Guy Parmelin et la guerre des sexes

Que proposait l’actuel Ministre du Département de l’Economie pour lutter contre le chômage quand il était député au Grand Conseil vaudois? Pour le savoir, on va  effectuer un petit retour en arrière de 20 ans et reproduire ci-dessous un article de Jean-Marc Rapaz daté de janvier 1999. Couple de fonctionnaires, prenez garde: Pour libérer des places dans l’administration, ce parlementaire UDC (ndlr. Guy Parmelin) imagine de limiter à 150% le taux d’activité pour les couples dont les deux membres sont employés par l’Etat. Autrement dit, si un des conjoints travaille à plein temps, l’autre ne pourrait être occupé à plus de 50%.

 

Partage du travail à l’Etat: un député prêt à rallumer la guerre des sexes

Pour lutter contre le chômage, un parlementaire propose de limiter à 150% le taux d’activité des couples dont les deux membres sont employés par le canton. Une initiative qui fait bondir la déléguée à l’égalité.

RAPAZ JEAN-MARC

Un affreux macho? Le député rollois Guy Parmelin aura beau se défendre, il risque d’en entendre des vertes et des pas mûres avec la proposition qu’il s’apprête à défendre devant le Parlement en mars. Son idée part pourtant d’un bon sentiment: lutter contre le chômage. Comment? C’est bien là que le bât blesse. Pour libérer des places dans l’administration, ce parlementaire UDC imagine de limiter à 150% le taux d’activité pour les couples dont les deux membres sont employés par l’Etat. Autrement dit, si un des conjoints travaille à plein temps, l’autre ne pourrait être occupé à plus de 50%. Réaction de Nicole Golay, déléguée vaudoise à l’égalité entre les hommes et les femmes: «C’est pas vrai. Il ose proposer ça, c’est complètement discriminatoire!»

Pour la déléguée, nul doute en effet que l’application de pareil projet se ferait sur le dos des femmes: «Il ne faut pas se leurrer. Dans la plupart des cas, ce sont elles qui trinqueront. Vous savez, on considère toujours le salaire de l’épouse comme un revenu d’appoint.»

L’exemple valaisan

Des propos confirmés par Valérie Kelly-Voullioz, déléguée à l’égalité du canton du Valais où un projet similaire à celui de Guy Parmelin a été rejeté début 1998: «Nous avions combattu très fort cette idée. Dans la mesure où c’est la femme qui doit renoncer à un emploi plein temps dans 99% des cas, cette proposition est parfaitement discriminatoire et donc contraire à la loi sur l’égalité.»

«Attention, mon postulat demande simplement à ce que l’on étudie la question, rétorque Guy Parmelin. Bien sûr, il faudra veiller à ce que ce ne soit pas discriminatoire. Je ne vise pas du tout le travail des femmes. Je suis parti du même principe que pour l’AVS où un célibataire touche une rente complète alors qu’un couple ne bénéficie que d’une rente à 150%.»

Idéalement, il faudrait aussi appliquer cette initiative aux concubins ainsi qu’au secteur privé, poursuit cet agriculteur qui a épousé une enseignante: «Actuellement, ma femme travaille à 70%. Mais je l’ai déjà prévenue, elle devra peut-être passer à mi-temps un jour.» Et Guy Parmelin de lancer un dernier argument en faveur de son projet: «La gauche plaide toujours pour le partage du travail. Il faut essayer d’être constructif. Si l’on pouvait libérer des postes, sans augmenter la masse salariale de l’Etat, le projet ne peut pas être négatif.»

«Pour les hauts revenus»

Guy Parmelin n’est pas isolé dans sa croisade. Plusieurs députés soutiennent son postulat, dont le municipal lausannois Daniel Brélaz: «Je ne dis pas qu’il faut le faire. Mais on peut au moins étudier cette idée. Bien sûr, on risque de créer des inégalités entre les couples employés par l’Etat et ceux dont un des conjoints travaille au canton et l’autre dans le privé, concède l’écologiste. Il n’empêche que l’idée n’est pas aussi absurde que ça, notamment pour les hauts revenus. Deux professeurs de gymnase qui gagnent chacun 11 000 à 12 000 francs, ça fait beaucoup. En temps de crise, il faut aussi reconnaître que le chômage est un problème très délicat.»

Associations partagées

Du côté des associations du personnel, on est divisé. Michela Bovolenta, du Syndicat des services publics, réagit d’abord en tant que femme: «C’est totalement contraire à la loi sur l’égalité. Bien sûr, on pourrait imaginer que chacun dans le couple passe à 75%, mais dans la réalité, ça ne se passe pas comme ça.»

Président de la Société pédagogique vaudoise et député écologiste, Philippe Martinet a une autre approche: «La SPV est très concernée puisqu’il y a beaucoup de couples d’enseignants. J’ai signé ce postulat. Certes, nous sommes pour le droit au travail. Mais il faut aussi admettre que le droit au double emploi est discutable en période de chômage. Le postulat de Parmelin constitue un élément de réflexion sur le partage du travail.»

Nicole Golay, déléguée vaudoise à l’égalité: «Il ne faut pas se leurrer. Dans la plupart des cas, ce sont les femmes qui trinqueront.»

Julien Rilliet

Ayant été au centre de diverses campagnes nationales et après avoir été le chargé de campagne du parti socialiste vaudois, Julien Rilliet s’est spécialisé dans la communication politique. Désormais à la tête de sa propre entreprise de consulting, il porte un regard amusé sur la politique d'ici et d'ailleurs et la façon dont ses principaux acteurs tentent de la réinventer.

3 réponses à “Guy Parmelin et la guerre des sexes

  1. La vision du monde de cet homme se retrouve parfaitement dans sa citation : «Actuellement, ma femme travaille à 70%. Mais je l’ai déjà prévenue, elle devra peut-être passer à mi-temps un jour.»
    Sauf qu’il est, comme vous le soulignez, ministre de l’économie depuis le 1er janvier… Super pour nous les femmes ! Que peut on faire ?

  2. Malheureusement pour vous,Mme,la Suisse c’est un pays plus macho encore que la France voisine, et l’écrasante mayorité parlamentaire de droite à l’Asamblée Fédéral,dont les femmes sont aussi très minoritaires,ne permet pas du tout être optimistes jusqu’à…la fin de l’autoroute à Brigue,2050?
    Le parti qui gére l’agenda, l’UDC,a encore une longue vie en tête,c’est la voloné des électeurs et …pas mal d’électrices!A l’instar de Trump,plebiscité en dépit de son mépris pour les femmes

    rafael

  3. J’essaie d’être positif à ce sujet. Cela ne signifie-t-il pas que notre actuel ministre de l’Économie était en faveur d’une réduction de 25 % du temps de travail ? Donc une semaine de travail de 31,5 heures….
    Moins qu’en France ! C’est courageux.
    😉

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