez affirmé que la Suisse n’était pas intégrable dans l’Union européenne et qu’elle ne pourrait pas supporter à terme une immigration telle que nous l’avons vécue ces dernières années.

J’en ai déduis que vous préconisiez de renoncer à la libre circulation des personnes. Dans un premier temps, j’ai donc attendu que vos collègues du Conseil fédéral, des chefs de partis, les responsables de l’économie, voire des ministres cantonaux infirment vos propos. Mais comme nul n’a critiqué vos allégations, je me suis vu contraint d’admettre que les votations de 2014 n’avaient aucune importance pour les leaders de mon pays et que je pouvais aussi m’en moquer.

Naturellement, reste une dernière hypothèse. Il se pourrait que nous vivions dans une démocratie où un Président de la Confédération est autorisé à tenir des propos contraires aux orientations du gouvernement, dangereux pour l’économie, nuisibles pour l’intérêt général, sans que cela ne dérange personne. Mais alors le système suisse serait une maison de fous? Et quelqu’un me l’aurait dit?

 

PS. «L’armée ou l’obligation de sourire», tel était le titre de mon précédent post. Vu l’exercice armé scandaleux où des brigades romandes ont dû se défendre contre une invasion de la France, je préfère parler aujourd’hui de «l’armée ou l’envie de pleurer».

François Cherix

Spécialisé dans la communication politique, François Cherix travaille depuis des années sur la réforme du modèle suisse, l'organisation de l'espace romand, la question européenne, les liens entre politique et médias. Essayiste, il a publié plusieurs ouvrages et de nombreuses analyses. Socialiste, il a été membre de l'Assemblée constituante vaudoise et député au Grand conseil. Aujourd'hui, il est co-président du Nouveau mouvement européen suisse (Nomes).