l’élevage de moustiques

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Mambo!

Bonjour de ce pays où, ce soir, plusieurs mantes religieuses dévorent leurs amants sur notre table.

Pendant que pour l’expérience “insecticide” nous élevons 9000 larves, à raison de 250 larves par bac…

bacs

En parallèle, nous élevons des moustiques pour la deuxième expérience surnommée “l’effet maternel”. Je brûle d’envie de vous raconter comment on procède…

Vous êtes prêts? C’est parti!

1200 larves

Afin d’être sûrs qu’elles aient exactement les mêmes conditions de vie, nous élevons 1200 larves individuellement. Pour cela nous les plaçons chacune dans un petit puit rempli d’eau et nous les nourrissons pendant une semaine (avec de la nourriture pour poisson, vous savez, celle qu’on achète dans les animaleries).

Puis, les larves deviennent des… NYMPHES… si si! Vous voulez voir à quoi ressemble une nymphe? Attention…

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Tadaaaa!

A ce stade, on les met dans un récipient qui contient un fond d’eau, on les transfert dans des cages et on attend qu’elles deviennent adultes.

cages

600

Là, on écarte les mâles (eh oui, uniquement les femelles nous intéressent, puisqu’elles seules piquent). A ce stade, il nous reste 600 moustiques.

Ensuite, on va dans l’arrière pays (où il y a davantage de cas de malaria) chercher des enfants infectés (oui, des enfants, car leur système immunitaire est faible et cela augmente la chance de transmission du parasite aux moustiques), on leur fait une prise de sang et on les soigne.

500 + 100

Avec ce sang, on infecte 500 moustiques. Les 100 autres moustiques appelés “contrôle” boiront le même sang préalablement chauffé, ce qui a pour vertu de tuer le parasite.

350 + 70

Nous prévoyons que seul 70% des moustiques boivent effectivement le sang. Les autres, fainéants, on les élimine. Il nous reste donc 350 moustiques “exposés à l’infection” et 70 moustiques “contrôle”.

175 + 60

Nous laissons le parasite de la malaria se développer durant 12 jours. En moyenne 50% des moustiques meurent à cause de l’infection. Il devrait nous rester 175 moustiques exposés à l’infection et environ 60 “contrôles” (même sans avoir été infectés certains mourront).

50 + 125 + 60

Enfin, 70% des moustiques ont un bon système immunitaire et ils éliminent le parasite. Finalement, nous devrions avoir une cinquantaine de moustiques réellements infectés.

Nous remettons toute les femelles moustiques en contact avec les mâles pour laisser faire dame nature et nous leur offrons du sang de boeuf pour qu’elles puissent se reproduire.

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Puis chaque femelle est mise individuellement dans un récipient (235 récipients), on les laisse pondre, on garde les oeufs précieusement et chaque maman moustique est analysée à l’aide d’une machine (la pcr) pour vérifier si elles sont infectées.

800 + 800 + 800 = 2400

Nous gardons 800 oeufs issus de femelles infectées, 800 oeufs issus de femelles “contrôles” et 800 oeufs de femelles “exposées au sang infecté mais qui ont réussi à éliminer le parasite”.

Rebelote, nous élevons ces 2400 larves individuellement et nous les infectons.

120+ 120 x 3 = 720

Allez, je ne vous refais pas subir tous les calculs (on enlève les mâles, certaines meurent à cause de l’infection, d’autres sont mal lunées…), bref, à la fin nous prévoyons d’avoir 120 moustiques “exposés” issus de mamans infectées et 120 moustiques “contrôles” issus de mamans infectées, idem pour la progéniture de mamans “exposées” et idem pour la progéniture de mamans “contrôles”. Sachant que parmi les “exposés” seul 30% seront réellement infectés donc au total nous aurons 108 moustiques infectés… Ouf! Qui suit encore?

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Donc, ça y est, 62 jours plus tard (si tout se passe bien) nous aurons l’échantillon de moustiques voulus. La moitié sera colorée en jaune fluo (je vous expliquerai une prochaine fois pourquoi) et enfin nous pourrons faire notre expérience…

mousttikozmalad

Allez hop, par souci de vous garder fidèl(e)s, je m’arrête là aujourd’hui, gardant le suspense à son comble… Mais qu’est-ce donc que cette expérience????

Promis, vous le saurez très vite! En attendant, je vous raconte juste que nos petites larves (qui n’ont pas l’habitude d’être élevées dans des puits) ont un peu trop tendance à mourir, contrairement à celles que l’on élève à Neuchâtel dans les mêmes conditions. Vos parasitaires sont donc inquiets et cherchent à comprendre pourquoi (trop chaud? trop de nourritures?), nous menons donc en parallèle de petites expériences (en élever dans une pièce plus fraîche, diminuer la quantité de nourriture) pour optimiser notre méthode. Enfin sachez que cette expérience, nous allons la faire deux fois, afin d’avoir suffisamment de résultats pour nos analyses statistiques.

Il ne me reste plus qu’à vous remercier d’avoir suivi jusqu’au bout.

Bien à vous, vos parasitaires qui bichonnent leurs moustiques (oui, c’est un comble!).

Elise Rapp

Elise Rapp est infirmière spécialisée en médecine Tropicale (IMT Anvers). Elle a repris le chemin des études pour faire de la recherche sur les maladies tropicales. Elle est actuellement basée en Tanzanie où, dans le cadre d’un master de biologie elle mène un projet de terrain sur la malaria.

Une réponse à “l’élevage de moustiques

  1. Rappelez-moi le but de cet élevage ? Parce que là ça craint, brrr, élever des moustiques, quelles idées. Mais je suis sûr que tout ceci à un but scientifique, donc je ne m’inquiète pas. En tout cas, espérons que votre projet arrivera jusqu’au bout même s’il y a quelques individus qui meurent en cours de route.

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