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Top 20 des meilleures séries de tous les temps

Le quotidien Le Temps célèbre son vingtième anniversaire. L’occasion d’établir un classement (subjectif) des vingt meilleures séries diffusées des années 50 à aujourd’hui.

Exercice complexe pour ne pas dire absurde que celui d’effectuer un classement définitif d’œuvres artistiques. Mais le vingtième anniversaire du Temps valait bien une introspection collective et s’avère l’occasion idéale de rendre hommage à de grandes séries. Deux critères objectifs ont guidé l’auteure de ces lignes dans le choix des œuvres figurant dans ce top 20 : avoir marqué le genre et posséder d’exceptionnelles qualités narratives et formelles. Le reste est une question de goût et l’expression la plus subjective du cœur.

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20. Band of Brothers (2001)

Diffusée sur HBO, la mini-série de Steven Spielberg et Tom Hanks raconte l’histoire vraie des soldats de l’Easy Company, un Régiment d’infanterie parachutée qui s’est illustré durant la Seconde Guerre Mondiale. Les dix épisodes retracent le parcours héroïque de ces frères d’armes, de la préparation du débarquement en Normandie à la prise du dernier bastion du Troisième Reich, à Berchtesgaden.

Une épopée au coût alors inédit de 125 millions de dollars qui permet de vivre l’horreur du conflit de l’intérieur. De facture classique, la série a autant marqué par ses rebondissements déchirants et ses scènes de combat filmées caméra à l’épaule que par le témoignage bouleversant des survivants du Régiment qui ouvre chaque épisode.

Note : en 2010, Tom Hanks et Steven Spielberg dévoilaient une mini-série de guerre tout aussi réussie et multirécompensée : The Pacific.

 

19. Dream On (1990)

Deuxième série de HBO, un an après Tales from the Crypt, la sitcom des créateurs de Friends est pionnière à de multiples titres. Ce Sex and The City au masculin, qui raconte l’histoire d’un jeune éditeur à New York, a posé les jalons de la liberté de ton qui permit à la chaîne cryptée d’être novatrice durant une dizaine d’années. Au menu : psychologie masculine, humour grivois et beaucoup de sexe. Contre toute attente, la majorité des épisodes de cette série qui serait considérée aujourd’hui outrageusement sexiste est réalisée par des femmes, une première.

Enfin, Dream On est une déclaration d’amour à la télévision : des extraits de séries et films des années 1930 à 50 illustrent métaphoriquement les pensées du héros, une idée de John Landis qui réalise une vingtaine d’épisodes, dont l’excellent The Second Greatest Story Ever Told mettant en scène Mimi Rogers, David Bowie et Sylvester Stallone. Les créateurs ont eu l’intelligence de tirer la prise, lorsque la chaîne a commencé à rhabiller les actrices et insérer des rires enregistrés.

 

18. The Prisoner (1967)

Minisérie britannique diffusée sur ITV, The Prisoner a marqué une génération de téléspectateurs et reste culte (l’expression « Je ne suis pas un numéro » est entrée dans le langage courant). La dystopie de Patrick McGoohan met en scène un agent secret retenu dans un village étrange, où il se voit attribuer le numéro 6.

Un univers kafkaïen dont le style surréaliste, mêlant symbolisme et science-fiction, reste profondément ancré dans son époque. Mais un demi-siècle après sa diffusion, cet ovni télévisuel, symbole de la contre-culture, n’a rien perdu de sa pertinence politique.

 

17. Boston Legal (2004)

Diffusée sur ABC, Boston Legal est considérée à juste titre comme la meilleure série judiciaire. L’œuvre maîtresse de David E. Kelley se distingue par son décalage inimitable. Les affaires traitées par les avocats de l’étude Poole, Crane & Schmidt sont aussi loufoques qu’improbables. Un parti pris burlesque qui permet d’aborder les sujets de société les plus graves avec un supplément d’humanité.

Centrée sur l’amitié qui lie deux maîtres du barreau, interprétés avec génie par James Spader et William Shatner, la série excelle dans l’humour débridé, la satire politique et la métaréférence. Ses plaidoiries brillantes et la conversation existentielle sur le balcon qui clôt chaque épisode ont scellé sa légende.

 

16. Mad Men (2007)

Diffusée sur AMC, la série de Matthew Weiner a réussi à s’imposer comme un phénomène culturel majeur, après des débuts confidentiels. L’œuvre centrée sur la crise identitaire d’un publicitaire dans le New York des années 60 – allégorie des maux des Trente Glorieuses – a su gagner en maturité au fil des saisons, jusqu’à acquérir une densité rarement égalée.

La reproduction de chaque détail historique sert ici de seul écrin à l’étude de personnages torturés, poursuivis par leurs démons. Fondamentalement sombre malgré quelques fulgurances comiques, Mad Men reste l’une des séries qui aura le plus magistralement cerné les enjeux humains et sociaux complexes d’une époque charnière et, plus généralement, les affres de l’existence.

 

15. Downton Abbey (2010)

Fresque historique diffusée sur ITV1, Downton Abbey suit la vie d’une famille aristocratique anglaise et de leurs domestiques, à l’aube du XXème siècle. Une carte postale idyllique de la société victorienne qui a su jouer habilement sur la nostalgie de valeurs révolues.

Les qualités narratives, la richesse des personnages, la mise en scène somptueuse, l’humour exquis et le jeu parfait des acteurs ont érigé la série au rang d’institution. Durant six saisons, les spectateurs ont suivi avec passion cette saga qui a su mêler la grande et la petite histoire et a eu l’intelligence de s’inviter dans l’intimité des familles en diffusant chaque réveillon un épisode spécial de 90 à 120 minutes qui voit les Crawley et leurs domestiques célébrer Noël dans la plus pure tradition.

 

14. The Killing (2011)

Adaptée du polar danois Forbrydelsen, la série diffusée sur AMC a marqué le genre par son atmosphère sombre, son intensité dramatique et l’alchimie miraculeuse de son tandem d’acteurs principaux. L’énigme policière n’est ici que prétexte à suivre des âmes errantes et à se plonger dans un univers sépulcral, allégorie des tourments intérieurs des personnages.

Joel Kinnaman, révélé par ce rôle, et Mireille Enos sont étourdissants de talent et leur alchimie crève l’écran durant 44 épisodes, faisant de ce duo l’un des plus inoubliables de la télévision. À noter la prestation éblouissante de Peter Sarsgaard dans la saison 3.

 

13. Monty Python’s Flying Circus (1969)

Diffusée sur BBC One, la série des Monty Python mêlant sketches, parodies d’émissions et reportages improbables a marqué la télévision par son humour burlesque typiquement anglo-saxon, le nonsense. 45 épisodes de pur délire irrévérencieux qui se distinguent tant par leur folle créativité formelle (entreprise de démolition de la structure narrative des séries) que par la qualité de leur discours satirique.

Une critique au vitriol de la société britannique que les Monty Python ont poursuivie sur grand écran, dans la trilogie Sacré GraalLa vie de BrianLe sens de la vie. Le générique, chef-d’œuvre à lui seul, illustre à la perfection le génie de ses auteurs (le billet consacré au générique).

 

12. Alfred Hitchcock Presents (1955)

Anthologie diffusée sur CBS et NBC (The Alfred Hitchcock Hour prend le relai de 1962 à 1965), la série d’Alfred Hitchcock est une perle d’humour noir. Le réalisateur britannique, alors au sommet de sa carrière, y décline à l’infini le thème du crime parfait.

Conçus comme un laboratoire cinématographique, les 268 épisodes de cette série à petit budget permettent au maître du suspens et à quelques jeunes gens prometteurs (Robert Altman, Sydney Pollack) de déployer leurs talents narratifs et de mise en scène. Certains épisodes (Hitch en a réalisé 18) comme Lamb to the Slaughter ou le pilote Revenge sont des références du genre. Le générique, l’introduction absurde et la morale sarcastique de chaque histoire ont également contribué à la légende de Hitchcock.

Pour en savoir plus : billet de blog consacré au générique

 

11. The Office (2001)

Parodie de documentaire diffusée sur BBC Two, la sitcom britannique de Ricky Gervais et Stephen Merchant a bouleversé les codes par sa forme inédite et un cynisme inégalé. Durant 14 épisodes, cette satire sociale, critique du libéralisme, suit le quotidien des employés de bureau d’une usine de fabrication de papier, dirigés par un patron minable qui passe son temps à faire des blagues douteuses pour se faire apprécier.

Tout le génie de la série réside dans la capacité de la caméra – que les personnages ne perdent jamais de vue – à éclairer l’angle mort des interactions sociales, captant la part de médiocrité de chaque être qui se manifeste au sein du microcosme de la vie de bureau. The Office été adaptée dans sept pays (la version américaine, délirante et moins caustique, est tout aussi culte) et Ricky Gervais a récemment porté son personnage sur grand écran.

Note : les amateurs apprécieront la série Extras du même duo, diffusée dès 2005 sur BBC Two et HBO.

 

10. The Knick (2014)

Diffusée sur Cinemax, The Knick est la première série de Steven Soderbergh et l’incursion la plus impériale, avec Twin Peaks, du cinéma dans le genre sériel. Profitant de la carte blanche qui lui était offerte, le réalisateur a fait le pari de partis pris formels audacieux et livre une leçon de mise en scène. Comme le film Barry Lindon, The Knick est entièrement filmée à la lumière naturelle et offre une galerie éblouissante de plans picturaux.

La série en costumes qui raconte la naissance de la chirurgie moderne devait suivre ses personnages sur un demi-siècle. Hélas, elle a été annulée après deux saisons seulement, l’audience s’avérant insuffisante au regard du budget investi. Une tragédie qui n’a pas empêché Soderbergh de produire un autre chef-d’œuvre, The Girlfriend Experience (billet consacré à la série), avant de repasser derrière la caméra pour une nouvelle expérience, narrative cette fois : la mini-série Mosaic.

 

9. Masters of Sex (2013)

Diffusée sur Showtime, la série raconte l’histoire vraie du couple pionnier de la recherche sur la sexualité, dans l’Amérique puritaine des années 50 et 60. Contrairement à ce que son titre et son générique peuvent laisser penser, Masters of Sex n’a rien de racoleur. L’intrigue, centrée sur l’histoire amoureuse de Virginia Johnson et William H. Masters, décrit avec finesse les mutations de la société et les balbutiements du féminisme.

Sa mise en scène brillantissime (chaque épisode est un univers singulier, souvent théâtral, porteur d’un discours distinct), la qualité de son écriture et son duo d’acteurs éblouissant (Michael Sheen en tête) concourent à faire de cette œuvre l’une des plus abouties de son temps.

 

8. In Treatment (2008)

Adaptation de la série israélienne Betipul (déclinée dans quinze pays), In Treatment a pulvérisé les codes de l’intrigue hollywoodienne en faisant le pari du huis clos psychothérapeutique. Chaque épisode d’une vingtaine de minutes suit la consultation hebdomadaire d’un patient ou d’un couple, du lundi au jeudi. Le vendredi étant réservé à la séance du thérapeute chez sa superviseure.

Le rituel qui se répète durant neuf semaines permet d’entrer dans l’intimité poignante de chaque personnage et de mesurer son évolution, non sans maintenir le spectateur en haleine par ce schéma inédit de cliffhanger (fin ouverte). La mise en scène dépouillée offre des moments d’émotion brute, portés par le jeu époustouflant des acteurs. Dans le rôle du psychothérapeute, Gabriel Byrne est magistral. Face à lui, l’Australienne Mia Wasikowska (révélée par la série) crève l’écran dans la première saison.

 

7. Rectify (2013)

Diffusée sur Sundance Channel, Rectify est une œuvre incomparablement délicate et sensible. Durant 30 épisodes de grâce contemplative, le spectateur suit le lent retour à la vie d’un homme libéré après avoir passé dix-neuf ans dans le couloir de la mort. Le regard lunaire que porte Daniel (fabuleux Aden Young) sur le monde est un miroir déchirant de la violence de la société et de son incapacité à absorber la différence.

Alternant scènes de contemplation sensorielle, scènes oniriques et scènes de tragédie insoutenable – indifféremment belles à pleurer, Rectify est autant un plaidoyer contre la peine de mort qu’une ode sublime à la vie.

 

6. Twin Peaks (1990)

Un quart de siècle après la diffusion choc de ses deux premières saisons sur ABC, la série d’avant-garde de David Lynch et Mark Frost a démontré en 2017 qu’elle n’avait rien perdu de sa capacité à stupéfier, éblouir et montrer la voie. La mère de toutes les grandes séries d’auteur contemporaines jetait un nouveau pavé dans la mare en montrant qu’une série expérimentale (expérience esthétique et narrative pure) a sa place à la télévision, à l’heure où le genre peine à se dépasser et les initiatives ambitieuses se heurtent aux impératifs de rentabilité.

Objet de culte et de débat gageant de son génie, cette œuvre totale, que David Lynch voit comme un long film, reste par essence télévisuelle, les épisodes étant segmentés et le temps de respiration entre chaque diffusion hebdomadaire invitant à la réflexion et au rêve. Une leçon qui inspirera à n’en pas douter de nouvelles générations d’auteurs.

Pour en savoir plus : billet de blog consacré à la série

 

5. The Wire (2002)

Souvent considérée comme la meilleure série de tous les temps, malgré des audiences confidentielles, The Wire a marqué le genre par sa densité et son ambition. Cette fresque sociale et politique de David Simon suit les efforts de la police de Baltimore pour démanteler un réseau criminel tentaculaire.

Conçue comme une œuvre littéraire balzacienne, la série prend le temps de s’attacher à ses personnages et emprunte à la tragédie grecque pour décrire les effets destructeurs du capitalisme sur une ancienne ville industrielle, emblème de la dissolution du rêve américain. Les individus que suit The Wire n’ont aucun contrôle sur leur destin, aspirés par un système qui les broie. Passionnante et remarquablement interprétée, cette série de HBO reste la plus aboutie du genre.

Note : David Simon développe actuellement un projet de mini-série historique sur la guerre civile espagnole.

 

4. Atlanta (2016)

Diffusée sur FX, la série de Donald Glover est le chef-d’œuvre de la décennie. En posant la caméra dans la capitale de l’État de Géorgie où il a grandi, le jeune touche-à-tout dresse un portrait subtil de l’Amérique. Poésie, onirisme et sensorialité se côtoient dans cette œuvre au style et au rythme inimitables, d’une splendeur de chaque instant.

Huit ans après The Wire, Atlanta prend le parti de l’ironie pour déconstruire les stéréotypes sur l’identité afro-américaine et dénoncer l’absurdité d’une époque qui condamne les communautés à se croiser sans jamais se rencontrer. Parce qu’il n’est que trop conscient que la société ne lui laisse aucune chance, le héros traverse l’existence en spectateur, relevant chaque trait de sa violence sourde autant que de sa beauté. Un enchantement.

Pour en savoir plus : billet de blog consacré à la série

 

3. The Twilight Zone (1959)

Diffusée sur CBS pour concurrencer Alfred Hitchcock Presents, la série dystopique de Rod Serling a marqué l’histoire de la fiction par sa qualité narrative et formelle. L’anthologie fantastique reste ancrée dans l’inconscient collectif pour avoir mis en scène les pires cauchemars des téléspectateurs et renvoyé un reflet terrifiant des maux de la société américaine.

138 épisodes globalement extraordinairement denses et dérangeants, dont les scénaristes ne cessent de s’inspirer depuis un demi-siècle. Comme pour Alfred Hitchcock Presents, chaque épisode The Twilight Zone s’ouvre et se clôt sur les mots de son concepteur. Une morale qui invite à la réflexion, non sans humour noir. Le générique enfin est à lui-seul un chef-d’œuvre (le billet consacré au générique).

 

2. The Sopranos (1999)

Diffusée sur HBO, la série de David Chase a marqué un tournant dans la façon de concevoir une série télévisée. Deux ans après Oz, The Sopranos a contribué à donner un ton nouveau à la fiction, bousculant les genres et imposant une qualité narrative et formelle dont l’influence se mesure encore aujourd’hui.

La série suit le destin d’un chef de la mafia du New Jersey en proie à une crise existentielle et qui consulte une psychiatre pour tenter de surmonter ses angoisses. Influencé par Martin Scorsese, David Chase s’est émancipé des codes du genre pour proposer une œuvre avant-gardiste. Le regard interrogateur que Tony Soprano (irremplaçable James Gandolfini) pose sur son environnement permet à la série de passer de la violence brutale à une réflexion psychanalytique, philosophique, sociale et politique sur le monde.

The Sopranos, c’est enfin un générique en tous points magistral (le billet consacré au générique) et une scène finale mythique, dont le génie reste inégalé.

Note : un long-métrage préquel est en cours de production. Ecrit et produit par David Chase, il met en scène la guerre entre gangs italo et afro-américains à Newark, dans les années 60.

 

1. The West Wing (1999)

Diffusée sur NBC, cette épopée politique met en scène le quotidien du Président des États-Unis et de son équipe de collaborateurs. The West Wing a, durant sept saisons, abordé autant les questions de politique intérieure et extérieure que les grands sujets de société.

L’œuvre maîtresse d’Aaron Sorkin se distingue par la qualité inégalée de ses dialogues, brillants et bourrés d’humour, une mise en scène au rythme enlevé, une vision lumineuse du pouvoir, et la foi dans l’intelligence collective et la défense du bien commun. Portée par des acteurs au sommet de leur art, la série a marqué le genre avec des prouesses de mise en scène comme le walk and talk et a montré aux Américains qu’une vision idéaliste de la politique n’était pas incompatible avec l’exercice du pouvoir, trois ans avant l’élection de Barack Obama.

 

Puisque vous êtes là

Westworld (2016) Impossible d’affirmer que Westworld est l’une des meilleures séries de tous les temps, après la diffusion d’une seule saison. Le western dystopique produit par J. J. Abrams possède néanmoins toutes les qualités pour figurer en bonne place de futurs classements similaires. Et sa deuxième saison, qui vient de débuter sur HBO, est déjà époustouflante. À confirmer, si les scénaristes gardent le cap. Le billet consacré à la série.

 

Et vous, quelles sont vos séries préférées ?

 

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