Le grain de sable

Christophe Colomb déboulonné ou le courage des lâches

Ainsi donc, « la ville de Los Angeles a retiré une statue du navigateur génois accusé par certains de génocide », nous apprenait Le Temps du 15 novembre dernier. Et l’on y précise que « la scène a été immortalisée par le démocrate Mitch O’Farrell » qui participe ainsi, selon ses termes, cités toujours par LT, « à une étape naturelle vers l’élimination de la fausse histoire selon laquelle Christophe Colomb a découvert l’Amérique ». Ses actions auraient déclenché « le plus grand génocide de l’histoire ».

Bon, du côté de l’histoire proprement dite de la découverte de l’Amérique, il semble bien qu’elle soit antérieure à Christophe Colomb, puisque ce seraient des navigateurs chinois qui auraient découvert le continent plusieurs dizaines d’années avant le navigateur génois. Dont acte. Comme les Chinois n’avaient pas offert leur découverte à un monarque européen, on peut admettre que Christophe Colomb a été le premier à découvrir le continent dans l’intérêt de l’Espagne. Qu’il ait, hélas, comme l’ont fait très souvent les « découvreurs » ou « occupants » d’une terre nouvelle, massacré les populations autochtones, c’est totalement déplorable, mais ne vaut-il pas mieux, devant une statue, avoir l’occasion de rappeler que l’homme ne fait rien, même d’héroïque, qui ne soit aussi entaché de mal, plutôt que de punir un vieux mort en enlevant sa statue et en prétendant effacer ainsi un pan de l’histoire humaine ?

Il était sans doute aussi erroné d’instituer, en 1937 (445 ans après l’arrivée de Christophe Colomb), la fête fédérale du « Christophe Columbus Day » qui ne rimait à rien, que de déboulonner la statue du navigateur 78 ans plus tard. Ceux qui utilisent l’histoire aux fins d’exciter le nationalisme ou la haine revancharde de groupes ethniques ne sont que des lâches. Il faut un vrai courage pour regarder son passé en face avec ses taches et ses grandeurs, pour l’assumer tel qu’il est, pour en tirer d’éventuels avertissements, mais aussi parfois de la fierté, sans vouloir ni l’effacer ni le truquer. Le risque, quand on remodèle ou simplement juge le passé après coup, hors de l’esprit de l’époque, c’est qu’on l’ampute de sa dimension humaine donc universelle.

 

 

 

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