La Suisse et les nazis, 17 ans après la Commission Bergier

La Suisse et la Shoah, un sujet brûlant il y a quelques années, lorsque les résultats de la Commission Bergier, mandatée en 1996 par le Conseil fédéral pour faire la lumière sur cette question, avaient été publiés. On se souvient de la polémique qui fut alors engagée et des livres qui avaient ensuite été écrits dans le sillage du Rapport Bergier, tel Le contre Rapport Bergier: anatomie d’une falsification de l’histoire (2000) dont l’auteur préféra rester discret, Pour en finir avec le Rapport Bergier de Frank Bridel (2009), La Suisse face aux nazis de Stephen Halbrook (2011) ou Les Justes Suisses, Des actes de courage méconnus au temps de la Shoah de François Wisard (2008).

Le temps a passé, les recherches se sont poursuivies, et vingt-deux ans après la mise en place de la Commission Bergier, un nouveau constat va être réalisé, mettant en perspective les conclusions de plusieurs historiens, et non des moindres ! La thématique est viscérale, elle engage la Suisse. Aussi n’est-ce que les spécialistes les plus pointus et les « archontes » de l’histoire helvétique qui s’exprimeront lors du colloque La Suisse face au génocide. Nouvelles recherches et perspectives qui se tiendra le 4 février prochain[1]. Thomas Maissen, le directeur suisse en charge de l’Institut historique allemand à Paris, Jakob Tanner, professeur émérite de l’université de Zurich, Mauro Cerutti, professeur émérite de l’université de Genève, Daniel Palmieri, chargé de recherches historiques au CICR, Serge Klarsfeld, Marc Perrenoud, Georg Kreis, Christian Rossé ou Ruth Fivaz-Silbermann sont de ceux-là.

Un panel d’historiens, suisses pour la plupart, qui feront le voyage à Paris puisque c’est le Mémorial de la Shoah qui est l’instigatrice de ce colloque. À n’en pas douter, la thèse de doctorat de Ruth Fivaz-Silbermann La fuite en Suisse. Migrations, stratégies, fuite, accueil, refoulement et destin des réfugiés juifs de France durant la Seconde Guerre mondiale soutenue en 2017, largement médiatisée ces derniers mois, ne doit pas être la dernière des raisons pour avoir décidé les organisateurs de ce cycle de conférences. Mais c’est surtout la présidence de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA)[2] que la Suisse a endossée l’année passée qui a porté ce projet. Une présidence qui n’a guère été relayée dans les medias, sollicitée par notre pays, et que certains, comme Hans Ulrich Jost, considèrent comme une démarche “visant surtout à améliorer l’image de la Suisse à l’étranger”[3]. Une remarque sévère si l’on considère non seulement le peu de médiatisation faite autour de cette présidence mais encore la conférence sur l’holocauste proposée à Berne en octobre 2017, organisée conjointement par l’IHRA, le DFAE et la Haute École Pédagogique bernoise, et maintenant ce colloque programmé dans quelques jours.

Peut-être faudrait-il organiser un tel événement en Suisse également qui est la principale intéressée ? Quoi qu’il en soit, on ne peut qu’espérer que des actes seront publiés pour ceux qui ne pourront pas assister à ces conférences à moins que quelques journalistes ne soient du voyage et proposent des comptes rendus étoffés de cette journée.

[1] www.memorialdelashoah.org/evenements-expositions/colloques/colloques-colloque/suisse-face-genocide-nouvelles-recherches-perspectives.html

[2] www.holocaustremembrance.com/commemorate

[3] https://www.lematin.ch/suisse/suisse-veut-souvenir-shoah/story/11993066

Christophe Vuilleumier

Christophe Vuilleumier est un historien suisse, actif dans le domaine éditorial, et membre de plusieurs comités de sociétés savantes, notamment de la Société suisse d'histoire. On lui doit plusieurs contributions sur l’histoire helvétique du XVIIème siècle et du XXème siècle, dont certaines sont devenues des références.

4 réponses à “La Suisse et les nazis, 17 ans après la Commission Bergier

  1. Selon l’opinion des membres juifs de Neturei Karta, organisation de Juifs ultra orthodoxes et opposés à l’existence de l’Etat d’Israel ( Oui, ça existe…), l’Holocauste a en fait été une excellente affaire pour les milieux sionistes, tant sur le plan politique que sur le plan financier. La fondation de l’Etat d’Israel en 1948 a été grandement facilitée.
    Et en fait, ce ne sont pas seulement 5-6 millions de Juifs qui ont été assassinés dans ces camps abominables, mais bien 10 à 11 millions de personnes, résistants, Tziganes, ou autres. Mais ces malheureux, ne présentant aucun intérêt politique ou financiers, peuvent reposer en paix…

  2. Bonjour,
    Je m’adresse a Mr Christophe Vuilleumier pour le demander un résumé de ce qu’on a conclu à Paris (sìl y en a..)sur la Suisse et les Nazis 17 ans après la Commission Bergier

    Merci d’avance

  3. Ce blog est très intéressant à plusieurs égards. Cependant et en dépit des souhaits y exprimés, aucun article au sujet du panel à Paris n’a paru dans la presse suisse (à ma connaissance). Existe-t-il un résumé des présentations de ce colloque?

  4. Nous sommes le 21 mai 2018. Aucune nouvelle de ce colloque à Paris, ni dans ces colonnes, ni dans Le Temps, ni dans un autre organe de presse suisse d’impotance. Où est-ce que nous pouvons trouver des réponses à ces questions qui sont toujours d’actualité?

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