Les non-dits de l'économie

Le bilan après 5 années de taux négatifs

Cela fait cinq années que la Banque nationale suisse (BNS) pratique une politique des taux d’intérêt négatifs. Son objectif reste celui de réduire l’attractivité du franc suisse sur le marché des changes afin, d’une part, d’atténuer les difficultés des entreprises suisses qui exportent leurs produits et, d’autre part, amener les entreprises à investir davantage suite à la baisse des taux d’intérêt que les banques exigent pour leur ouvrir des lignes de crédit.

Cinq années après l’introduction des taux d’intérêt négatifs en Suisse, le bilan qu’il est possible de faire est clairement décevant: le taux de change du franc suisse continue d’être trop fort pour bien des petites ou moyennes entreprises orientées à l’exportation, ainsi que pour nombre d’autres entreprises qui sur le marché suisse sont confrontées à la concurrence des produits importés ou achetés à l’étranger par les consommateurs helvétiques.

Il y a également deux effets problématiques des taux d’intérêt négatifs en ce qui concerne la stabilité financière de l’économie suisse. D’un côté, cette stratégie de politique monétaire est le facteur principal de la surchauffe des prix sur le marché immobilier helvétique – où l’on observe depuis bien des années une augmentation des prix immobiliers nettement plus élevée que celle des prix à la consommation et celle du revenu national. Si l’on continue de cette manière, à moyen terme il est possible d’observer l’éclatement d’une nouvelle crise immobilière en Suisse, qui serait alors bien pire que celle éclatée à la fin des années 1980.

D’un autre côté, la politique des taux d’intérêt négatifs mise en œuvre par la BNS comporte une augmentation évidente des risques financiers pour les caisses de pension, qui cherchent des rendements à même de remplacer ceux autrefois dégagés par les marchés financiers – se dirigeant ainsi de plus en plus vers le marché immobilier, contribuant par là à en surchauffer davantage les prix.

Au lieu de continuer à imposer un médicament inefficace (entendez les taux d’intérêt négatifs), la BNS devrait soutenir l’introduction d’une micro-taxe sur les achats de francs suisses sur le marché des devises. De cette manière, il serait possible de réduire la force du franc sur ledit marché, sans augmenter la fragilité financière du secteur bancaire, qui est de plus en plus exposé à des risques incalculables mais problématiques sur le marché immobilier helvétique. Cela serait aussi l’occasion de faire payer les coûts du franc fort aux sujets économiques qui en sont à l’origine (à savoir, les institutions financières qui achètent des francs suisses sur le marché des changes), au lieu de prélever une taxe sur les dépôts bancaires des personnes qui ne sont aucunement responsables de l’appréciation du franc suisse depuis l’éclatement de la crise financière globale en 2008.

Une fois de plus, toutefois, la Suisse est « forte avec les faibles et faible avec les forts », notamment avec les grandes banques qui ont désormais oublié leur lien avec le territoire national.

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