La question lancinante de l’UDC

Que n’a-t-on dit sur Adolf Ogi, Conseiller fédéral en 1987, ou Samuel Schmid, élu au sein des saints en 2000. Mollesse et bonhomie !

Et pourtant, le premier allait réussir le moratoire du nucléaire autant que le défi des poids lourds dans les régions alpines ou la rénovation de l’armée et son investissement en faveur de la paix avec la mise sur pied des bérets jaunes en Bosnie-Herzégovine et de la Swisscoy au Kosovo. Et si l’affaire de l’absinthe du président Mitterand allait faire sourire, le conseiller fédéral allait toutefois lier des relations de confiance durables avec la France.

Samuel Schmid, quant à lui, allait continuer la politique de son prédécesseur à l’égard d’Armée XXI et venir se mêler sur le terrain aux douaniers, aux militaires, aux infirmières. Il devait surtout prononcer un discours à Tunis sur la liberté d’expression en 2005, discours censuré par les services publics tunisiens.

Guy Parmelin…, pas de quoi se pâmer selon la plupart ! UDC agrarien, certes, Romand… et alors ? Les équilibres intercantonaux seront-ils véritablement modifiés ? Laissons au bonhomme sa chance avant de le juger car c’est finalement au pied du mur que l’on voit le maçon.

Et le mur risque d’être abrupte, ce pour l’ensemble de nos sages. Les défis auxquels la Suisse a à faire face semblent herculéens : l’économie avec le franc fort, les relations du pays avec une Europe déstabilisée et en proie à une crise aux facettes multiples dont les poussées nationalistes sont une résultante inquiétante, les transports toujours plus congestionnés. La liste de ces défis est longue et le chemin du Conseil fédéral sera certainement chaotique à plusieurs égards. Alors que le Front National étend son ombre en France, que des mannequins sinistres représentant des Juifs brûlent sur des places polonaises rappelant les pires démons, que le flux des réfugiés est devenu une banalité, que la guerre fait rage au Proche-Orient, et que les États-Unis assistent à l’étrange pantomime d’un milliardaire fasciste faisant campagne pour la Maison blanche, l’élection de notre Conseil fédéral paraît bien paisible. Et pourtant ?

Au-delà de la personne Parmelin, c’est bien la question lancinante de l’UDC qui se pose. Le débat eut été sans doute moins tendu si le candidat victorieux avait appartenu à un autre parti, si l’assemblée fédérale s’était prononcée sans instruction, en respect de la Constitution fédérale. Car si la démocratie impose de suivre les choix du corps constitué, elle implique également que l’on suive ses principes.

Quels seront les rapports de Guy Parmelin, mais aussi d’Ueli Maurer, avec la branche zurichoise du parti, la plus âpre, la moins tolérante ? Et quelle sera la portée de l’influence des gouvernants d’extrême-droite d’Europe sur nos ministres ? 

Christophe Vuilleumier

Christophe Vuilleumier est un historien suisse, actif dans le domaine éditorial, et membre de plusieurs comités de sociétés savantes, notamment de la Société suisse d'histoire. On lui doit plusieurs contributions sur l’histoire helvétique du XVIIème siècle et du XXème siècle, dont certaines sont devenues des références.