Sun Tzu parle aux dirigeants stratèges

Sun Tzu 2020 – Les forces de la raison – Chapitre 8 : Les neuf variables d’ajustement

Sun Tzu -Maîtres et dirigeants - Les forces de la raison

Ce huitième chapitre – sur les treize que compte le traité -, rappel certains principes généraux abordés dans les précédents chapitres ; s’ajoutent à ces variables, les facteurs psychologiques et postures comportementales d’un Commandant.

Son titre peut aussi être : ‘Des neuf changements’ ; ‘Les neuf variables’ ou ‘Les neuf retournements’ selon ses interprètes.

Il est écrit :

  Ordinairement l’emploi des armées et la mobilisation générale relève du commandant en chef soumis au mandat du souverain. Le rassemblement des forces sera inévitablement soumis à des prérequis géographiques et topographiques.

  Il y a cinq configurations de terrains parmi les neuf types d’adaptations (neuf ‘changements‘ ou neuf ‘circonstances principales‘) :

 

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  Voilà ce qu’on appelle les neuf changements ou les neuf circonstances principales qui doivent vous engager à adapter la contenance et la position de votre armée, à changer de situation et de lieux, à attaquer ou à vous défendre, à agir ou à vous garder de tout mouvement.

  Jamais un général ne doit agir avec dogme et déterminisme, aucun système empirique ni principe ne tient devant les variables d’ajustement liées aux circonstances changeantes. Si les principes peuvent être importants en eux-mêmes, leurs applications peuvent les rendre mauvais.

  Un grand général doit savoir l’art des changements. S’il s’en tient à une connaissance vague de certains principes ; à une application routinière des règles de l’art et une certaine connaissance de la topographie ; si ses méthodes de commandement sont dépourvues de souplesse, s’il examine les situations conformément à quelques schémas, s’il prend ses résolutions d’une manière mécanique, il ne mérite pas de commander.

  Un fin stratège prend toujours en compte dans ses supputations, chaque avantage et inconvénient d’une option. En tenant compte des facteurs favorables, il assure la viabilité de ses plans. En tenant compte des facteurs défavorables, il écartera ou résoudra les difficultés.

On contraint les princes par la menace, on les enrôle par des projets, on les fait accourir par des promesses.

  Le stratège sait employer à propos certains artifices pour tromper l’ennemi, tout en sachant se tenir sans cesse sur ses gardes pour n’être pas trompé lui-même. Il ne doit ignorer aucun des pièges qu’on peut lui tendre, il doit pénétrer tous les artifices de l’ennemi, de quelque nature qu’ils puissent être, mais il ne doit pas pour cela vouloir deviner. Sans cela, dupé à votre tour vous prenez le risque d’être la victime de conjectures précipitées.

  Tenez-vous sur vos gardes, voyez-le venir, éclairez ses démarches et toute sa conduite, et concluez. En matière militaire et stratégique, il est un principe de ne pas supposer que l’ennemi s’abstiendra de venir, mais de se préparer à lui faire face, mieux, faire en sorte qu’il ne puisse attaquer.

  Travaillez sans cesse à susciter des peines à l’ennemi. Vous pourrez le faire de plus d’une façon, mais voici ce qu’il y a d’essentiel en ce genre.

  N’oubliez rien pour lui débaucher ce qu’il y aura de mieux dans son parti: offres, présents, avantages et promesses.

  Poussez les gens d’honneur au service de votre adversaire à des pratiques ou attitudes honteuses et indignes de leur réputation, à des actions dont ils aient lieu de rougir quand elles seront sues, et ne manquez pas de les faire divulguer. Entretenez des liaisons secrètes avec ce qu’il y a de plus vicieux chez les ennemis; servez-vous-en pour aller à vos fins, en leur joignant d’autres vicieux.

  Divisez leur gouvernement, semez la dissension parmi leurs chefs et créer une rupture de confiance entre chefs et subalternes en leur fournissant des sujets de colère ou des promesses contradictoires.

Les cinq plus grands défauts d’un commandant sont :

Le premier est une trop grande ardeur à affronter la mort; ardeur téméraire qu’on honore souvent des beaux noms de courage, d’intrépidité et de valeur procède le plus souvent d’un manque de discernement et d’un instinct suicidaire.

On se croit nécessaire à l’armée entière; on n’aurait garde de s’exposer; on n’oserait pour cette raison se pourvoir de vivres chez l’ennemi; tout fait ombrage, tout fait peur; on est toujours en suspens, on ne se détermine à rien, on attend une occasion plus favorable, on perd celle qui se présente, on ne fait aucun mouvement; mais l’ennemi, qui est toujours attentif, profite de tout, et fait bientôt perdre toute espérance à un général ainsi prudent. Il l’enveloppera, il lui coupera les vivres et le fera périr par le trop grand amour qu’il avait de conserver sa vie.

Le troisième est une colère précipitée. Un général qui ne sait pas se modérer, qui n’est pas maître de lui-même, et qui se laisse aller aux premiers mouvements d’indignation ou de colère, ne saurait manquer d’être la dupe des ennemis. Ils le provoqueront, ils lui tendront mille pièges que sa fureur l’empêchera de reconnaître, et dans lesquels il donnera infailliblement.

La calomnie facile : un sens de l’honneur qui frise la susceptibilité est facile à provoquer. Un habile stratège ne doit pas se piquer mal à propos, ni hors de raison. A vouloir réparer un honneur légèrement blessé, on en perd quelquefois toutes ses ressources.

S’il croit que son honneur est blessé, et qu’il veuille le réparer, que ce soit en suivant les règles de la sagesse, et non pas les caprices d’une mauvaise honte.

Ce cinquième point concerne une trop grande complaisance ou une compassion trop tendre pour ses soldats. Un chef qui n’ose punir, qui ferme les yeux sur le désordre, qui craint que les siens ne soient toujours accablés sous le poids du travail, et qui n’oserait pour cette raison leur en imposer, est un chef propre à tout perdre. Il faut toujours avoir quelque occupation à donner et faire en sorte qu’ils ne soient jamais oisifs. Savoir punir avec sévérité, mais sans trop de rigueur en procurant des peines et du travail, mais jusqu’à un certain point.

  En conclusion, un général doit se prémunir contre tous ces dangers. Sans trop chercher à vivre ou à mourir, il doit se conduire avec valeur et avec prudence, suivant que les circonstances l’exigent.

En matière de gouvernance, si ces derniers cinq traits de caractère sont de graves défauts, leurs conséquences peuvent aussi entraîner la perdition d’une armée et l’anéantissement d’un état.

Fin du chapitre VIII

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