mobilité électrique

La mobilité électrique: une solution d’avenir ?

La mobilité électrique est sur toutes les lèvres et apparaît comme une solution d’avenir pour rendre la mobilité plus durable et notamment pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Mais est-ce si simple ?

 

Les premiers véhicules électriques sont apparus au milieu du XIXe siècle déjà. Mais peu concurrentiels par rapport aux véhicules thermiques, ils furent mis de côté pendant de nombreuses années. Ce n’est qu’au début de ce siècle, et face aux enjeux environnementaux induits notamment par l’utilisation de véhicules thermiques polluants, que les voitures électriques ont refait leur apparition avec pour ambition de proposer une alternative durable à la mobilité individuelle.

Mais si leur avenir est prometteur et que les constructeurs automobiles se sont maintenant tous lancés sur ce créneau, les véhicules électriques posent encore de nombreuses problématiques qu’il s’agira de résoudre pour en faire une véritable alternative « verte ».

 

Quelques enjeux à relever :

 

Production d’électricité : si l’ensemble des voitures suisses (4,6 millions) étaient propulsées à l’électricité, la demande en électricité augmenterait de 25 %. Comment produire cette énergie supplémentaire, sachant que nous devons dans le même temps remplacer l’énergie d’origine nucléaire ?

Fabrication du véhicule : La production d’une voiture électrique est loin d’être propre, puisqu’elle émet deux fois plus de gaz à effet de serre à la production (entre 7 et 15 tonnes de CO2, selon la taille de la batterie et le processus de production) qu’un véhicule thermique. Par ailleurs, les matières premières (cuivre, cobalt, lithium, …) utilisées pour la fabrication des batteries ont un impact environnemental et social important.

Recyclage des batteries : Le recyclage des batteries pose lui aussi un défi considérable, particulièrement pour extraire les métaux qui les composent avec le moins d’énergie possible. Un défi encore à relever, mais des applications industrielles économes en énergie et économiques semblent aujourd’hui toutes proches.

 

Si les enjeux ne sont pas négligeables, la voiture électrique possède tout de même quelques atouts indéniables :

 

Pollution de l’air : Les véhicules électriques ne génèrent pas d’émissions directes de polluants et contribuent ainsi à l’amélioration de la qualité de l’air dans les régions exposées au trafic routier.

Bilan CO2 sur l’ensemble du cycle de vie : L’analyse du cycle de vie des voitures électriques, c’est-à-dire l’impact environnemental depuis l’extraction des matières premières à la destruction (ou le recyclage) du véhicule en passant par sa construction et son utilisation, montre que la voiture électrique émet bien moins de CO2 que les voitures thermiques. Pour autant que l’électricité consommée soit d’origine renouvelable, les voitures électriques deviennent ainsi plus « écolo » que les voitures thermiques au bout de 50’000 kilomètres parcourus (c’est-à-dire en deux ans environ).

 

Les véhicules électriques représentent donc tout de même une solution intéressante pour améliorer l’efficacité énergétique et l’impact négatif de la mobilité individuelle sur l’environnement.

 

La question épineuse de la recharge

Posséder une voiture électrique implique bien entendu la nécessité de pouvoir la recharger. Ceci peut facilement être mis en place par les propriétaires qui peuvent installer une borne de recharge chez eux, mais cela pose davantage de problèmes aux locataires qui possèdent parfois une place de parc dans un parking souterrain commun, mais le plus souvent une place extérieure ou même aucune place fixe. Pour eux, il s’agit de prendre contact avec le propriétaire pour discuter de l’aménagement d’une solution efficace, avec, en cas de forte demande, la nécessité de renforcer le raccordement électrique du bâtiment. On le voit, la question du réseau de recharge est un enjeu essentiel pour permettre le déploiement généralisé de la mobilité électrique. La Suisse a en tout cas pris les devants sur ce point, puisqu’elle possède l’un des réseaux de recharge de voitures électriques les plus denses d’Europe. Une vue d’ensemble des stations de recharge publiques et leur disponibilité en temps réel est visible sur le portail cartographique de la Confédération.

 

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De l’électricité locale pour sa voiture

La question de la durabilité de l’énergie consommée est également sujet à réflexion. Une des solutions consiste à produire cette énergie localement. En augmentant de 50% la taille d’une installation solaire standard sur une maison individuelle, suffisamment d’électricité est ainsi produite pour alimenter à la fois le logement et une voiture électrique. Lors de la pose de panneaux solaires, les propriétaires devraient donc penser leurs besoins à long terme pour y intégrer ce facteur.

 

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LA solution d’avenir : rouler moins, rouler mieux !

Nous l’avons vu, qu’il s’agisse d’un moteur thermique ou électrique, la voiture individuelle garde un impact environnemental et climatique important. La vraie solution d’avenir c’est donc surtout de moins recourir à la voiture, qu’elle soit électrique ou non ! C’est ce qu’ont décidé les 1’265 habitants de la coopérative d’habitation Mehr als Wohnen à Zürich, qui se sont engagés à ne pas posséder de voiture individuelle. Ils se partagent quelques voitures en car sharing. Celles-ci sont électriques et approvisionnées à environ 75% par de l’électricité produite par les panneaux photovoltaïques installés sur les toits des bâtiments d’habitation. On peut penser aussi au covoiturage, ou, quitte à passer à l’électrique, à privilégier le vélo.

 

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Hervé Henchoz

Rédacteur

mobilité électrique

Quand les véhicules électriques se transforment en batteries mobiles

Planair SA, bureau d’ingénieurs conseils spécialisé dans les questions d’efficacité énergétique et de développement durable, participe au projet européen RegEnergy. Sur le site Y-PARC d’Yverdon-les-Bains*, la technologie « vehicle-to-grid » (V2G) est prête à être implantée. L’approche pourrait bien révolutionner le monde de l’automobile, tout comme celui de l’énergie.

Geoffrey Orlando est responsable de projets mobilité électrique au sein du bureau Planair SA. Il est également responsable de la conception et de la mise en œuvre du SunnYparc, un projet révolutionnaire – osons le mot – dans lequel la production photovoltaïque et les véhicules électriques font très bon ménage, grâce au vehicle-to-grid (V2G). Les véhicules électriques se transforment alors en batteries mobiles, capables de donner et de prendre l’électricité partout et en tout temps. Geoffrey Orlando nous en dit plus.

 

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Où en est aujourd’hui le projet SunnYparc ?

Le projet pilote et de démonstration est prêt. Nous avons modélisé le réseau électrique intégrant le concept de vehicle-to-grid (V2G), afin de clarifier les besoins techniques et économiques nécessaires à son développement. Nous avons le concept, les partenaires, les financements, l’ingénierie, la structure, mais tout est à l’arrêt depuis janvier 2021, en raison d’une opposition pour la construction d’un parking centralisé de sept étages sur le site.

 

Et en quoi cela impacte-t-il votre projet ?

Nous prévoyons la pose de 250 bornes de recharge, dont 50 bidirectionnelles, et d’ici 2025, nous planifions jusqu’à 350 véhicules électriques sur le site. Il s’avère qu’une part importante de la production électrique qui alimentera les bornes doit se faire via des panneaux photovoltaïques prévus en toiture et en façade de ce parking. Nous attendons donc impatiemment la levée de cette opposition.

 

Pourriez-vous nous expliquer ce qu’est le vehicle-to-grid (V2G) et ce qu’il permet ?

C’est un concept de recharge intelligente (ou smart charging) qui permet la charge et la décharge d’un véhicule électrique, à l’aide d’une borne de recharge dite bidirectionnelle. Il faut savoir qu’un véhicule reste immobile en moyenne 95% de son temps. En le connectant à une telle borne, on peut alors non seulement charger une batterie de voiture électrique, mais également la décharger sur le réseau (vehicle-to-grid / V2G), sur une maison (vehicle-to-home / V2H) ou sur un bâtiment (vehicle-to-building / VTB). Le véhicule électrique à l’arrêt devient alors une batterie stationnaire. Si on accélère le développement des énergies renouvelables, il faudra trouver des moyens pour les stocker, et le V2G est une solution flexible et à moindre coût.

 

Les modèles de véhicules électriques actuels sont-ils compatibles avec le V2G ?

Non pas tous, mais les constructeurs prennent le virage et se préparent à un déploiement à grande échelle. Nissan a été pionnier sur cette question, puisqu’il développe depuis 2012 déjà des modèles de véhicules compatibles. Dans les cinq prochaines années, un grand nombre de constructeurs en proposeront. Le groupe Volkswagen a par exemple annoncé qu’à partir de 2022, chaque voiture électrique du groupe – Volkswagen, Audi, Skoda et Seat – sera compatible V2G. Il y a quelques années, le V2G était une question de chercheurs, puis c’est entré dans l’industrie. On voit qu’aujourd’hui les constructeurs annoncent qu’en plus d’électrifier leurs flottes de véhicules, ils se dirigent vers le V2G.
Rappelons que pour que le concept soit possible, il faut effectivement un véhicule compatible, mais surtout une borne de recharge bidirectionnelle. C’est elle qui va gérer la charge et la décharge, en fonction des besoins du réseau. De plus en plus de fournisseurs de bornes de recharge s’y mettent donc. Toutefois, le cadre réglementaire et les règles techniques doivent encore être clarifiés, notamment avec la norme ISO15118. Elle doit permettre le smart charging, soit la communication entre la borne et le véhicule, aujourd’hui encore difficile. Cette question mobilise aujourd’hui le secteur.

 

Quels sont les défis qui attendent les gestionnaires de réseaux (GRD) en matière de V2G ?

Généralement, les gestionnaires de réseaux produisent, distribuent et vendent l’électricité aux consommateurs. Avec le V2G émerge un concept de réseau électrique virtuel. Je m’explique : si on charge un véhicule électrique au point A, à la maison par exemple, et qu’on se rend au point B le lendemain, disons au travail, alors l’électricité chargée au point A pourra être déchargée au point B dans une autre ville, voire un autre canton. Ce qui est alors révolutionnaire, c’est qu’on a transporté cette électricité sans utiliser le réseau électrique classique, mais en utilisant le réseau routier. Le risque pour les GRD est donc de perdre en partie la maîtrise habituelle de certains flux et de devoir repenser les modèles de prédiction pour intégrer cette nouvelle fonctionnalité. Il va falloir également mettre en relation des mondes qui n’avaient jusqu’ici aucun besoin de communiquer : les constructeurs automobiles et les énergéticiens, avec au milieu les fournisseurs de solutions de recharge.

 

Et les opportunités ?

Nos simulations ont montré une meilleure intégration du photovoltaïque dans le micro-réseau. Grâce aux véhicules électriques, dont une partie de V2G, l’autoconsommation est de 87%, contre 50% avant. L’approche permet donc de mieux profiter localement des énergies renouvelables et de minimiser l’impact sur le réseau. Nous avons également constaté la capacité du V2G à diminuer les pics de consommation et à lisser la production d’énergie intermittente, comme le photovoltaïque. Une autre opportunité se trouve dans les services systèmes rendus au réseau. Pour ce faire, de nouveaux acteurs entrent en jeu : les agrégateurs de flexibilité, qui pourront agréger sur plusieurs points du réseau les flexibilités de centaines, voire de milliers de V2G et les vendre sur le marché de l’électricité. Nous avons estimé la valorisation économique d’un véhicule entre 50 et 600 francs/an selon le type de scénario retenu : la maximisation de l’autoconsommation, la minimisation des pics de consommation et de production et les services systèmes.

 

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Cela veut dire que le conducteur/consommateur pourra gagner de l’argent ?

Oui, selon la situation, le gestionnaire du micro-réseau privé va potentiellement économiser de l’argent et/ou se faire rémunérer. Dans le cas de l’autoconsommation, on gagne sur la facture énergétique en consommant une énergie photovoltaïque locale moins chère que l’énergie soutirée du réseau public. Dans celui du lissage des pics de consommation, on économise sur la facturation de la puissance maximale soutirée au réseau public. La société Swissgrid pourra quant à elle rémunérer les services rendus au réseau, puisqu’une réponse à ses besoins en électricité sera possible : le conducteur/consommateur pourra « retirer » en temps réel sa consommation en stoppant la charge, et à l’inverse injecter de l’électricité sur le réseau. Cette flexibilité pourra être valorisée auprès de Swissgrid, par le biais d’un agrégateur. Il y a clairement une création de valeur autour du V2G. La question est aujourd’hui de savoir comment la partager entre les propriétaires de véhicules ou de flottes de véhicules, les gestionnaires de réseaux, les agrégateurs de flexibilité et les gestionnaires de réseaux bornes de recharge.

 

Quelles sont les limites du V2G ?

La limite principale, outre les aspects économiques, réglementaires et techniques, c’est l’utilisateur. Un des buts du projet pilote SunnYparc est d’ailleurs d’étudier l’acceptabilité de l’approche. L’utilisateur doit y trouver son compte, accepter que le gestionnaire de réseau utilise l’énergie de sa batterie, savoir combien il sera rémunéré ou combien il économisera, mais également accepter que l’utilisation de sa batterie par un système extérieur affecte l’état de charge du véhicule et potentiellement le vieillissement de la batterie par exemple. Car si les propriétaires de véhicules électriques refusent de participer au concept V2G, alors tout ce dont nous venons de parler restera uniquement théorique.

Pour plus d’informations sur les activités du bureau Planair SA
www.planair.ch

 

RegEnergy : le réseau européen pour les énergies renouvelables

RegEnergy est un projet européen, doté d’un budget total de 11,08 millions d’euros, qui vise à accroître l’utilisation des énergies renouvelables dans les régions du nord-ouest de l’Europe. En Suisse, c’est le site Y-PARC* à Yverdon-les Bains qui a été choisi.

Pour le bureau Planair et ses partenaires, il s’agit :

  • d’évaluer les impacts d’une importante augmentation de la production photovoltaïque et des besoins énergétiques pour la mobilité sur le réseau électrique,
  • d’estimer le potentiel économique de l’intégration de la recharge intelligente combinée avec la technologie V2G (vehicle-to-grid, ou recharge bidirectionnelle) pour la gestion flexible des besoins et ressources au sein d’un micro-réseau,
  • d’identifier les différents modèles d’affaires applicables à ces nouveaux usages.

L’objectif est d’initier un projet de démonstration permettant de mettre ces résultats à l’épreuve de la réalité et de les tester à grande échelle.

Le projet pilote et de démonstration SunnYparc a reçu le soutien de l’OFEN. Il est co-financé par le canton de Vaud et la ville d’Yverdon-les-Bains et intègre plusieurs partenaires, dont Yverdon Energies, et les sociétés Green Motion (fournisseur des bornes de recharge bidirectionnelle et du software associé), SEL (Smart energy link – gestion intelligente de l’énergie du microgrid), VGT (Virtual global trading – valorisation des flexibilités locales sur les marchés de l’électricité) et le groupe Renault/entité Mobilize (fournisseur de véhicules électriques et de prototypes V2G).

Pour plus d’informations sur le projet RegEnergy
www.planair.ch/Planair/Representations/RegEnergy

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*Y-PARC – Swiss Technopole est un parc scientifique et technologique situé à Yverdon-les-Bains. Il se distingue par ses pôles de compétences dans la cybersécurité, les industries de précision et les technologies médicales. Avec plus de 200 entreprises, 1’800 emplois et une superficie de plus de 50 hectares, il est le plus grand du genre en Suisse.

 

Joëlle Loretan

Journaliste

hydrogène

L’hydrogène, élément-clé de la transition énergétique ?

On peut le lire régulièrement dans la presse : « l’hydrogène, c’est l’énergie du futur ». Tous les pays semblent s’y intéresser de près et mettent en place les uns après les autres des stratégies dédiées à l’hydrogène pour faciliter l’atteinte de la neutralité carbone. Ce vecteur d’énergie pourrait en effet contribuer à décarboner certains secteurs industriels, faire rouler nos véhicules et assurer le stockage de l’électricité. Mais si les technologies hydrogènes semblent prometteuses, il reste encore du chemin à parcourir pour profiter d’un hydrogène renouvelable et à faible teneur en carbone en abondance.

L’hydrogène c’est quoi exactement ?

L’hydrogène est l’élément chimique le plus abondant de l’univers. Par exemple, chaque molécule d’eau est le fruit de la combinaison entre un atome d’oxygène et deux atomes d’hydrogène. On trouve aussi de l’hydrogène dans les hydrocarbures comme le pétrole ou le gaz qui sont issus de la combinaison d’atomes de carbone et d’hydrogène.

Si quelques sources d’hydrogène (à l’état naturel) ont été découvertes dans les fonds marins et également sur terre, comme dans le village malien de Bourakebougou où l’hydrogène naturel est exploité pour fournir de l’électricité, aucune exploitation à grande échelle n’existe à ce jour. L’hydrogène est ainsi toujours associé à d’autres éléments chimiques comme l’oxygène ou le carbone.

Comme l’électricité, le gaz dihydrogène (H2), ou par abus de langage, tout simplement hydrogène, est donc considéré comme un vecteur énergétique et non une source d’énergie primaire.

Actuellement, l’hydrogène est surtout utilisé comme composant chimique dans différents procédés industriels (raffinage et désulfuration du pétrole, production d’ammoniac, électronique, métallurgie, industrie spatiale, etc.). Mais ce gaz suscite aujourd’hui bien d’autres intérêts par ses propriétés énergétiques remarquables. En effet, par kilo, il contient 2,2 fois plus d’énergie que le gaz naturel, 2,75 fois plus que l’essence et 3 fois plus que le pétrole. L’hydrogène peut donc être utilisé dans de nombreuses applications et, selon l’usage final, être converti en électricité, en chaleur ou en force motrice.

Comment produire de l’hydrogène ?

Si l’hydrogène n’est pas une source d’énergie primaire, la question qui se pose et que nous nous posions déjà en début d’année dans un précédent article sur les avions zéro-émission, c’est de savoir comment est produit l’hydrogène. Car, pour en faire « l’énergie du futur », il faut que le procédé soit peu énergivore et à impact carbone limité, voire nul.

Or à l’heure actuelle, 95 % de la production mondiale d’hydrogène, qui s’élève annuellement à 75 millions de tonnes, provient de la séparation de combustibles fossiles, principalement par vaporeformage de gaz naturel. Un tel procédé représente pour chaque kg de dihydrogène (H2) produit, 10 kg de CO2 dégagés. Nous sommes donc là loin de l’énergie du futur. On parle ainsi couramment d’hydrogène gris ou hydrogène fossile pour caractériser cet hydrogène produit à partir des énergies fossiles avec une forte émission de gaz à effet de serre. En captant et en stockant le CO2 émis lors de la production d’hydrogène, ce dernier devient neutre en carbone et l’on parle alors d’hydrogène bleu ou hydrogène bas carbone. Toutefois le captage et le stockage du CO2 a un coût, et aujourd’hui, seuls quelques projets pilotes ont été menés dans ce sens. En lieu et place du gaz naturel, l’utilisation du biométhane (méthane issu de la fermentation de la biomasse) constitue aussi une solution pour produire un hydrogène décarboné.

La gazéification permet quant à elle de produire, par combustion, un mélange de carbone (CO) et de dihydrogène (H2) à partir de charbon (solution qui émet elle aussi beaucoup de CO2). Là encore, difficile d’y voir l’énergie de demain.

Mais la production d’hydrogène par gazéification peut également se faire à partir de biomasse, comme le bois. Le projet H2Bois, porté par le Groupe Corbat, spécialisé dans la mise en valeur du bois des forêts jurassiennes, en collaboration avec le bureau d’ingénieurs PLANAIR, vise la mise en service d’une installation produisant de l’hydrogène de qualité mobilité (pouvant également être utilisé dans l’industrie) à partir de résidus de bois. Second du genre en Europe et pionnier en Suisse, ce projet devrait permettre de fabriquer à partir de 2022 l’équivalent de la consommation annuelle de 4’500 voitures, soit 225 tonnes d’hydrogène bas carbone par an. À cela s’ajoutent annuellement 1’500 tonnes de biochar, cette sorte de charbon de bois également issu de la gazéification du bois, qui peut servir dans l’agriculture en agissant comme un puit de carbone.

L’hydrogène peut aussi être produit à partir d’eau et d’électricité, soit par électrolyse de l’eau. L’électrolyseur sépare une molécule d’eau (H2O) en dihydrogène (H2) et en oxygène (O). Cette voie est aujourd’hui encore peu répandue (moins de 5% de la production d’hydrogène mondiale) car elle est nettement plus coûteuse (2 à 3 fois plus chère que le reformage du gaz naturel). Et qu’en est-il des émissions de gaz à effet de serre issues du processus d’électrolyse ? Cela dépend bien entendu du type d’électricité utilisé : lorsque l’électricité utilisée dans le processus provient d’une source renouvelable comme l’hydroélectricité, le solaire ou l’éolien, les émissions sont réduites au minimum (0,97kg de CO2 pour un kg d’hydrogène avec de l’électricité provenant d’éoliennes par exemple). On parle alors ici d’hydrogène vert ou hydrogène renouvelable.

Les promesses de l’hydrogène

Vous l’avez compris, ce n’est pas si simple et surtout avantageux de produire de l’hydrogène renouvelable ou bas carbone. Si les gouvernements et industriels investissent aujourd’hui massivement dans l’hydrogène, c’est donc pour développer cette filière qui présente tant de promesses.

Notre approvisionnement énergétique doit devenir climatiquement neutre avant 2050. Cela implique en particulier de se passer des énergies fossiles. La production d’hydrogène bas carbone ou renouvelable est ainsi vue comme une contribution importante à la décarbonisation de l’économie pour à peu près toutes les applications qui aujourd’hui font appel aux énergies fossiles (transport, industrie lourde, chimie, chauffage, etc.).

Les acteurs du secteur gazier sont particulièrement actifs dans ce domaine et ont pour objectif de remplacer petit à petit le gaz naturel par le biogaz ou l’hydrogène. Les fabricants de chaudières travaillent ainsi au développement de chaudières à hydrogène ou chaudières à gaz compatibles à 100% avec l’hydrogène à l’horizon 2025-2030.

Dans le domaine de la mobilité, alors que l’on parle beaucoup des voitures électriques fonctionnant avec une batterie, la pile à combustible à hydrogène semble elle aussi promise à un bel avenir, en particulier pour les poids-lourds. Les véhicules fonctionnant à l’hydrogène présentent une autonomie plus importante qu’une batterie électrique et le plein est pour ainsi dire aussi rapide que pour un véhicule équipé d’un moteur thermique équivalent. En Suisse, l’association Mobilité H2 Suisse s’engage pour la mise en place d’un réseau de stations-service à hydrogène couvrant l’intégralité du territoire national.

Un autre enjeu important pour la transition énergétique est l’équilibrage entre une production d’énergie toujours plus décentralisée et fluctuante issue des sources renouvelables (eau, soleil ou vent) et la consommation d’énergie. C’est la problématique de la sécurité de l’approvisionnement. Alors que nous avons, aujourd’hui déjà, un déficit de production d’électricité en hiver, et que ce déficit devrait s’accroître encore avec le remplacement de l’électricité d’origine nucléaire par du renouvelable, l’hydrogène a l’avantage de permettre le déphasage saisonnier de la production par rapport à la consommation, sur le modèle d’une batterie géante.

En effet, grâce à l’hydrogène, les surplus d’électricité renouvelable produits en été peuvent être convertis et stockés afin d’être utilisés en différé par exemple au moyen d’une centrale de cogénération (CCF). On parle alors de couplage ou de convergence des réseaux. Comme le souligne l’Association des entreprises électriques de Suisse (AES), « la pièce maîtresse du couplage des secteurs est la liaison entre les secteurs de l’électricité, de la chaleur et des transports via les dispositifs de stockage et les convertisseurs d’énergie. L’électricité peut être ainsi utilisée pour fabriquer du gaz stockable (méthane, hydrogène) et vice-versa ».

On le voit, l’hydrogène peut donc être utilisé comme matière première, comme carburant ou comme vecteur d’énergie et de stockage, et a de nombreuses applications possibles dans les secteurs de l’industrie, des transports, de l’électricité et des bâtiments. Il présente de nombreuses promesses pour concrétiser la transition énergétique, et les gouvernements développent les uns après les autres des stratégies pour devenir leaders dans ce domaine et soutenir leur engagement à atteindre la neutralité carbone.

Encore quelques enjeux à relever

Pour concrétiser ces promesses, quelques obstacles doivent toutefois encore être relevés :

Stockage : l’hydrogène est le gaz le plus léger. Pour l’entreposer, le transporter et le distribuer, il faut soit le liquéfier à une température extrêmement basse (- 253 °C), soit le comprimer à très haute pression (700 bars). Ces opérations sont très énergivores : sa liquéfaction, par exemple, consomme 10 à 13 kWh d’électricité par kg.

Pertes de rendements : la transformation d’électricité renouvelable excédentaire en hydrogène pour le stockage, puis la transformation de l’hydrogène en électricité pour une utilisation ultérieure (power-to-gaz-to-power) présente par exemple des pertes de rendements de l’ordre de 70% à 75%, selon une note de l’Agence de la transition écologique en France. Ainsi, pour produire un kg d’hydrogène, il faut 58.7 kWh d’électricité, mais l’énergie électrique qui en résulte n’est que de 13.4 kWh comme le montre le graphique ci-dessous.

Sécurité : La molécule d’hydrogène étant de très petite taille et de faible viscosité, elle présente une propension à fuir plus importante en comparaison à d’autres gaz combustibles. L’hydrogène présente également une probabilité d’inflammation plus élevée que celle du propane ou du gaz naturel, même sans présence de flamme ou d’étincelle. La sécurité d’utilisation de l’hydrogène est donc un enjeu important à maîtriser, ce qui est bien entendu le cas pour ses différentes applications existantes. Dans le domaine de la mobilité par exemple, l’homologation des réservoirs à hydrogène est très sévère et dépend de plusieurs cycles de tests comprenant des tirs à balles réelles auxquels ces derniers doivent résister.

L’hydrogène, énergie d’avenir… depuis longtemps

En 1874, Jules Vernes prédisait dans son roman L’Île mystérieuse, que l’eau serait un jour employée comme combustible, « que l’hydrogène et l’oxygène, qui la constituent, utilisés isolément ou simultanément, fourniront une source de chaleur et de lumière inépuisables et d’une intensité que la houille ne saurait avoir ».

Cela fait donc près de 150 ans que l’on parle de l’hydrogène comme une « énergie d’avenir ». Les moyens mis sur la table aujourd’hui par les gouvernements et les industriels pour le développement des technologies hydrogène doivent donc permettre de relever les enjeux mentionnés plus haut afin que l’hydrogène devienne, enfin et pour de bon, un vecteur énergétique renouvelable et abondant, une « énergie d’aujourd’hui ».

D’importants travaux de recherche sont lancés à travers le monde dans le but d’atteindre de bons rendements de conversion. On s’intéresse également à la production d’hydrogène par des bioprocédés, dits de troisième génération (bio-)photolyses de l’eau permettant de produire de l’hydrogène à partir de la lumière du soleil, ou via l’utilisation de certaines microalgues et cyanobactéries). On s’intéresse aussi à l’exploitation de l’hydrogène à l’état naturel, non plus cette fois comme un vecteur énergétique, mais comme une source d’énergie primaire.

Le temps presse pour atteindre la neutralité carbone. Nous verrons ces prochaines années si l’hydrogène fait effectivement partie des solutions pour y parvenir.

 

Hervé Henchoz

Rédacteur

énergie

L’énergie du futur… est celle qu’on ne consommera pas !

Notre avenir énergétique réside dans les énergies renouvelables, mais un aspect important est souvent délaissé lorsque nous abordons la question de la transition énergétique : la sobriété.

Des innovations toujours plus nombreuses

De nombreux scientifiques se penchent sur la question de la production d’énergie : certains imaginent produire de l’énergie grâce à des centrales solaires en orbite, d’autres souhaitent exploiter le phénomène de l’osmose pour produire de l’énergie dans les zones d’estuaires, ou encore transformer la biomasse des micro-algues en biocarburants. Par ailleurs, de nombreuses recherches se penchent sur le développement de cellules photovoltaïques pouvant être placées sur toutes sortes de surfaces – murs de maison, fenêtre, intégrées dans les tuiles, etc. Nous avons eu l’occasion de découvrir plusieurs de ces innovations au cours de cette quinzaine thématique dédiée aux énergies du futur.

Mais est-ce vraiment tout cela l’énergie de demain ?

Certes, ces recherches sont importantes et nos sociétés en auront besoin pour réaliser leur transition énergétique. Toutefois, à trop vouloir trouver des solutions technologiques, nous oublions parfois qu’une solution simple est à portée de nos mains.

Mieux, autrement et moins

La transition énergétique est basée sur trois piliers :

  • la sobriété énergétique ;
  • l’efficacité énergétique ;
  • la production d’énergie renouvelable.

Nos sociétés mettent souvent beaucoup d’efforts dans l’efficacité énergétique (« mieux ») et la production d’énergie renouvelable (« autrement »), mais nous délaissons souvent la sobriété (« moins »). Or l’énergie la plus écologique et la plus économique c’est celle que l’on ne consomme pas ! Ce premier pilier devrait donc être remis au centre de nos politiques énergétiques.

Un changement de comportement nécessaire

Il n’est pas rare que les gains obtenus grâce à l’efficacité énergétique ou les énergies renouvelables soient contrebalancés par une hausse de la consommation. C’est par exemple le cas d’une personne qui fait l’achat d’un véhicule électrique, et qui – persuadé que son moyen de déplacement est désormais « propre » – fait davantage de kilomètres avec sa nouvelle voiture qu’il n’en faisait avec son ancienne voiture à essence. Il en est de même lorsque nous rénovons un bâtiment et améliorons ainsi son efficacité énergétique, mais en profitons pour augmenter la surface habitable. Ces phénomènes sont appelés « effet rebond ».

Pour limiter ces effets et parvenir aux objectifs de la transition énergétique, il est impératif que le concept de sobriété énergétique soit intégré à nos politiques énergétiques.

La sobriété est un mot qui peut nous effrayer. Il est vrai que ce concept implique un changement dans nos habitudes de consommation. La sobriété, ou encore la frugalité, consiste à prioriser nos besoins énergétiques essentiels, tant dans les usages individuels que collectifs, et à les limiter.

Est-il par exemple pertinent de se servir d’un véhicule de plus d’une tonne pour déplacer une personne de 80 kg sur un trajet de 5 km en pleine ville ? ou ne faudrait-il pas privilégier d’autres modes de transport dans ce cas-là ? Est-il normal de vivre en t-shirt toute l’année dans un appartement chauffé à 23°C ou pouvons-nous consentir à enfiler un pull en période hivernale ?
Les économies d’énergie potentielles sont nombreuses et doivent être prises en compte. Elles sont la clé du succès pour parvenir rapidement à une transition énergétique.

La sobriété ou l’acceptation d’un mode de vie modéré

Plus que le renoncement à un certain standing de vie, la sobriété est davantage l’acceptation d’un mode de vie modéré. La sobriété implique la responsabilité individuelle de tous. Impossible, direz-vous ? Difficile, peut-être. Mais la crise liée au coronavirus nous a forcé à envisager d’autres solutions, à adopter d’autres modes de vie. Ces restrictions, parfois drastiques, mais limitées dans le temps, ont le mérite de démontrer que nos sociétés sont capables d’adaptation.

Alors, prêts pour le défi de la sobriété énergétique ?

 

Hervé Henchoz

Rédacteur

anergie

L’anergie, un échange de bons procédés

Un réseau (ou boucle) anergie pourrait se résumer ainsi : les rejets thermiques des uns deviennent la ressource des autres. Ce « réseau thermique du futur » représente une solution énergétique très intéressante dans la perspective du développement de la ville durable.

Contrairement à ce que son nom pourrait laisser penser, l’anergie ne fonctionne pas « sans énergie ». Le principe repose plutôt sur la récupération d’énergie perdue. Une boucle anergie offre en effet la possibilité de capter, stocker et redistribuer l’énergie. Fonctionnant dans la majorité des cas avec une ressource géothermique ou d’hydrothermie (eau du lac), l’approche peut toutefois se coupler avec d’autres énergies renouvelables comme le soleil, l’eau ou encore le vent.

 

À quoi ça sert ?

La boucle anergie relie entre eux des consommateurs de chaud et de froid, comme l’explique Giulio Caimi, responsable Infrastructures énergétiques chez Romande Energie. « L’approche permet des échanges thermiques simultanés entre différents consommateurs. Connectés sur un même réseau, ils ont la possibilité d’échanger leurs rejets thermiques, qui autrement seraient perdus. Le manque ou le surplus d’énergie de chaque consommateur est fourni ou dissipé par l’environnement, soit via des sondes géothermiques, soit avec les rejets de STEP ou encore via le pompage d’eau du lac. C’est le réseau du futur pour les milieux urbains, une solution qui tend à se déployer. » En effet, la consommation de froid d’un immeuble rejette des calories (de la chaleur), qui peuvent alors être consommées par un immeuble voisin, et vice versa. Avec l’anergie, les « pertes énergétiques » des uns se transforment en « gains énergétiques » pour les autres.

Imaginez qu’un immeuble administratif soit « mis en boucle » avec des bâtiments locatifs situés à proximité. En été, une partie de la chaleur évacuée par les bureaux pourrait être envoyée dans le réseau pour répondre à une partie des besoins en eau chaude sanitaire du bâtiment locatif. De même, le froid envoyé en hiver dans la boucle anergie pourrait être utilisé pour rafraîchir les salles serveurs de l’immeuble administratif. « La récupération à l’échelle d’un consommateur existe depuis longtemps », précise Michel Meyer, membre du comité de Géothermie Suisse. « Les anciennes usines prenaient l’eau du réseau pour refroidir les pièces usinées. L’eau rejetée à 50°C était alors utilisée pour d’autres processus industriels, ou pour alimenter en eau chaude les douches des employés. Le gros changement aujourd’hui, c’est le développement des infrastructures de réseau thermiques, qui permet de valoriser ce potentiel à une plus large échelle. »

 

Les quatre piliers de l’anergie

La boucle anergie comprend un dispositif de captage1 (la ressource énergétique), un dispositif de mutualisation2 (la boucle anergie), un dispositif de production3 (une pompe à chaleur) et un dispositif de régulation4 (l’intelligence du système).

La ressource énergétique1 : Dans la majorité des cas, une boucle anergie s’appuie sur un réseau géothermique. Mais un lac ou encore des eaux usées d’épuration peuvent être une bonne source thermique (voir l’exemple de la STEP de Morges, en bas de page).

La boucle anergie2 : La mise en commun des bâtiments est la première étape à franchir pour créer une boucle anergie. Pour cela, on utilise deux tubes dans lesquels circule de l’eau (le CO2 est actuellement testé*). Chaque bâtiment est raccordé à la boucle, qui relie ainsi les différents bâtiments entre eux.

La pompe à chaleur3 : La boucle anergie est connectée à des pompes à chaleur (PAC), qui récupèrent la chaleur de l’environnement et permettent d’adapter les niveaux de température. Il est ainsi possible de raccorder sur une boucle anergie un bâtiment qui a un besoin de chauffage à 50°C et un autre avec un besoin de chauffage à 30°C, en adaptant la consigne de température des PAC présentes dans chaque bâtiment.

L’intelligence du système4 : la régulation, c’est le cerveau du réseau anergie. Ingénierie du système, capteurs ou encore gestion semi-automatique rendent aujourd’hui possible la mise en place de boucles anergie.

 

* L’eau… ou le C02

L’eau est largement utilisée dans le réseau anergie. Toutefois, le CO2 est dans le viseur, pour ses grandes capacités thermiques et sa facilité d’installation, comme l’explique Jessen Page, professeur en systèmes énergétiques à la HES-SO Valais à Sion. « Pour implanter un réseau thermique en zone urbaine, il faut enfouir des tuyaux de grandes dimensions et prévoir d’importants travaux de génie civil, avec tout ce que cela implique de perturbations de trafic en surface. L’avantage du C02 est qu’il nécessite des conduites flexibles, de plus petits diamètres, qui peuvent être tirées sous les trottoirs. Et contrairement à l’eau, il ne risque pas de geler (voir les difficultés). » Un démonstrateur est actuellement en construction sur le campus EnergyPolis de la HES-SO à Sion, afin de tester la faisabilité de l’approche.

 

Connexion et mutualisation

Un des points forts de l’anergie, c’est la possibilité d’y intégrer des sources d’énergie différentes, à n’importe quel endroit du réseau. « À partir du moment où les tuyaux sont interconnectés, on peut y injecter plusieurs ressources », explique Michel Meyer, de l’association Géothermie Suisse. « Sur la boucle, on peut imaginer trouver une centrale géothermique qui produit de l’eau à 50°C, une station d’épuration qui rejette des eaux épurées et une industrie qui rejette des déchets thermiques. Le réseau supporte des sources d’approvisionnement multiples. »

Un autre atout majeur de l’anergie réside dans sa capacité à mutualiser les besoins énergétiques entre bâtiments, ce que ne permet pas un réseau de chaleur classique, qui reste dans le schéma d’une production d’énergie centralisée et unidirectionnelle. Chacun peut ici profiter des déchets thermiques de l’autre. Toutefois, les besoins n’étant pas forcément simultanés, la ressource géothermique peut servir de stockage pour le chaud et le froid. Encore un atout de l’anergie, et non des moindres.

 

Le stockage des énergies renouvelables

Si les besoins en chauffage des uns coïncident avec les rejets de chaleur des autres, alors l’énergie transite directement d’un bâtiment à l’autre. Mais lorsque la concordance de temps n’y est pas, la boucle anergie permet d’emmagasiner, via un stockage géothermique, l’énergie abondante en période estivale notamment, pour la restituer en hiver par exemple, au moment où la demande est importante. « Il est possible de profiter de la capacité de stockage thermique du sous-sol, relève Michel Meyer, de Géothermie Suisse. On préchauffe le sous-sol à 17°C et, l’hiver suivant, quand les besoins sont importants, on récupère une partie des calories enfouies quelques mois plus tôt. Le stockage est possible avec des sondes géothermiques, tout comme avec les nappes phréatiques : le chaud dont personne n’a besoin va réchauffer les eaux souterraines de quelques degrés. En hiver, la ressource naturelle sera alors préchauffée et les calories seront à disposition. » Et si la ressource thermique peut être stockée, l’électricité produite par des panneaux solaires ou des éoliennes n’est pas perdue non plus. « On reproche souvent cette mauvaise concordance de temps aux énergies renouvelables, le fait qu’elles ne produisent pas toujours l’énergie au moment opportun, ou alors qu’elles en produisent en excès, ajoute Michel Meyer. Mais avec l’anergie, l’électricité produite via les sources renouvelables peut être utilisée pour alimenter les pompes à chaleur. Et dans le cas d’un excès de production, plutôt que d’arrêter une éolienne, on peut la laisser tourner et stocker ce surplus en sous-sol pour une utilisation ultérieure. Je pense que, dans vingt ans, on aura plein de boucles de ce type, avec des synergies entre les différentes productions d’énergies renouvelables. »

En résumé…

 

Les avantages et les limites de l’anergie

L’avantage du concept

  • Fonctionne simultanément entre des producteurs de froid et de chaud.
  • Faibles pertes d’énergie entre la source d’énergie et le consommateur, ce qui permet donc à l’énergie d’être livrée sur de plus longues distances.
  • Différentes boucles peuvent se connecter entre elles.
  • Différentes sources d’énergie peuvent s’y raccorder.
  • Valorisation de la mutualisation de l’énergie entre bâtiments et entre ressources.
  • Stockage intersaisonnier et court terme possible.

 

Les difficultés

  • Plutôt adapté aux grandes infrastructures et aux projets d’envergure. Le projet doit être suffisamment grand pour permettre les échanges thermiques et le stockage d’énergie. Toutefois, un projet mené actuellement sur le site de la HES-SO
  • Valais à Sion vise à raccorder trois bâtiments seulement.
  • Réseau, sondes géothermiques, infrastructure : l’installation de réseaux thermiques de ce type est coûteuse.
  • Lors des périodes où un grand nombre d’utilisateurs rejettent du froid, l’eau peut geler à l’intérieur des tuyaux. Il est alors parfois nécessaire d’ajouter une source de chaleur externe pour réchauffer le circuit.
  • La régulation d’un tel système est complexe : y a-t-il assez d’énergie, à quel moment l’injecter, quand déstocker, etc. ? Gérer le système au mieux représente un vrai défi.
  • L’anergie demande une vision globale, pour concevoir à l’échelle d’une ville UN réseau et non DES réseaux thermiques. Mais d’autres domaines doivent intégrer les réflexions, notamment celui de la construction et de la rénovation.

 

Des exemples de réseaux anergie mis en œuvre

Projet : Campus Hönggerberg / ETH Zurich

Depuis 2013, le campus Hönggerberg de l’ETH Zurich exploite son propre réseau d’anergie, avec système de stockage souterrain. Le site accueille plus de 12 000 étudiants et membres du personnel et comprend plus de 30 bâtiments. Dans les prochaines décennies, l’objectif est de couvrir 90% des besoins en énergie via l’anergie.

Jusqu’à il y a dix ans, la chaleur était presque entièrement produite à partir du gaz naturel. En 2006, la direction de l’ETH Zurich s’est fixé un objectif de réduction de 50% des émissions de CO2 du campus d’ici à 2020, soit une économie de 5000 tonnes de CO2 par an. Dans la phase d’extension finale, le réseau anergie couvrira une grande partie de la demande de chauffage et de refroidissement.

Le 9 janvier 2020, l’ETH Zurich a reçu le prix suisse de l’énergie, le Watt d’or, pour son réseau anergie.

(Source : ETH Zurich)

 

Projet : STEP de Morges

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« Il y avait les bonnes conditions pour développer un projet anergie à cet endroit », explique Giulio Caimi, responsable Infrastructures énergétiques chez Romande Energie. « La source d’énergie était à disposition, mais pas encore exploitée. » Et la source d’énergie en question, ce sont les eaux usées issues de la station d’épuration.

Concrètement, l’énergie à basse température des eaux traitées en sortie de STEP est récupérée grâce à un échangeur thermique et transmise à un réseau à distance connecté à des pompes à chaleur. Installées directement chez les clients des bâtiments voisins, celles-ci amplifient la chaleur livrée par le réseau pour fournir du chauffage ou produire du froid de confort. Une réserve de puissance permet d’envisager le raccordement de nouveaux bâtiments dans les années qui viennent.

 

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Joëlle Loretan

Journaliste

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Pour supporter les étés qui nous attendent, transformons les îlots de chaleur urbains en îlots de fraîcheur

La moitié de la population mondiale vit en zone urbaine. Pour que les villes puissent offrir une qualité de vie soutenable durant les étés toujours plus chauds qui nous attendent, elles doivent agir vite et bien. Transformer les îlots de chaleur en îlots de fraîcheur est une étape essentielle pour maintenir l’attractivité urbaine. Politiciens, urbanistes, propriétaires : il est urgent de suivre ces quelques préceptes finalement assez simples : végétalisez, renaturez, débitumez et mettez en place plusieurs pistes intéressantes présentées ici.

Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur et pourquoi apparaissent-ils ?

Un îlot de chaleur, c’est un microclimat caractérisé par une élévation de la température diurne et/ou nocturne importante à l’échelle d’une rue ou d’un quartier par rapport aux espaces environnants. D’après des cartes d’analyse climatique zurichoises par exemple, la température mesurée dans les quartiers de la ville peut être de 6 à 7 °C supérieure à celle des zones rurales périphériques. En cause, la forte absorption du rayonnement solaire par les surfaces construites et imperméabilisées, en grande partie composées de matières minérales foncées (asphalte, gravier, briques et béton). L’air circule mal du fait de la densité du bâti ou de la mauvaise orientation des bâtiments, l’absence d’ombre et de refroidissement par évaporation qu’apporte la végétation, le manque d’espaces ouverts et enfin, la chaleur produite par l’activité industrielle, les transports et la climatisation.

La plupart des villes ayant été façonnées autour de la voiture sont aujourd’hui fortement bitumées : routes, aires de stationnement et autres aménagements gris représentent une grande partie des espaces non bâtis urbains. Pour vous convaincre, observez dans vos parcours quotidiens la place généreuse dédiée au bitume carrossable. Les espaces naturels ont été « minéralisés ». Même les cours d’eau sont parfois enfouis sous terre pour laisser place au bitume. Rajoutons à cela les nombreuses activités induites par les centres urbains et nous comprendrons l’origine des îlots de chaleurs.

Globalement, l’Europe centrale, et donc la Suisse, compte parmi les régions dans le monde où le nombre de jours tropicaux a le plus augmenté ces dernières décennies. Et le réchauffement climatique rend cette question des îlots de chaleur toujours plus urgente à traiter. Car même si nous parvenons à limiter le réchauffement climatique mondial à 2 °C à l’échelle mondiale en faisant rapidement baisser les émissions de gaz à effet de serre, il nous faudra affronter des périodes de grande chaleur. Les derniers scénarios climatiques concernant la Suisse indiquent en effet que nous devrons tout de même nous attendre à une hausse des températures estivales entre 0,9 et 2,5 °C d’ici 2050. Les années exceptionnelles sont en passe de devenir la norme : les vagues de chaleur prolongées, au cours desquelles le thermomètre franchit la barre des 30 °C l’après-midi et ne descend pas sous celle des 20 °C la nuit, passeront d’un jour par année en moyenne à 17 jours par année en 2060.

Quels sont les impacts négatifs de ces îlots de chaleur ?

Diminution du bien-être des habitants et augmentation de la mortalité

Les villes accueillent plus de la moitié de la population mondiale. Certes, tous ne vivent pas à proximité d’îlots de chaleur, mais jusqu’à ce que les villes adoptent les principes essentiels décrits ci-dessous pour réduire les îlots de chaleur, nous serons nombreux à subir les effets négatifs de ces journées et nuits trop chaudes. Car les vagues de chaleur amènent « au mieux » un inconfort général et des nuits blanches, et au pire peuvent être la cause de décès. Dans le rapport de l’OFEV « Quand la ville surchauffe », il a en effet été établi que le risque de décès lié à la chaleur augmentait significativement lorsque les températures maximales en journée dépassaient les 30 °C, même après un seul jour. La chaleur peut entraîner une sollicitation accrue du système cardiovasculaire pendant la journée. Les personnes âgées et les enfants en bas âge en particulier sont fortement touchés par l’impact sur la santé d’un épisode caniculaire avec des températures supérieures à 30 °C.

Perte de la biodiversité et diminution de la qualité de l’air et de l’eau

Les îlots de chaleur et l’absence de rafraîchissements nocturnes répétés créent un stress thermique, qui fragilise les humains les plus vulnérables. Mais pas uniquement : ces chaleurs impactent également la flore et la faune, et péjorent la qualité de l’air et de l’eau.

Perte d’attractivité des villes

Enfin, les villes qui ne prendront pas des mesures fortes afin de réduire les effets des îlots de chaleur perdront considérablement en attractivité ces prochaines décennies.

Et enfin, augmentation des besoins énergétiques pour la climatisation

Les îlots de chaleur impliquent également une augmentation de l’utilisation de climatisation qui permet de moins subir les effets de ce réchauffement mais qui contribue en même temps à renforcer ces îlots de chaleur. La consommation d’électricité à des fins de refroidissement représente chaque année environ 8 milliards de kWh (8000 GWh) en Suisse, soit 14% de la consommation totale d’électricité du pays (OFEN, 2013). Et ces chiffres ne feront qu’augmenter…

Comment transformer les îlots de chaleur en îlots de fraîcheur ?

1. Requestionnons la place centrale de la voiture en ville

Comme mentionné plus haut, la place centrale laissée à la voiture en ville a créé des villes bitumées et minérales favorisant fortement les îlots de chaleur. Réduire ces îlots de chaleur nécessite donc obligatoirement de réduire l’espace dédié aux véhicules individuels motorisés.

2. Développons une structure urbaine réfléchie et des espaces ouverts en réseau

Il s’agit tout d’abord pour les urbanistes de réfléchir à une structure du milieu bâti et non bâti qui tient compte des fortes chaleurs. Pour y parvenir, il faut par exemple laisser circuler les vents des zones périphériques vers les centres urbains qui atténuent l’effet îlot de chaleur. Les corridors d’air frais ne doivent donc pas être entravés par des bâtiments, qu’il faudrait plutôt orienter dans le sens du vent que contre celui-ci. Enfin, les espaces ouverts devraient être mis en réseau.

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3. Plantons des arbres et végétalisons

À l’ombre d’un arbre, la température diurne peut être jusqu’à 7 °C plus fraîche qu’aux alentours. Les grands arbres offrant une couronne volumineuse sont idéals. Il s’agit toutefois de choisir des espèces pouvant supporter la chaleur et la sécheresse induites par le réchauffement climatique. Les arbres sont un atout majeur pour réduire la chaleur urbaine, à la fois par l’ombre précieuse qu’ils apportent, mais aussi par leur effet « évapotranspirant ». Les arbres se comportent comme un système de climatisation parfait : une zone végétalisée bien fournie en eau est considérablement plus fraîche que les surfaces sèches voisines. Dans le cas d’un arbre d’envergure, ce sont ainsi plusieurs centaines de litres d’eau qui s’évaporent par l’intermédiaire du métabolisme végétal. De façon générale, la végétation, qu’elle soit plantée en pleine terre, en bac, en toiture ou en façade, par son effet « évapotranspiration », rafraîchit le climat urbain. Par exemple, sur les toits plats végétalisés, 50 à 70 % des précipitations annuelles peuvent retourner par évaporation dans l’atmosphère.

4. Désimperméabilisons nos sols

Les surfaces imperméabilisées accroissent l’effet d’îlot de chaleur. Sur l’asphalte, l’eau de pluie s’écoule directement dans les égouts. En revanche, sur les surfaces non- ou désimperméabilisées, elle peut s’infiltrer et s’évaporer à nouveau par la suite. Ce phénomène prélève de la chaleur dans l’air ambiant. Dans les zones exposées aux fortes chaleurs, toute forme de désimperméabilisation est bénéfique, que ce soit dans l’espace routier, les parkings, les arrière-cours, etc.

5. Donnons plus d’espace à l’eau

L’eau est un élément naturel important de plus à « utiliser » pour rafraîchir nos villes. Les plans d’eau contribuent considérablement à la régulation thermique. Le pouvoir rafraîchissant de l’eau dû à l’évaporation est encore plus efficace si l’eau est vive car le mouvement des eaux augmente la surface d’évaporation et renforce les échanges avec les couches plus profondes et plus froides. Ainsi, une rivière sera par exemple plus rafraîchissante qu’un étang. Si l’eau peut être vécue comme une expérience aquatique pour les habitants, c’est encore mieux. Par exemple : remettre à ciel ouvert des cours d’eau et les aménager pour permettre la baignade, intégrer des brumisateurs d’eau sur des places publiques, installer des fontaines à jet, etc. Enfin, la gestion des eaux pluviales doit être intégrée à la réflexion. Elle peut être modifiée pour retenir l’eau en ville, par la perméabilisation des surfaces, la canalisation naturelle et la création de bassins de rétention.

La renaturation des rives de l’Île-de-la-Suze, à Bienne est un excellent exemple. L’espace de détente qui s’étend sur 5,4 hectares, fait la part belle à La Suze. La rivière qui coulait jusqu’alors de façon monotone entre des blocs de pierre, a été transformée en cours d’eau dynamique. Des talus engazonnés et des rives plates agrémentées de plages de gravier bordent désormais la rivière. Par ailleurs, ce projet a gagné de nombreux prix.

6. Éclaircissons nos revêtements

Les milieux urbanisés sont en grande partie composés de matières minérales de couleur foncée (asphalte, gravier, briques et béton), toutes ayant ce qu’on appelle de faibles albédos. Plus l’albédo est bas, plus la surface absorbe les rayons. Et plus un matériau absorbe les rayons du soleil, plus il accumule et émet de chaleur. La multiplication de ces surfaces (routes, aires de stationnement, toits goudronnés, murs de briques, etc.) est l’un des plus importants facteurs de création des îlots de chaleur. Ainsi, l’une des stratégies est d’augmenter l’albédo des surfaces en utilisant des matériaux plus clairs ou même de peindre en blanc certaines surfaces.

À Los Angeles, à titre expérimental, la ville a repeint ses rues à l’aide d’un enduit réfléchissant de couleur claire depuis mai 2017. Les premiers résultats sont prometteurs. Selon l’agence américaine de protection de l’environnement (EPA), la diminution de la température dans une ville pourrait atteindre 0,6 °C si 35 % des rues étaient recouvertes d’un revêtement réfléchissant.

Dans le cadre du programme fédéral pour lutter contre les îlots de chaleur en ville, Sion a mis en place un projet pilote sur les revêtements routiers à la rue de la Dixence. Plusieurs types de revêtements routiers avec des teintes plus ou moins claires ont été testés durant l’été 2020. Un système de mesures de la température a évalué le comportement thermique des différents revêtements. Sion, l’une des villes de Suisse qui se réchauffe le plus, est une candidate naturelle au projet “Des revêtements routiers sans surchauffe”. Résultats en cours d’analyse.

7. Créons de l’ombre

L’ombre est un moyen efficace pour rafraîchir la ville. L’ombre projetée par les arbres est la plus efficace, mais il y a d’autres manières de créer de l’ombre : les bâtiments ou des mesures techniques et architecturales, comme les toiles solaires, les toitures, les pergolas, les toits aériens, les pavillons, etc.

8. Réduisons la production de chaleur anthropique

Les différents articles de ce blog donnent des pistes concrètes pour réduire la production de chaleur due aux activités humaines. Des pistes liées notamment à la mobilité, à la production, ou encore à la construction demandant peu de climatisation, pourront vous aiguiller.

Genève met en place une politique globale pour réduire ses îlots de chaleur

Entretien avec Bojana Vasiljevic Menoud, cheffe du service d’urbanisme de la Ville de Genève

Qu’est-ce qui vous a amené à travailler sur cette question ?

Nous nous intéressons à cette question depuis quelques années en lien avec le réchauffement climatique. Mais nous travaillons dessus intensément depuis une année, consécutivement à la déclaration d’urgence climatique du Conseil municipal et du Conseil administratif. Nous avions jusqu’à présent un manque de données scientifiques. Mais le Canton de Genève a mandaté une étude pour élaborer des cartes climatiques et a comblé ce vide. Cette étude a été publiée en décembre 2020, et des cartes sont disponibles sur le système d’information du territoire genevois (SITG). Cela fait maintenant quelques semaines que nous les analysons finement afin de mieux comprendre le phénomène d’îlot de chaleur urbain, dans la réalité d’aujourd’hui mais également dans l’avenir, vu que certaines cartes prennent en considération les projets prévus par les planifications ces prochaines années.

Qu’êtes-vous en train de mettre en place concrètement ?

La Ville de Genève est en train d’élaborer une stratégie climatique municipale qui devrait être rendue publique à l’automne 2021. Mais très prochainement et sans attendre la stratégie globale, le Conseil administratif a annoncé la mise en œuvre d’actions immédiates pour le climat pour 2021. Ces mesures concerneront aussi bien la population de la ville que l’administration municipale. Ainsi, le Conseil administratif a renforcé l’objectif d’ombrage en visant 30% de canopée d’ici 2025 pour le territoire municipal, mais cette mesure prendra forcément du temps. Dans l’immédiat, il est envisagé de créer trois micro-oasis de fraîcheur dans les quartiers où il fait le plus chaud, en partenariat avec le Canton (service du médecin cantonal et service du développement durable) et l’HEPIA. L’idée est de permettre aux personnes âgées notamment de continuer à sortir et à voir du monde même en temps de canicule. D’autres projets sont en réflexion notamment pour accroître la végétalisation et l’ombrage.

Quelles ont été les difficultés auxquelles vous avez été confrontés ?

Principalement, au niveau de la planification, nous étions confrontés à un manque de données scientifiques. L’îlot de chaleur est un phénomène complexe qu’il s’agit d’abord de bien comprendre. Ensuite, il est important de souligner que la question du climat urbain ne se limite pas à l’îlot de chaleur. Il y a d’autres paramètres à prendre en compte comme la chaleur diurne, le régime des vents, les générateurs de froid, etc.

Avez-vous imaginé un monitoring ?

Depuis une dizaine d’années nous faisons le monitoring de l’ensemble des politiques publiques à incidence spatiale. Nous avons mis en place un monitoring pour le Plan directeur communal et allons continuer à mesurer l’avancement de nos politiques et leur efficacité par rapport aux objectifs fixés.

Enfin, avec quels services collaborez-vous pour mettre en place une politique cohérente ?

La question de l’îlot de chaleur est complexe et implique forcément une collaboration transversale de nombreux services de l’administration. Je relèverais que le service de l’urbanisme collabore en priorité sur cette thématique avec le service des espaces verts, le service de l’aménagement, génie civil et mobilité, et le service de l’agenda 21.

 

Hélène Monod

Rédactrice