Les non-dits de l'économie

Le durcissement de la politique monétaire va aggraver la situation

Les banques centrales des pays occidentaux, y compris la Suisse, continuent à imposer une trajectoire à la hausse pour les taux d’intérêt directeurs, qui dès lors poussent les banques à augmenter leurs propres taux d’intérêt sur les crédits octroyés aux agents économiques, à savoir les ménages, les entreprises et le secteur public.

La doxa monétariste veut (faire croire) que cette hausse permettra de juguler la forte augmentation des prix à la consommation, devenue problématique au vu du renchérissement engendré par différents facteurs parmi lesquels la guerre en Ukraine et les goulots d’étranglement dans les chaînes de production suite à la pandémie du Covid-19.

Si les banques centrales persistent à durcir la politique monétaire dans les économies soi-disant «avancées», elles risquent en réalité d’aggraver le renchérissement qu’elles prétendent combattre; les firmes qui doivent payer des charges d’intérêts plus élevées sur les emprunts bancaires dont elles ont besoin pour financer leurs coûts de production répercuteront cela sur les prix de vente de leurs produits, qui par conséquent augmenteront davantage. De l’autre côté, les collectivités publiques seront aussi contraintes à payer davantage d’intérêts pour (re)financer leurs propres dettes, qui d’ailleurs devraient augmenter de manière considérable afin de soutenir l’ensemble du système économique en cette période fort troublée à l’échelle globale.

Les gagnants (à court terme) de ces politiques monétaires restrictives seront donc les banques, qui pourront augmenter leurs profits grâce à des recettes d’intérêts plus élevées. Or, le secteur bancaire dans son ensemble risque de se retrouver en graves difficultés financières à plus long terme, si le nombre de faillites d’entreprises explose conséquemment aux problèmes grandissants au niveau macroéconomique.

Il n’y a qu’une solution à cet état de fait: augmenter les dépenses publiques pour mettre de l’argent dans la poche des personnes n’arrivant pas à mener une vie digne avec leur propre revenu, soit-il celui gagné sur le marché du travail ou reçu par les assurances sociales (l’assurance-chômage et les systèmes de retraite). La solution n’est donc pas technique (aux mains des banques centrales) mais politique (aux mains des autorités législatives et exécutives). C’est la raison pour laquelle la crise continue de s’aggraver et ne sera vraisemblablement pas résolue dans l’intérêt général et pour le bien commun.

Il en a d’ailleurs été de même avec la pandémie du Covid-19: l’État a mis l’accent sur la responsabilité individuelle et les personnes faibles et vulnérables en ont par conséquent souffert davantage que les autres, en Suisse comme dans le reste du monde. Il n’en sera pas autrement avec la crise énergétique et la perte de bien-être de la classe moyenne suite au renchérissement et aux problèmes conséquents sur le marché du travail, qui ne tarderont à s’avérer. Plutôt que d’agir par une politique de l’offre – comme les crédits «Covid-19» que les banques en Suisse pouvaient offrir aux entreprises avec le cautionnement de la Confédération –, il faudrait agir par une politique de la demande visant à soutenir et relancer les dépenses de consommation des ménages, considérant les problèmes climatiques pour inciter l’ensemble des agents économiques à entamer un virage radical en faveur d’une transition écologique devenue d’autant plus urgente après l’éclatement de la guerre en Ukraine.

Quitter la version mobile