Une lectrice m’écrit:
” Pensez vous que les taux hypothécaires vont augmenter et mettre en difficultés les ménages de manière parfois dramatique ? De manière intuitive hélas, je le sens comme j’ai senti en 2003 la crise arriver sur la France, sur l’Europe telle la peste… je voyais les changements sur le comportement des personnes, des familles, à l’école. J’ai 55 ans, j’ai bien vu que trop de choses changeaient dans la vie des gens. Aujourd’hui, je les sens encore très différents, déconnectés inconscients, que ce soit les jeunes, les adultes … Que se passe-t-il?”
Chère Madame,
Vous avez parfaitement bien senti l’atmosphère du moment. Les taux d’intérêt, notamment hypothécaires, vont remonter. Tous les spécialistes s’accordent là-dessus.
Cependant, ce n’est pas pour demain! Et cela ne va pas nécessairement déclencher une crise comme celle de 2001-2003 dont vous parlez, ni comme celle de 2008-2013, dont nous ne nous extrayons que lentement.
Les raisons sont les suivantes: avec la fin de la crise financière, l’inflation, qui était à zéro voire négative à certains moments, est en train de revenir. Mais c’est un mouvement très lent!
Les banques centrales, qui avaient abaissé leurs taux d’intérêt à zéro et créé énormément de monnaie pour empêcher un effondrement de l’économie, cherchent désormais à les relever un peu. Mais elles ne le feront que pour contenir la hausse des prix, laquelle est très lente!
Toute hausse des taux d’intérêt fait ralentir l’économie: l’argent coûtant plus cher, les gens dépensent moins, les entreprises investissent moins et créent donc moins d’emplois. C’est le but recherché par les banques centrales. Cela dit, comme on est encore très loin aujourd’hui de cette situation dite de “surchauffe”, ce n’est pas demain que les banques centrales tenteront de freiner la reprise. Elles sont déjà bien contentes que la conjoncture économique se redresse!
Néanmoins, la France pourrait payer plus cher un relèvement des taux d’intérêt que les autres pays: cela ne fait que quelques mois que son économie se redresse alors que la plupart des autres pays européens vont beaucoup mieux. La Banque Centrale Européenne, qui pilote la politique monétaire de la zone euro et fixe par conséquent les taux d’intérêt de référence, décidera d’un relèvement de ses taux sur la base de la situation dans l’ensemble de la zone et pas seulement en fonction de la situation française. Tout dépendra de la vigueur de la reprise en France, notamment de la capacité de ses entreprises de rattraper leur retard sur celles des autres pays. Les réformes entreprises par Macron peuvent aider, au moins sur le plan psychologique, en attendant qu’elles exercent des effets concrets.
Je vous prie d’agréer, Chère Madame, mes salutations distinguées.