Pour que deux et deux ne fassent jamais cinq

Rapport ONU sur le racisme en Suisse – de l’expertise au militantisme de cuisine

Fin janvier, la presse helvétique reprenait en chœur une dépêche de l’ATS relatant le bilan du voyage d’un « panel d’experts » de l’ONU en Suisse. Racisme systémique, profilage racial, impunité policière et traitements inhumains : les observations des « spécialistes » n’avaient rien à envier aux pires récits de George Orwell ou de l’Amérique profonde de l’après-guerre. Le rapport final, tant attendu, est enfin paru… et ne tient pas la route.

Autant dire que si vous attendiez une démarche constructive voire scientifique pour étayer le « racisme systémique » dont le groupe de travail accusait la Suisse, vous risquez d’être déçus par le document final, dont la méthodologie, la rigueur et la partialité ne seraient pas dignes d’un travail du secondaire II.

S’il ne faut pas balayer tous les reproches d’un revers de main et si, comme dans n’importe quel pays, des améliorations peuvent être faites en matière de discrimination, la grossièreté des accusations portées contre la Suisse révèle un rapport militant largement basé sur des on-dit et des informations objectivement fausses.

Affirmations non-sourcées et parti pris

Pour ne citer que quelques exemples, les « experts » de l’ONU, relatant la mort tragique d’un individu sur un quai de la gare de Morges, osent affirmer qu’une vidéo publique aurait prouvé que les policiers amenés à tirer ne l’avaient pas fait par légitime défense. En réalité, si l’affaire est encore pendante devant la justice, la vidéo en question démontre clairement que l’individu se ruait sur les agents avec un couteau à la main, ce qui tend à confirmer leur version.

Le rapport va plus loin, présentant divers cas comme des « bavures policières ». Ainsi, les « experts » affirment avoir « suivi de près » le cas de « Mike Ben Peter, asphyxié par la police à Lausanne ». Cette affirmation, qui vise à tirer un parallèle avec la mort de George Floyd, n’en est pas moins mensongère : les rapports médicaux excluent formellement l’asphyxie comme cause du décès.

Dans ces deux cas, le parti pris évident choisi par les « enquêteurs » de l’ONU démontre les manquements méthodologiques dont ils ont fait preuve, mais également le manque de connaissances basiques des faits qu’ils relatent. La conclusion selon laquelle ces cas « illustrent la violence du profilage racial » n’est qu’une mise en évidence supplémentaire du militantisme politique dont relève ce simulacre d’expertise.

Un racisme systémique à 29’000 francs par mois ?

Pour les « experts », la preuve ultime du racisme systémique réside dans les conditions d’incarcération de Brian K. – plus connu il y a quelques années sous le nom de Carlos. Ils affirment que « la discrimination et l’injustice raciales sont évidentes à tous les niveaux de ce cas ».

Rappelons que ce criminel multirécidiviste, condamné entre autres pour avoir poignardé un jeune homme puis brisé une mâchoire quelques années plus tard, avait défrayé la chronique en 2013 pour ses coûts d’incarcération et de resocialisation qui se montaient à 29’000 francs par mois aux frais du contribuable. Mais ça, le rapport n’en fait pas mention.

Si le seul cas « emblématique de l’injustice raciale » que les « experts » parviennent à relever est celui d’un programme de resocialisation à plus d’un million de francs, nous admettrons que la Suisse ne s’en sort pas trop mal en matière d’inclusion.

La dernière chose à faire est d’importer les débats américains

Bien plus grave que la tentative de démonstration d’un racisme systémique fondée sur des témoignages unilatéraux et non-représentatifs, c’est l’importation d’une grille de lecture étatsunienne qui pose problème. Les débats qui secouent l’Amérique du Nord ne sauraient être transposés tels quels aux réalités suisses et européennes – et c’est pourtant l’erreur fondamentale que commettent les auteurs du rapport.

Ventilation de toutes les données statistiques « par race », mesures visant à augmenter (et contrôler) le nombre de professeurs d’origine africaine dans les écoles et universités, suspension automatique des agents avant tout jugement ou enquête sur toutes les accusations d’irrégularités par une institution nationale en matière des droits de l’Homme ne sont pas des solutions pertinentes pour un pays tel que la Suisse, qui n’a pas connu la ségrégation et l’esclavagisme.

Œuvrer avec sérieux sur un sujet sérieux

Les problématiques du racisme, de la place de l’Etat en matière d’égalité des chances ou encore du contrôle des interventions policières sont trop importantes pour être laissées à des groupes idéologiques et fort éloignés des réalités du terrain. Quel que soit notre avis à ce propos, il convient de l’aborder avec sérieux et rigueur.

Par son approche accusatrice et militante, le comité d’experts perd toute sa crédibilité. Un tel rapport, fondé sur une accumulation de témoignages plus ou moins précis, d’arguments idéologiques et de slogans politiques ne saurait avoir sa place dans la recherche de solutions aux problèmes qui peuvent être identifiés en la matière.

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