Exploration spatiale

L’homme avec les robots pour partir ailleurs

L’espace est aujourd’hui à la fois attirant et hostile comme autrefois l’Océan. Pour l’explorer, on dispose depuis Galilée des télescopes qui sont devenus de plus en plus sophistiqués jusqu’au Very Large Telescope (« VLT ») de l’European Southern Observatory (« ESO ») dans le désert d’Atacama au Chili, ou au Hubble Space Telescope (« Hubble ») qui sera désorbité vers 2020 après nous avoir comblés d’images extraordinaires et, bientôt, au James Webb Space Telescope (« JWST »), son successeur en orbite terrestre, qui doit être lancé en 2021 (après de nombreux reports).

Pour explorer notre « banlieue », le système solaire, on dispose aussi des sondes robotiques que l’on a envoyées au cours des décennies passées observer de près toutes les planètes et aussi depuis cette année 2015 les planètes naines et même deux petits astres, astéroïde et comète (Itokawa et Churyumov-Gerasimenko). On a été voir ces objets encore de plus près, en faisant se poser sur la Lune puis sur Mars et sur les astéroïde et comète mentionnés, des engins robotisés qui nous ont apporté des informations précises et précieuses sur la formation de notre système solaire, les molécules organiques et leur évolution.

Et l’homme dans tout cela ?

Il est certes allé « marcher sur la Lune » d’où les astronautes et en particulier le dernier, le géologue Harrison Schmitt, nous ont même rapporté de précieux échantillons de roches. Mais depuis la 17ème mission Apollo en 1972, rien. Cela fait 43 ans !

Peut-être effrayés de leur témérité passée, les dirigeants des grands pays maitrisant la science astronautique, se sont contentés de faire faire aux astronautes suivants, personnes de grande valeur intellectuelle et en pleine maîtrise de leurs capacités physiques, formés à grand frais, de nombreux et très peu utiles séjours dans la Station Spatiale Internationale, entre 330 et 420 km d’altitude au-dessus de la Terre.

Peut-on se satisfaire de cette situation ?

Certes non ! Et ce pour trois raisons.

D’abord les robots ont besoin de l’homme, à leur côté sur les astres, pour que leur efficacité soit maximum. Pour la Lune, passe encore que l’homme n’y retourne pas puisque la distance est suffisamment faible relativement à la vitesse de la lumière et qu’il peut y commander ses engins depuis la Terre en temps réel. Mais déjà sur Mars cette commande en direct n’est plus possible puisque la Terre en est éloignée de 3 à 23 minutes lumières. Par ailleurs ce n’est pas faire injure à nos « amis » robots que de dire qu’ils ont une capacité de jugement et de choix moins intelligente et moins adaptable aux circonstances et que cela nous fait sans doute rater de belles opportunités d’observations.

La deuxième raison est que l’humanité est fragile comme le disait Carl Sagan en évoquant notre « pale bue dot » à la surface duquel tous les êtres conscients ayant jamais existé (à notre connaissance) se trouvent aujourd’hui concentrés. Une Terre de repli en cas de catastrophe ne serait donc pas malvenue.

La troisième raison est que l’homme a besoin d’aventure. Il a besoin d’escalader des montagnes, besoin d’aller, comme jadis, au-delà des océans. Ces océans ce sont aujourd’hui les espaces interplanétaires à portée des puissants lanceurs qu’il conçoit. Il est sorti d’Afrique il y a des centaines puis des dizaines de milliers d’années, il a sillonné les mers lointaines au moins depuis le 14ème siècle et aujourd’hui il veut aller encore plus loin. Mars, la planète la plus accessible et la moins hostile de notre système solaire, doit être sa prochaine étape. Ceux qui pensent qu’il ne pourra jamais s’établir sur un autre sol parce que c’est trop difficile et dangereux, pêchent contre l’espérance. Rien n’est joué, l’avenir dépend de nous, du choix que nous allons faire, celui de la frilosité ou celui de l’audace.

La NASA prépare aujourd’hui, assez mollement, le « SLS » (Space Launch System), son nouveau « lanceur lourd » qui ne peut avoir pour objet, vu sa capacité d’emport, que de permettre des missions habitées dans l’espace « profond » (au-delà de l’orbite terrestre). Son premier vol est prévu pour 2018 mais on peut toujours craindre qu’il soit abandonné par la prochaine présidence comme l’a été par le Président Obama, le programme Constellation du Président Georges W. Bush pourtant déjà bien engagé. Il est très important que ce nouveau projet (le SLS) aboutisse et pour cela, le soutien non seulement des citoyens américains mais aussi de l’opinion publique mondiale doit s’exprimer. Nous pourrons avancer ainsi vers une nouvelle ère, celle où l’homme s’affranchira de ses liens avec notre mère la Terre parce qu’il pourra puiser la matière et l’énergie dont il a besoin pour sa vie dans l’environnement spatial, certes très hostile mais aussi extrêmement stimulant.

Le beau film de Ridley Scott qui sort le 7 octobre sur les écrans, réalisé d’après le roman d’Andy Weir, « The Martian », peut, malgré tous ses défauts, relancer l’intérêt et, espérons le, l’enthousiasme pour ce projet. J’ai eu la chance de le visionner en avant première sur invitation de Sarah Dirren de la RTS pour ensuite faire un « CQFD » qui lui est dédié. Je vous en dirai plus le 7 octobre.

Pierre Brisson

Images :

en tête d’article : MCT (Mars Colonization Transport), crédit image : Richard Heidmann. Le concept de MCT a été développé par Richard Heidmann sur une idée d’Elon Musk. Richard Heidmann, polytechnicien et ingénieur en propulsion spatiale, est le fondateur de l’Association Planète Mars, branche française de la Mars Society. Le MCT doit pouvoir transporter 100 tonnes (dont 100 passagers) à la surface de Mars.

Ci-dessous : SLS 70 tonnes, Crédit image: NASA/MSFC. Possibilité de déposer plusieurs tonnes à la surface de Mars.

 

 

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