Demain le commun

Aide sociale 3/3: étude de cas

Ce n’est pas que je suis obsédé par l’aide sociale, hein, comprenez-moi bien. Je suis simplement un peu agacé par la reprise en boucle, dans les médias ou sur les réseaux, des discours caricaturaux sur l’aide sociale, cette générosité que quelques-uns organiseraient de bon cœur avec l’argent de autres (avec le vôtre, en particulier). Mais je suis davantage encore désespéré par le sentiment de fatalité qui s’exprime explicitement ou non dans ces discours, ainsi que par le mépris des personnes que la parole dominante sur l’aide sociale véhicule. Il y a une année, Le Temps croyait pouvoir expliquer “Pourquoi Lausanne aimante les bénéficiaires de l’aide sociale“. C’est qu’on “attire” les entreprises ou les riches, par contre, on “aimante” les pauvres comme de pauvres débris métalliques…

Non, la perception d’une aide de longue durée n’est pas une fatalité. Non, le passage à l’aide sociale d’un jeune ne signifie pas pour autant la ruine de sa carrière. Et certaines collectivités s’attèlent à le démontrer. Sans prétendre qu’elle est la seule, je vous proposer de regarder un peu plus près ce que fait dans ce sens la Ville de Lausanne. Deux scoops pour commencer: (1) Lausanne n’est pas la commune vaudoise avec le plus haut taux d’aide sociale et (2) le taux d’aide sociale a plutôt tendance à y décroître.

Réinsérer efficacement pour faire baisser l’aide sociale

Lausanne évolue dans le cadre légal cantonal, mais dispose, comme les autres communes, en tant qu’autorité d’exécution, de marges de manœuvre dans la gestion concrète des bénéficiaires. Qu’a-t-elle fait?

Je ne m’étends pas sur les détails… mais voici un graphique qui donne une idée de l’effet de cette politique:

Dépense nette pour le revenu d’insertion (aide sociale vaudoise) et évolution de la population.
Le Centre social régional de Lausanne (couvrant uniquement la commune) a été analysé séparément. Par ailleurs, 2011 et 2012 sont marquées par l’entrée en vigueur de la révision de la loi sur l’assurance-chômage (l’effet sur l’aide sociale est reconnu par l’ensemble des offices statistiques). Source: Rapport social 2014 de la Ville de Lausanne.

Les jeunes de 18 à 25 ans, un public particulier

Comme l’écrit le rapport de l’Initiative des villes pour la politique sociale (disponible en allemand uniquement), “Lausanne connaît un recul notable du nombre de cas et du taux d’aide sociale. La baisse est notamment due à une gestion des cas plus efficace, aux conséquences positives de programmes spéciaux pour les jeunes à Lausanne et dans le Canton de Vaud ainsi qu’au système des prestations complémentaires pour les familles” (p. 16). Le rapport ajoute que différents effets et corrections statistiques sont aussi à l’œuvre. Que fait-on pour les jeunes dans le Canton de Vaud et à Lausanne?

Dans le premier volet de cette série, j’écrivais que baisser les montants de l’aide sociale n’était certainement pas la panacée pour faire baisser le nombre de bénéficiaires. Les évolutions décrites ci-dessus, entamées bien avant la décision de diminuer certains montants, tendent à le démontrer. Elles prouvent une autre chose, que j’évoquais dans le deuxième article: essayer de faire diminuer les dépenses à court terme risque bien de coûter plus cher en fin de compte; il faut parfois, au contraire, oser un investissement pour sortir les bénéficiaires de la dépendance.

 

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