Epargnez-nous les « cadeaux selfie » !

Ne cherchez pas de définition pour l’expression « cadeau selfie » : je l’ai bricolée pour désigner les présents incompréhensibles que nous offrent des personnes si tournées sur elles-mêmes qu’elles semblent s’auto-sourire, ravies. Tout comme pour les selfies.

Selon mes observations, il y aurait deux catégories de « cadeaux selfies »:

  • Ceux dont la principale fonction consiste à alimenter l’image de celui ou celle qui les offre (alors qu’ils ont été choisis avant tout pour leur prix imbattable au dernier Black Friday), sans une pensée pour le destinataire.
  • Ceux que l’on reçoit, n’aime pas, et s’empresse de recycler plus loin, toujours sans penser au destinataire.

Dans les deux cas, le « cadeau selfie » se caractérise par le fait que:

  • sa valeur (pécuniaire), sa marque (prestigieuse) ou sa taille (importante) ne l’empêchent pas de « sonner faux » tant il est mal à propos et/ou disproportionné;
  • quel que soit l’angle sous lequel on l’examine, on se demande pourquoi diable on nous l’a offert;
  • après la perplexité initiale vient le cas de conscience : comment le refuser, et qu’en faire?

Voici un palmarès de « cadeaux selfies »:

  • Catégorie « deluxe »: une personne offre une paire de magnifiques mocassins à un membre de sa famille, sachant pertinemment que ce dernier n’en porte jamais. De plus, ils ne sont pas à la bonne pointure ce qui n’empêche pas le généreux de s’auto-congratuler : «Regardez la marque ! Et c’était une dernière paire en plus : une véritable aubaine ! ». Penaud, le destinataire bredouille des remerciements. Après quelques jours, il se décide à rendre le cadeau au généreux qui, par un heureux hasard, a la pointure idoine…
    Ravi, le généreux récidive l’année suivante, cette fois avec une doudoune trop petite, ne pouvant être échangée, qui a rejoint les mocassins…
  • Catégorie « sans chichis »: l’année d’après, le récidiviste a tout misé sur la transparence. Son cadeau (un objet électronique) était dans la boîte d’origine mal refermée, les différents éléments grossièrement rangés à l’intérieur. Même le papier cadeau déchiré était de la partie. Face aux yeux ronds de la destinataire, le généreux a souri ravi, reconnaissant l’avoir reçu mais n’en ayant absolument aucun usage.
  • Catégorie « ni vu ni connu »: l’année suivante, le multirécidiviste a offert un panier garni, de ceux que l’on reçoit dans un contexte professionnel. Avec ses pâtes multicolores et sa sauce au pesto alignés dans un lit de paille, le panier semblait un peu trop grand. Et pour cause : le cadeau était non seulement recyclé, mais la bouteille, élément central de toute corbeille qui se respecte, avait pris la poudre d’escampette. Le panier dégarni lui a été promptement restitué … pour rejoindre la bouteille (et les mocassins et la doudoune).
  • Hors catégorie: et puis il y a ces cadeaux indéchiffrables, comme celui qui m’a été offert une fois: une énigmatique composition faite d’un saucisson, un bougeoir et un paquet de mouchoirs en papier…  M’efforçant de ne surtout pas chercher à comprendre, j’ai mangé le premier, donné le second à une brocante caritative et rangé les mouchoirs dans mon sac.

Je peux me tromper, mais les « cadeaux selfie » sont cette patate chaude qui nous met tous ex æquo face à l’empressement de nous en défaire. C’est la manière dont nous choisissons de procéder qui fait la différence.

Photo: Pixabay Creative Commons Zazu70

Le prénom est-il une marque?

Les célébrités semblent refuser d’appeler leurs enfants Pierre, Paul ou Jacques. Comme si, malgré leur notoriété, elles craignaient que leurs enfants ne passent inaperçus ou se noient dans la masse. Comme inspirées par un GPS, elles choisissent des prénoms tels que: Paris (Jackson), North (West), Brooklyn (Beckham), Dakota (Johnson)… Quand elles ne créent pas des prénoms comme sortis d’un Scrabble, elles baptisent leurs enfants au moyen de mots (Ivy Blue, Mercy, Saint).

Anne Laure Sellier, professeur à HEC Paris et chercheuse en psychologie sociale, explique dans « Le pouvoir des prénoms » qu’en tant que première étiquette sociale, notre prénom façonne la manière dont nous sommes perçus par les autres. Comme une marque, Jean-Eudes, Marcello, Huguette ou Loana ont le pouvoir d’évoquer des univers, générations, élocutions, stéréotypes. Ainsi aidés ou entravés par un prénom que nous…portons, à nous ensuite d’exercer notre libre arbitre.

Si autrefois les prénoms se transmettaient, ils sont aujourd’hui la prérogative des parents qui souvent gardent le secret avant de le dévoiler. Cette annonce déclarative s’apparenterait presque au lancement d’un produit, l’étude de marché en moins. Annoncer un prénom tarabiscoté pour découvrir qu’il a une signification contrariante dans une autre langue, est un risque contre lequel les futurs parents peuvent cependant se prémunir. L’agence de “branding” MyNameForLife propose, en effet, des prestations de « naming » incluant la compatibilité culturelle, bien avisée dans un monde mondialisé. La création de logo ne devrait pas être un souci.

Je peux me tromper, mais le grand public étant parfois inspiré par les célébrités, à quand une génération de bébés prénommé(e)s «Onex» Schmidt ou «Mercy-CEVA» Genoud ?

 

Photo: Pixabay/CCO/Wokandapix

Auto mariage ne signifie pas épouser son auto

Les places sont chères pour célébrer des noces à la belle saison mais tout n’est pas perdu si vous êtes intéressé(e)s par un mariage avec vous-même: une cérémonie collective d’auto mariages est, en effet, prévue le 8 juin prochain, tel qu’annoncé sur le site de la mairie de Bilbao . Un cours de préparation au mariage est même prévu par l’organisatrice, l’artiste May Serrano, mariée de longue date à elle-même.

Acte de narcissisme ou de liberté ?

A en croire quelques auto mariées médiatiques (où sont les hommes?), la sologamie attire principalement des femmes entre 30 et 40 ans. Principales motivations ?

  • Refuser de conditionner son bonheur personnel à LA rencontre (qui se fait attendre longtemps).
  • Prendre sa vie en main face au stigmate du célibat, qui touche davantage les femmes.
  • Faire librement un acte d’amour propre et de fidélité envers soi pour l’éternité.

Des voix s’élèvent pour dire que c’est la preuve ultime de tout ce qui va de travers en termes de relations humaines, de solitude, d’individualisme.

Et s’il s’agissait d’un acte de narcissisme suprême? Je laisse à quiconque n’a jamais fait de selfies le soin de leur jeter la première pierre. En revanche, le besoin de faire du mariage  un « happening» à diffuser sur les réseaux sociaux, ressemblerait à s’y méprendre à une nouvelle forme de faire la fête…

Autre paradoxe de notre époque : et si cet acte d’affranchissement côtoyait leur rêve de princesse en robe blanche?

Pour répondre à ces questions et bien d’autres, l’auto mariage est assorti de spécialistes qui font autorité: une coach dispense des conseils et stages en la matière, tandis qu’un site vante ses coffrets d’auto mariage incluant une unique alliance (et une figurine solitaire pour couronner la pièce montée ?).

Je peux me tromper mais… une fois auto marié, que fait-on en cas de rencontre avec l’âme sœur ? Divorcer de soi-même ? Même si l’auto mariage n’est pas reconnu, l’adultère envers soi reste un sujet à part entière!

Photo: Pixabay, Creative Commons, Alexas_Fotos