La bulle carbone ou la vulnérabilité au changement climatique

En 2011, le groupe de réflexion Carbon Tracker basé à Londres introduisait le concept de bulle de carbone. A l’instar d’une bulle économique, celle-ci fait référence à une potentielle perte, que d’aucuns qualifieraient de massive, de la valeur des investissements dans les énergies fossiles qui découlerait des mesures contraignantes mises en place pour limiter le réchauffement climatique (p.ex. accord lors d’une COP). On parle effectivement de bulle lorsque la valeur d’un actif est artificiellement élevée et dépasse sa valeur intrinsèque.

 

La notion de “carbone unbrûlable” voyait le jour afin de désigner l’excès de carbone émis au-delà des limites climatiques. Une partie non négligeable de ces réserves de carbone est détenue pour des sociétés cotées en bourse, d’où un risque financier probable dû à une requalification d’actifs dits échoués (stranded assets en anglais) qui détruiraient un part importante de la valeur pour des actionnaires à travers le monde.

 

Dans l’immédiat, les valorisations d’entreprises ont plutôt tendance à se baser sur les flux de trésorerie à court terme, qui sont moins susceptibles d’être affectés par des facteurs liés au climat (qui part à la dérive sur une échelle de temps plus longue). Toutefois, l’exposition variera et certaines sociétés seront mieux placées que d’autres pour résister à la faiblesse de la demande future de combustibles fossiles.

 

Dans la ligne de ce mouvement, la Réserve Fédérale américaine a récemment ordonné aux six plus grandes banques du pays de divulguer la vulnérabilité des actifs de leurs portefeuilles au changement climatique. D’ici fin juillet, elles devront montrer l’impact que le changement climatique pourrait avoir sur leurs opérations.

 

Plus précisément, ces grandes institutions financières devront étudier comment les sécheresses, les incendies de forêt, les ouragans et les vagues de chaleur prévus pourraient avoir un impact sur les biens immobiliers commerciaux et les prêts qu’elles gèrent.

 

L’analyse portera sur deux éléments. Tout d’abord, les banques devront évaluer les “risques physiques” pour les personnes et les biens ainsi que les coûts que ces risques entraîneront. Ensuite, elles devront estimer le “risque de transition”, ou le coût de la mise en œuvre de mesures appropriées pour s’adapter à ces événements climatiques. Cette mesure semble être la première réponse politique à l’inquiétude croissante des économistes quant à une “bulle de carbone” résultant du changement climatique.

 

L’immobilier est un élément central. En effet, le WEF et l’Institut européen des Terrains Urbains (Urban Land Institute Europe ULI en anglais), un réseau mondial d’experts pluridisciplinaires de l’immobilier et de l’aménagement du territoire, a récemment déclaré que “les propriétaires, les investisseurs et les évaluateurs européens n’ont pas pris en compte le coût de la transition vers la neutralité carbone (net zero en anglais), ce qui a entraîné une surévaluation généralisée des bureaux, des commerces et des immeubles résidentiels… si les coûts du risque de transition ne sont pas pris en compte dès maintenant par les propriétaires, alors le secteur pourrait être confronté à une crise majeure.”

 

Un exemple concret concerne les propriétés en bord de mer qui n’ont pas encore été évaluées en fonction de l’élévation imminente du niveau de la mer ou des améliorations nécessaires pour les protéger contre les intempéries. Elles sont déjà surévaluées. Une fois que la réalité du chaos climatique s’installera, ces évaluations ne manqueront pas de s’effondrer, comme c’est déjà le cas en Floride. Dans ce cas précis, la réponse des responsables politiques a été de laisser les contribuables payer la facture.

 

En Suisse, l’Alliance climatique, coalition de plus de 140 ONG actives dans la protection de l’environnement, a épinglé la Banque Nationale Suisse BNS qui continue d’investir dans des entreprises d’énergies fossiles. Dans l’Agefi également, il est rappelé que les risques liés au changement climatique doivent être pris en compte dans la gestion des actifs et que malheureusement, la BNS “n’inclut aucun indicateur de risque climatique dans sa stratégie de placement”.

 

Rester à la pointe signifie notamment innover et prendre les devants avant que le cadre légal ne rattrape les activités et impose des règles contraignantes. La Suisse pourrait s’inspirer de ses concurrents pour rester compétitive en la matière.

 

Sources: Climatebase Weekly, Agefi, Heidi.News

 

 

 

3 réponses à “La bulle carbone ou la vulnérabilité au changement climatique

  1. Oui, sauf que votre papier est complètement utopique.
    Les acteurs financiers connaissent très bien les conséquences et les risques qu’ils prennent (d’ailleurs, nombre d’entre eux ont acheté des bunkers en Nouvelle-Zélande ou en Suède).

    Espérer une épiphanie suivie d’un changement radical d’approche est tellement naïf que ce serait drôle si ce n’était pas si dramatique.

    Chaque jour, de nouveaux rapports indiquent que les compagnies pétrolières sont conscientes depuis des décennies de l’impact de leur modèle économique sur l’état du monde, tout comme les gouvernements et probablement toutes les banques nationales.
    Comment expliquer sinon que de petits scientifiques, parfois indépendants, aient réussi à développer de telles certitudes sur les dérives climatiques (depuis les années 70 au moins) alors que tous les puissants de ce monde prétendent ne pas l’avoir vu venir ? Et vous vous laissez berner.

    Croire en leur naïveté, c’est accepter de les dédouaner de leurs actes passés. Leur modèle est basé sur la croissance, or les économies modernes ne doivent pas seulement se réinventer, elles doivent faire table rase de toutes leurs certitudes économiques.
    Tous les modèles qu’ils utilisent, du plus simple au plus complexe, du CAPM à la loi de l’offre et de la demande en passant par Black-Scholes, sont basés sur des hypothèses de simplification insoutenables et stupides.
    Tout le monde le sait, mais nous sommes allés trop loin pour changer sans accepter un krach sans précédent.
    Un krach signifie un rebalancement de l’équilibre en place ( pour autant que nous acceptions de le qualifier d’équilibre), ils ne le toléreront jamais.
    Ils ont fait leur preuve par le passé que, quels que soient les risques et les cataclysmes, ils ne se coucheront pas sans défendre leurs privilèges, quitte à ruiner les conditions de vie sur terre.

    Tant que nous n’aurons qu’une réponse pacifique à leur violence envers les peuples et l’environnement, nous aurons perdu.
    Vos solutions sont louables et peut-être y croyez-vous sincèrement, mais il est temps d’ouvrir les yeux.

    Les puissants ne manquent pas de connaissances ou d’incitations, ils manquent d’empathie et d’altruisme. La seule façon de réinventer le système est de détruire leur pouvoir.
    Malheureusement, cela ne se fera pas sans violence. Reste à éspérer que nous le réalisions avant qu’il ne soit trop tard, mais j’en doute.

    1. Le père de Hunter vient, il y a 2 ans d’ouvrir la valse des budgets à plusieurs trillons, il y avait la valse à deux temps, à cent temps et à mille temps, nous voici aux USA dans une valse à 3 trillons de temps.

      Résultat, les investissements partent encore et toujours vers les pays les plus émetteurs de gaz CO2, sur ces 3’000 milliards imposés par Joe, vous pouvez être certain qu’un gros morceau part direct vers les fabricants de panneaux voltaïques fonctionnant avec des centrales électriques au charbon et des mines extrêmement polluantes d’extraction de néodymes dans le nord de la Chine, notamment pour les aimants indispensables à la production d’éoliennes.

      De sont coté, cette Europe encore divisée et amputée d’un budget collectif, cela malgré l’illusion d’une monnaie collective, vient d’inauguré la mode des valses à centaines de milliards de temps, la France avec un “quoi qu’il en coûte” à 580 milliards d’euros pourrait presque rendre jaloux le vieux Joe, car coté français ce n’est pas une promesse entachée d’embuches parlementaires, le jeune Emanuel annonce la facture une fois que tout est dans le sac à malices de “l’économie” nationale. Si vous multipliez les états européens également impliqués dans ce bonneteau global, vous verrez très vite que les 3’000 milliards de Joe, ont pâle figure !

      Il ne faut pas non plus oublier que seule les banques privées ont le privilège de prêter à leurs états, que les banques centrales doivent passer par ces intermédiaires plutôt gourmands, que pour chaque euro (ou dollar) emprunté par l’état, ces banques privées se garantissent un joli magot de 2 à 3% !

      Qu’en France, actuellement le budget destiné au remboursement de la dette est passé en tête de peloton, devant l’éducation nationale et que les banques privées qui empruntent parfois avec des intérêts négatifs ne se gênent pas de faire payer des intérêts supérieurs à 3% et que l’état ne rechigne pas et que la population n’a pas encore bien compris ce qu’il se passe dans les couloirs des réseaux restreints du pouvoir !

      Les banques centrales sont privées, elles peuvent émettre autant que les états les autoriseront, cela tant que les banques privées pourront se garantir des marges arrangées par les mêmes qui creusent des abysses dans les budgets étatiques.

      En fait, plus les états s’endettent et plus les banques privées prospèrent et comme ils ne savent rien faire de cet argent, ils organisent des solutions de crédits à tout va !

      Tout le monde est content, plus votre état sera endetté et plus les banques privées vous donneront des crédits, que demande le peuple ?

  2. Il faut vite arrêter, ces inepties soi-disant économique ne vont que faire migrer les investissements vers des pays comme la Chine qui est devenue la plus émettrice de CO2 de la planète.

    Et puis, entre les intentions et la réalité, y a un monde, il suffit de voir les sanctions contre la Russie et la quasi totalité de ses exportations qui passent par des pays tiers avec des marges plus que raisonnables.

    La Chine émet environ 30% du CO2, plus de deux fois plus que les USA, finalement, la capacité d’émission de CO2 ne serait-il pas devenu le premier critère de choix pour orienter les investissements ?

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