Les téléspectateurs suisses ne pourront bientôt plus accéder librement aux matches de la igue des Champions puisque les droits de retransmission échapperont à la SSR dès 2018. L’amateur de football européen devra se tourner vers Teleclub et passer à la caisse.
Or, Teleclub, qui se présente comme une entreprise privée basée à Zurich, appartient à 75% à Swisscom. Qui appartient à 51% à la Confédération. En clair, c’est une entreprise détenue en majorité par la Confédération qui a ravi les droits de retransmission à la SSR… qui appartient aussi à cette même Confédération (à 100%).
Certes, des actionnaires privés s’invitent dans ce carrousel: Ringier (chez Teleclub), nombre de caisses de pensions, de fonds de placements et d’autres institutionnels chez Swisscom. Mais la voix de ces minoritaires dans la définition des stratégies d’entreprise n’est pas décisive et leur rôle consiste avant tout à encaisser les dividendes.
Aussi, l’affaire Teleclub / SSR apparaît-elle comme la cannibalisation d’une entreprise détenue par la Confédération par une autre… une stratégie dont on peine à saisir la logique. Sauf que l’affaire a un perdant: le téléspectateur suisse amateur de grands matches de foot, qui devra payer plus cher pour assister aux retransmissions.
Et ce n’est pas un cas isolé. En réduisant les redevances hydrauliques accordées aux communes de montagne, la Confédération entend alléger les charges des entreprises électriques, majoritairement détenues par les cantons et les communes, généralement de plaine. Les électriciens plaident depuis longtemps cette réduction de coûts destinée à leur permettre de surmonter la chute des prix de gros de l’électricité (qu’ils avaient mal anticipée) alors qu’il font face aux amortissements de leurs lourds investissements dans le pompage-turbinage de ces dernières années.
Cet allégement des charges des compagnies d’électricité va donc soulager les localités de plaine qu’effraye la perspective de devoir recapitaliser des entreprises en sérieuses difficultés. Elle éloigne la perspective de devoir ouvrir le porte-monnaie en reportant une partie de la facture sur le dos des communes de montagne détentrices de droits d’eau. Bien sûr, certaines de ces communes montagnardes ne sont financièrement pas à plaindre (par exemple Finhaut en Valais). Mais doit-on leur rendre la vie plus difficile du fait des erreurs de stratégie des barons de l’électricité?
Le perdant reste le consommateur final de courant électrique puisque aucune baisse des tarifs de l’électricité n’est prévisible, du moins pour le consommateur individuel soumis au monopole.
Il est, des fois, des stratégies dont la logique est difficile à comprendre autrement que par l’absence totale de pilotage. Et dont le perdant est toujours le même: vous, moi.