L’école de demain ou la tentation du repli sur soi

Dans une démarche participative, l’UNESCO interroge les problématiques clés du futur de l’éducation https://fr.unesco.org/futuresofeducation/ en vue d’un nouveau Rapport mondial. L’initiative est évidemment associée au contexte de crise actuel, avec le rappel que l’apprentissage et la connaissance comptent parmi les ressources clés dont dispose l’humanité pour anticiper les défis, favoriser la résilience et envisager de nouvelles alternatives.

Dans un monde complexe, aux contours imprévisibles, impacté aujourd’hui par une crise globale, l’éducation avance elle aussi à tâtons, formule des hypothèses qu’elle interroge à intervalle régulier. Avec des moments où l’on croit savoir, où l’on se sent presque euphorique, donc très intelligent. Et d’autres où l’on n’est pas sûr de tout comprendre, où l’on se sent un peu niais et on aimerait bien savoir dans quelle direction le vent souffle.

C’est d’autant plus délicat que l’éducation semble aujourd’hui portée par une diversité sans fin de vents et courants. Avec ce réflexe devenu primaire, d’en faire le lieu d’apprentissage de toute une série de « fausses bonnes idées », certes souvent généreuses et dignes d’intérêt, mais que l’on confie à l’école, plus par défaut, opportunisme ou commodité que par nécessité, besoin ou exigence. « Etre dans le vent, l’ambition d’une feuille morte » avait écrit Gustave Thibon. Ballotée au gré des modes ou de tendances éphémères, l’éducation offre peu de consistance et de lisibilité pour le grand public. Un peu comme ces vagues qui déferlent les unes après les autres et disparaissent dans l’écume de l’illusion ou de la vanité qui les a fait naître.

Dans le contexte de l’après-pandémie Coronavirus/Covid-19, les pressions sur le système éducatif pour prendre en charge l’ensemble des maux que la pandémie aura fait resurgir ou résoudre les défis qu’elle aura révélés, seront très fortes. Parmi celles qui m’effraient le plus, la tentation de stigmatiser toute forme de mondialisation, de se réfugier dans un localisme protecteur ou de se recroqueviller à l’intérieur de nos frontières connues.

Certes il s’agira d’entendre les appels à la vulnérabilité de notre planète, le besoin de renouer avec des écosystèmes plus locaux, de développer des alternatives à la croissance spéculative, mais pas par effet d’aubaine, avec le souci de les inscrire dans des missions éducatives durables et porteuses de sens. Nul doute que le déconfinement à venir sera aussi celui du déconfinement des esprits et des clochers, même si cela n’ira peut-être pas jusqu’à cette « nouvelle humanité» que d’aucuns espèrent. Dans tous les cas le repli sur soi et nos frontières serait la pire des réponses.

Du coup quelles ambitions pour l’éducation de demain ? Sans aucun doute de davantage favoriser la collaboration et l’échange à tous les niveaux. Inspirée par cette ambition l’éducation deviendra cette ressource-clé qui contribuera au renforcement du sentiment d’appartenance à une même planète et un destin commun. L’apprentissage de la compréhension mutuelle, du décentrement et de la nécessité de coopérer commence très jeune. Là les systèmes éducatifs ont un rôle essentiel à jouer.  Par exemple en insistant sur la dimension interculturelle dans les plans d’études, en multipliant les possibilités d’échanges avec d’autres jeunes, les opportunités de collaboration et en permettant aux personnes en formation de voyager intelligemment. Les crises, on l’observe, mettent à mal les cohésions et les solidarités internationales, elles résistent d’autant mieux lorsqu’elles sont durables et bien ancrées dans nos sociétés.

Pour les institutions et les enseignants, les échanges et le réseau seront sans doute les clefs de l’école de demain. Ce qui signifie la faculté à échanger l’information comme aptitude et le réseau comme ressource. En lieu et place d’entités isolées ou de groupes d’enseignants esseulés, c’est des communautés apprenantes qui devront être bâties. Les outils digitaux, numériques, ont montré durant cette crise toute la palette de possibilités et d’usages qu’ils peuvent offrir pour contribuer à renforcer la collaboration et les coopérations, même à distance très lointaine. Bien utilisés ils ne peuvent que servir les intérêts de l’éducation et du devenir de notre société.

L’éducation de demain ne sera pas globale, au sens d’une globalisation ou mondialisation réduite à sa seule expression économique, mais internationale et interculturelle. Avec en toile de fond et corollaire de cette indispensable solidarité et cohésion dans le monde, la réduction des inégalités économiques et l’effacement des discriminations sociales ou ethniques, qui devront eux aussi légitimer les actions futures de l’éducation. Une école face au vent!

Olivier Tschopp

Olivier Tschopp est directeur de Movetia, l'agence nationale pour la promotion des échanges nationaux, ainsi que des coopérations et mobilités internationales. Tour à tour enseignant, directeur d'école, puis secrétaire général d'un département, il connait parfaitement le système éducatif et le contexte institutionnel suisse. Ses choix professionnels sont étroitement liés au change management et ses motivations le poussent à relier les frontières (inter)culturelles.

8 réponses à “L’école de demain ou la tentation du repli sur soi

  1. L’éducation est la priorité de toutes dictatures et démocratures, ça parle de nationalisme, et non d’un monde dans une idéologie bisounours.
    Pour ces pays, l’éducation forme les élites de demain, dans un monde de confrontations idéologiques.

    La Chine éduque dans un nationalisme exacerbé (il n’est pas le seul), d’autre dans une religion exacerbée, souvent l’islam,…

    On ne va pas vers un monde meilleurs, mais de concurrences féroces avec des puissances comme la Chine qui n’ont pas de complexe à étouffer les droit de l’Homme.

    Bref, la réalité ne ressemble pas à la vision d’intellectuels de gauche, en tout cas pour ce siècle. Dans ce combat entre puissances (USA, Chine, Russie, Inde,…), je reste surpris de cette constante naïveté des bobos.
    On peut améliorer le monde en tenant compte de la réalité, pas en se shootant à la guimauve.

    1. Bisounours, intellectuel de gauche, bobo, addict de la guimauve,… je passe sur la série de compliments et les quelques raccourcis de votre réponse, mais admettons que ce soit vrai et que vous n’ayez pas tort de le penser, c’est quoi l’alternative à la coopération selon vous ?

  2. Je suis étonnée de voir que les enfants doivent apprendre énormément par coeur sans appliquer ces connaissances, qui sont vite oubliées parce qu’elles ne sont pas activement entraînées dans un contexte intéressant. Par exemple, ils apprennent du vocabulaire et des accords mais ne parlent pas ni n”écrivent de textes pendant de nombreuses années. Ils apprennent aussi des définitions par coeur. L’enfant apprend le mieux à parler en parlant, de même il pourrait apprendre à lire et à écrire des textes en le pratiquant.

    1. C’est un peu comme pour les langues, leur apprentissage semble un peu vain si ces mêmes langues ne sont pas activement entraînées et mises en contexte. Dans mon activité professionnelle – movetia.ch – nous essayons justement de promouvoir les échanges dans un autre contexte culturel ainsi que des expériences d’immersion. Cela dit, même si certains trouvent que la mémorisation est encore trop valorisée, d’autre craignent à l’inverse sa disparition dans l’enseignement, défendant les compétences et aptitudes qu’elle développe chez la personne en formation. Le problème du “contexte d’apprentissage” est à mon sens plus celui de la grille horaire et du découpage artificiel des matières en blocs disciplinaires trop rigides. La Finlande par exemple envisage de mettre fin au traditionnel « enseignement par matière » afin de se tourner vers « l’enseignement par sujet ». Pour le système éducatif, cela signifie la fin des éternelles « matières classiques » comme les mathématiques ou la littérature. Les cours seront portés autour d’un sujet, choisi pour sa pertinence, et donneront aux élèves les clés nécessaires afin de travailler sur des cas concrets et pratiques ensemble.

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    Thank You.

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    Thank You,Merci,شكرا.

  5. L’illustration en dit long sur la fabrication du consentement… même exprimé avec art, le choix de fermer les yeux de notre vrai regard, de ne pas vouloir voir la vérité en face… et être dominé… tatoué… pucé… par l’œil unique… ah… seuls sauront être dignes ceux qui œuvrent, insignifiants, en catimini, au plus grand dam de Sauron, dont le règne prend fin, sous nos yeux enfin ouverts !…

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