Mambo?
Nous y voici enfin! Les résultats de nos trépidantes expériences arrivent.
Je sais, mon absence fut longue et votre inquiétude grandissante. Vous m’avez manqué mais je ne vous ai pas oubliés.
Nos résultats
Hélas, la science est un monde incertain. Notre première expérience qui porte sur la préférence d’odeur des moustiques infectés n’a pas donné de résultats concluants (pour mémoire, consultez le post du 2 juillet et du 11 août 2016). En effet, nous n’avons pas obtenu suffisamment de moustiques infectés pour pouvoir avancer des conclusions solides.
Il est parfois des renoncements nécessaires. C’est donc (presque) en vain que nous avons transpiré.
Un effort inutile? Pas tout à fait. Car nos agitations scientifiques ont permis d’améliorer la technique d’infection des moustiques que nos collègues tanzaniens pourront utiliser pour de prochaines expériences. Et ça, c’est un plus pour la science.
Expérience sur les insecticides
Allez, je vous propose un petit rafraîchissement de mémoire concernant le but de cette expérience (post du 9 mai 2016).
Première chose, je vais vous parler du 0.25% d’insecticides employés, ceux qui le sont pour lutter contre la malaria. Je n’aborderai pas ici les effets des 99,75% des insecticides utilisés pour l’agriculture et qui, je vous l’accorde, sont plus que nocifs pour l’environnement.
Vous êtes prêts ? C’est parti…
Les insecticides ont plusieurs fonctions: ils tuent les moustiques ou ils les repoussent.
Un petit exercice de méninge…
Je vais vous demander un petit effort de concentration pour comprendre le concept suivant qui m’a personnellement fait chauffer un peu les méninges.
Prenons l’individu et la communauté.
La présence d’un insecticide qui repousse un moustique infecté est un avantage pour l’individu (qui ne sera pas lâchement attaqué, puisque le moustique fuit).
La communauté par contre retire un avantage à ce que le moustique soit tué par l’insecticide (comme ça il n’attaque plus jamais personne).
Mais pour que le moustique meure à cause de l’insecticide, cela implique qu’il a été exposé, donc qu’il est probablement rentré dans une maison (sans être repoussé) et qu’il a piqué quelqu’un.
En gros, un insecticide qui ne fait que tuer ou que repousser le moustique est désavantageux, soit pour l’individu, soit pour la communauté. Pour contenter tout le monde, il faudrait donc un insecticide qui repousse un peu mais pas trop… Une espèce de compromis, quoi.
Maintenant revenons à cette étrange notion du moustique infecté.
Souvenez-vous (post du 28 avril 2016), le moustique infecté est “manipulé” par le parasite de la malaria. Ce dernier rend le moustique plus motivé à piquer. Comme si le fait d’être porteur de la malaria conférait un comportement plus agressif.
Notre hypothèse était donc que le moustique infecté, obnubilé par l’idée de piquer, est moins repoussé par les insecticides. Vous l’aurez compris, c’est un désavantage pour l’individu qui est moins protégé par l’insecticide et donc plus exposé au risque d’être piqué par un moustique infectieux. C’est un peu plus compliqué de savoir si cela confère un avantage ou non à la communauté… En effet, un plus grand nombre de moustiques infectés meurent ce qui réduit le nombre de moustiques infectieux circulants. D’un autre côté un plus grand nombre de gens sont potentiellement infectés, donc non seulement malades mais en plus contagieux pour un prochain moustique… un vrai casse-tête qui mérite une recherche à elle-seule. Avis à la communauté.
Bref, pour vérifier notre hypothèse nous (3 étudiants) sommes partis en Tanzanie. C’est d’ailleurs l’objet de ce blog que de vous en raconter l’aventure scientifique.
Et… ça y est, le voile est levé, nous avons fini nos analyses et nos résultats sont tombés.
Alors?
Et bien nous confirmons notre hypothèse. Nous avons observé que nos moustiques infectés sont effectivement moins repoussés par les insecticides.
Tadaaa..
Qu’est-ce que cela raconte?
Ben en fait, cela ne raconte pas grand chose d’autre que “selon une expérience, les moustiques infectés sont moins repoussés par les insecticides”. Il ne s’agit pas d’une découverte révolutionnaire, parce que nous n’avons pas mis à jour une nouvelle théorie ou une formidable manière d’éradiquer la malaria. Non, en fait, c’est une avancée dans notre compréhension du comportement du moustique et du parasite de la malaria. En gros, une pierre supplémentaire à l’édifice de cette complexe et vaste cathédrale de la lutte contre la maladie. Un élément à prendre en compte dorénavant dans la mise en place de stratégies. Et ça c’est déjà pas mal…
Ca y est c’est fini pour le chapitre Tanzanie. Je vous remercie de votre compagnonnage. Votre parasitologue en herbe est repartie sur d’autres routes et je vous retrouve très prochainement avec de nouvelles aventures à vous raconter.
Bien à vous, votre parasitaire qui commence une thèse et se réjouit de vous en parler… Restez en ligne (we are sorry to keep you waiting).