Le grain de sable

La protection de la santé, une nouvelle forme de pouvoir?

Dans son excellent éditorial du Temps du jeudi 20 janvier 2022, éditorial intitulé « Le test covid, bien plus puissant que les ministres et les patrons », Monsieur Richard Werly aborde un sujet qui mérite réflexion. Il termine son texte en ces termes : « … aujourd’hui bien plus puissant que les ministres ou les patrons, c’est le test covid qui bat la mesure de nos sociétés au nom du principe de précaution. On peut le comprendre, mais il nous faut aussi ouvrir les yeux : une telle situation n’est pas tenable dans la durée. Car cette précaution-là est tout… sauf rassurante pour notre modèle de société ».

Ayant partie liée avec le test covid, c’est évidemment le pass covid qui est aussi concerné, pass heureusement mis en veilleuse dans notre pays – et dans quelques autres – grâce à la sagesse des autorités fédérales notamment, mais seulement mis en veilleuse, car la protection de la santé pourrait le remettre à l’honneur  puisqu’il est de toute manière encore à la mode pour les voyages dans certains pays.

Or le gros problème des tests aussi bien que des pass, c’est l’usage qui en est fait. Ils peuvent justifier une surveillance, facilitée par la technique.  Le monde numérique est un monde d’interdépendance et de surveillance au nom de la simplification et de la protection. Qui dit « protection » dit « bonnes intentions », « bienfaisance », donc endormissement confiant des « protégés ». Et c’est là que la mise en garde de M. Werly prend tout son sens.

Jusqu’où le devoir constitutionnel de protection des habitants par les autorités politiques et le légitime désir d’être protégés de la part des mêmes habitants confèrent-ils les pleins pouvoirs de surveillance aux gouvernants au point de porter lourdement atteinte à la liberté d’aller et venir, d’exercer sa profession, de se cultiver, de se réunir, d’avoir une vie de famille, de pratiquer une religion, de consentir ou non à des soins médicaux, au point de porter atteinte à l’égalité devant la loi et à la participation à la vie publique ? Quel degré de danger justifie de tels pouvoirs ?

C’est la question fondamentale qu’il faut commencer à étudier maintenant déjà et toutes ces prochaines semaines, pour profiter de la lourde expérience vécue depuis deux ans. Il faut tenter de se mettre d’accord sur la définition de la santé d’une population donc sur la notion de « santé publique ». Il faut déterminer quels en sont les éléments constitutifs et quelle est la part d’impondérable lié à la nature humaine, cette part qui échappe et doit continuer d’échapper à la rigidité de vérités scientifiques dites indiscutables, presque sanctifiées par une technologie fascinante. La véritable guérison ne sera-t-elle pas l’acceptation et le respect de l’existence de  “l’inconnu humain », indéfinissable, plus grand toujours que la sécurité scientifico-technique ? C’est cet « inconnu » qui résiste aux excès du pouvoir, quel qu’en soit le motif !

 

 

 

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