Exploration spatiale

La mobilité sur Mars (1)

mars 3

Lorsque l’homme ira sur Mars, très vite il devra se déplacer à la surface de la planète. Pour ce faire il devra prendre en compte les caractéristiques très particulières de son environnement et les possibilités technologiques dont il disposera.

Tout d’abord voyons les avantages de l’environnement. Ils sont limités mais réel. Il s’agit d’un sol (surface ferme et non pas gazeuse), d’une gravité planétaire qui permet de transporter avec soi des masses plus importantes que sur Terre (0,38g au lieu de 1g), de la disponibilité de l’énergie solaire, de ressources minérales et gazeuses diversifiées aussi bien dans l’atmosphère de la planète que dans le sol, de l’absence de mer, de lac ou de fleuve à franchir pour aller où que ce soit. C’est sans doute tout.

Les contraintes sont fortes. Il n’y a bien sûr aucune infrastructure sur Mars et les construire à grande-échelle prendra beaucoup de temps, d’autant que la population sera pendant très longtemps très faible. Même remarque pour l’entretien. Des routes pourraient être construites mais il faudrait les maintenir fonctionnelles (par exemple les débarrasser de la poussière qui pourrait poser problème après une tempête importante), ce qui suppose des robots, des hommes, de l’énergie pour le faire. Concernant l’énergie, il n’y aura pas de « station-service » dans le paysage. Par ailleurs il n’y aura ni atelier de réparation, ni magasin d’alimentation, ni cabinet médical, aucune « facilité » en dehors de la Base, si ce n’est sans doute quelques abris contre les radiations en cas de tempête solaire (SeP – Solar energetic Particles). On ne pourra se déplacer en extérieur que revêtu d’un scaphandre et équipé de bombonnes d’air respirable. Et malgré tout, on restera toujours exposé aux radiations cosmiques. Il fera très froid la nuit et aussi à l’ombre (jusqu’à -100°C). Les tempêtes de poussière pourraient empêcher tout déplacement pendant un certain temps (plusieurs semaines). Enfin les télécommunications seront difficiles car l’atmosphère, peu dense et sans couche d’ozone réfléchissante, ne portera pas les ondes autour du globe et l’on devra recourir aux satellites relais (ce qui suppose une bonne couverture planétaire géostationnaire si on veut s’éloigner) au-delà de l’environnement immédiat (antenne visible).

Dans ce contexte, on ne sortira pas souvent de la Base car ce sera compliqué et dangereux, et qu’on pourra faire « beaucoup de choses » par robots interposés commandés en direct depuis l’intérieur protégé. Mais on sortira quand même de temps en temps, parce que dans certains cas on ne pourra pas faire autrement et aussi pour le plaisir ou l’agrément.

La première possibilité sera de sortir à pied.

Pourquoi pas. Il faudra le faire pour le contrôle et l’entretien des constructions diverses. Même si des robots agissent, on voudra vérifier, toucher soi-même. Mais l’usage des pieds ne pourra être que pour « le dernier kilomètre ».

La deuxième possibilité sera l’automobile.

Elle sera forcément du genre 4×4 ou plutôt « rover » comme on a pris l’habitude de les nommer. Il n’y aura pas de route avant longtemps, sauf pour aller à l’astroport, au gisement de glace d’eau et peut-être au réacteur nucléaire s’il est implanté un peu à l’écart de la Base. Les roues seront donc semblables à celles que l’on utilise pour les rovers d’aujourd’hui, pleine, larges et aussi résistantes que possible aux aspérités du sol (pas de caoutchouc trop sensible aux variations de températures et d’une manière générale trop fragile). La propulsion pourrait être chimique, du méthane brulant dans l’oxygène, puisqu’on en produira pour les fusées. On peut aussi penser qu’elle sera électrique, avec des batteries rechargées auprès d’un réacteur nucléaire ou mixte chimique/électrique avec de l’énergie solaire recueillie par panneaux photovoltaïques posés sur le toit du véhicule. A ce propos, il faudra toujours penser à se protéger des radiations spatiales. Pour ce faire, deux solutions, soit des sacs de glace sur le toit (les protons de l’hydrogène arrêtent les SeP quasi exclusivement composées de protons), soit tout simplement un ballon empli d’hydrogène en surpression (1,5 à 2,0 pour garantir la stabilité de l’enveloppe, selon sa texture). Le ballon pourra être parallélépipédique et couvert sur toute la surface du dessus, de panneaux solaires. Comme il y aura peu de trafic et qu’on ne recherchera pas la vitesse, on peut même concevoir que le ballon soit surdimensionné (le double ?) par rapport à la surface au sol du rover (pour donner une meilleure protection aux rayons latéraux) et que donc la surface photovoltaïque soit plus importante. Dans ce cas on pourrait concevoir un grand volume oblong. Dans les deux cas (parallélépipède ou volume oblong) on peut envisager une forme aérodynamique même si la prise au vent, sauf exceptions météorologiques rarissimes, sera très faible car la pression atmosphérique est extrêmement basse (moyenne 610 pascals). Même si son enveloppe structurée aurait une masse non négligeable, cette protection serait quand même allégée par l’hydrogène dont la masse volumique est moindre que le CO2 de l’atmosphère environnante (car on ne forcera jamais la pression de l’hydrogène de telle sorte qu’elle pèse aussi lourd que le CO2 extérieur, les risques de fuite hors de l’enveloppe étant trop élevés). Un tel dôme ne remontera donc pas le centre de gravité du véhicule.

Pour les déplacements dans les environs de la Base on utilisera des rovers non préssurisés car il serait difficile d’enlever et de remettre son scaphandre à chaque fois qu’on doit s’arrêter et descendre mais une tente embarquée, déployable et gonflable avec de l’air respirable et un nécessaire médical, pourrait servir d’abri en cas d’accident pour attendre les secours. Ces rovers ne seront pas chauffés puisque les utilisateurs garderont leur système de chauffage personnel intégré à leur scaphandre mais ils auront des portes avec des vitres (ordinaires) pour éviter trop de poussière à l’intérieur. Ils seront dotés d’un système de communication pour alerter la base en cas de besoin.

Par contre, les voyages lointains imposeront des rovers pressurisés, de véritables mini-bases ambulantes avec toutes les nécessités permettant une vie confortable et saine (voir illustration de titre). Ils pourraient eux aussi être protégés des radiations par un ballon sur leur toit qui comprendrait de l’hydrogène et/ou une réserve de glace d’eau qui pourrait être utilisée par l’équipage en cas de besoin et en tout cas pour le refroidissement du moteur. Ils seraient en outre équipés d’un système de télécommunication par satellite relai.

Je vous parlerai la semaine prochaine de la mobilité aérienne.

Illustration de titre : Sunrise on Polar Cap, par Philippe Bouchet, alias Manchu, Crédit Manchu et Association Planète Mars (APM). Dessin réalisé sur les conseils de l’APM, branche française de la Mars Society. Le rover est énorme, c’est un habitat. La différence avec ce que je décris dans mon texte c’est qu’il n’est pas équipé d’une protection d’hydrogène.

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Index L’appel de Mars 21 12 31

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