Le sablier

Quelles seront les marques horlogères à surveiller lors des prochaines ventes aux enchères ?

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Les ventes d’automne qui se sont achevées lundi soir auront une fois de plus apporté la preuve que désormais les montres sont aujourd’hui les stars – avec les voitures de collection – des ventes aux enchères. La maison Phillips avec Aurel Bacs au pupitre affirme son statut de star de la profession avec notamment une Omega Tourbillon vendue pour CHF 1,428 millions Phillips-Bacs&Russo . Ce résultat représente un nouveau record avec la montre Omega la plus chère vendue aux enchères de tous les temps. Le Temps 18.05.2017 : Interview Aurel Bacs

A l’inverse la vente thématique HEUER orchestrée par Phillips a clairement démontré les limites de la spéculation à court terme que j’évoquais dans les conclusions de mon précédent article Le Temps/blog Le Sablier . Les prix des montres HEUER créées par Jack Heuer ont connu des augmentations de valeur en l’espace de 3 ans qui laissent songeurs les observateurs avisés du marché des ventes aux enchères. Leurs prix ne baissent pas encore, mais on peut raisonnablement affirmer qu’un plafond a été atteint.

En se basant sur les résultats de ces traditionnelles ventes aux enchères automnales, nous proposons quatre leçons à retenir :

  1. La cote d’une marque lors des ventes aux enchères : un indicateur de confiance fiable ?

 Les maisons horlogères ont compris très tôt que des prix record obtenus lors de ventes aux enchères sont des vecteurs de communication positifs pour une marque. Les achats effectués par le musée d’une marque ou par le patron propriétaire de celle-ci pour sa collection privée sont à considérer comme un investissement marketing.

La famille Stern propriétaire de Patek Philippe l’a compris très tôt et a été une des premières à réaliser des prix records portés notamment par des achats du musée qui ont permis de constituer une magnifique collection accessible au public (http://www.patekmuseum.com ).

Aujourd’hui Rolex a certes détrôné Patek Philippe avec la récente vente de la montre bracelet la plus chère de l’histoire vendue pour CHF 17,78 millions toujours chez… Phillips. Cependant Patek Philippe détient toujours le record absolu de la montre la plus chère vendue de l’histoire avec la montre de poche Henry Graves vendue pour CHF 23 millions et la 2ème place des montres bracelets avec un quantième perpétuel en acier vendu pour plus de CHF 10 millions l’automne passé.

  1. Si l’on étudie les récents records établis aux récentes ventes enchères de New-York et Genève on s’aperçoit très vite qu’ils sont concentrés sur quelques noms : Rolex, Omega, Patek Philippe, Audemars Piguet, F-P Journe et Philippe Dufour.

    Journe et Dufour étant un peu les « anomalies » dans la liste, mais aussi la confirmation que les montres fabriquées par quelques rares horlogers indépendants qui entreront dans les livres de l’histoire de l’horlogerie, peuvent être un excellent investissement. La Dufour Duality vendue pour CHF 935’000 à New-York est rare – seulement 10 exemplaires produits à ce jour – et donc désirable.

Pour revenir aux marques institutionnelles citées plus haut, on peut clairement affirmer que la cote de la marque – et donc son succès commercial – va de pair avec les prix réalisés lors des ventes aux enchères et vice-versa. Même si pour Audemars Piguet (AP) et Omega les prix hors-normes restent – pour l’instant du moins – liés aux modèles iconiques de la marque : Royal Oak pour AP et Speedmaster ou Seamaster pour Omega, avec l’exception du tourbillon pour Omega, mais qui est à considérer comme une pièce unique vue son histoire.

Le week-end passé a vu aussi la vente biennale Only Watch http://www.onlywatch.com orchestrée par la maison Christie’s Christie’s Only Watch 2017 qui a permis de rassembler CHF 10 millions pour une cause noble liée à la recherche sur la myopathie de Duchenne. Par conséquent les prix, certes fantastiques réalisés notamment par F-P Journe, Audemars Piguet ou Patek Philippe (CHF 6,2 millions pour une pièce unique)  ne sont pas forcément le reflet de la réalité absolue du marché.

Patek Philippe 5208T-010 pièce unique pour Only Watch (copyright monochrome-watches.com)
  1. Est-il encore temps de monter à bord  du train des enchères horlogères ?

 Cela dépendra beaucoup de vos connaissances et surtout de votre portefeuille, car le potentiel de hausse sur certaines marques citées plus haut devient de plus en plus réduit. Et les marques ayant un réel et important potentiel sont très rares.

L’autre caractéristique de ce marché, malgré la digitalisation est le fait qu’il soit contrôlé – je dirais même verrouillé – par quelques initiés. Ceci vaut surtout pour le haut de gamme pour lequel une poignée de collectionneurs fait la tendance !

Malheureusement pour les amoureux de l’histoire horlogère – dont je fais partie – certaines maisons ne reçoivent pas l’attention qu’elles mériteraient : certaines montres de Minerva (constructeur mythique de chronographes) ou encore Universal Genève (inventeur de l’affichage tri-compax sur les chronographes) mériteraient beaucoup plus d’attention de la part des collectionneurs.

En tant que non-initié on peut s’étonner de l’émerveillement d’un collectionneur pour une Rolex avec une erreur de typographie sur le cadran, et son désintérêt pour une prouesse mécanique d’une marque moins connue ou oubliée.

  1. A partir de là, quelles seront les valeurs montantes et les stars du futur ?

Mon pronostic qui n’engage que moi et qui ne doit surtout pas être considéré comme une recommandation d’achat !

Il va de soi que les modèles rares ou uniques de Patek Philippe ou Rolex resteront les stars des ventes aux enchères encore pour un moment, mais avec un ticket d’entrée inaccessible pour le commun des mortels, sauf si vous avez la chance de retrouver le modèle oublié d’une Patek qui dormait dans le tiroir de votre grand-père !

Je recommanderais également à un non-initié de ne pas s’aventurer – sans conseils avisés – sur un marché qui est régit par des codes et une omerta qui font presque penser à une congrégation ! Le nouveau venu sera vu dans le meilleur des cas comme une proie facile.

Mais j’aimerais conclure avec une vision optimiste qui place les enchères comme un outil promotionnel d’une industrie basée sur une tradition pluriséculaire.

 

 

 

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