Villes en mouvement

Les réfugiés et le pouvoir des villes

Ada Colau, la récemment élue maire Podemos de Barcelone, a fait le 4 septembre un discours remarqué sur l’accueil des réfugiés. Elle s’est adressée aux réfugiés en leur disant “vous êtes les bienvenus: notre maison est votre maison”. En cela, elle exprime la politique de son parti en faveur des plus démunis. Mais, elle a aussi dit autre chose qui a été moins remarqué: “Pendant que les Etats cherchent des excuses, nous les villes, nous nous sommes organisées. En quelques jours, nous avons mis en place un réseau auquel viennent se joindre des centaines de villes”.

Autrement dit, la politique internationale n’est pas seulement l’affaire de l’Etat, espagnol en l’occurrence, mais aussi des villes. Seules et en réseau, les villes sont une force politique. Cette affirmation d’autonomie et de force à l’égard du gouvernement central témoigne de la montée en puissance des villes. Ce phénomène n’est pas toujours perçu, tant nous avons été habitués à penser la politique – et à plus forte raison la politique internationale – comme une affaire d’Etats. Angela s’entend ou pas avec François, David avec Barack…

Le progressisme des villes

Or, les villes sont des lieux clés aujourd’hui. Elles rassemblent des centres de décision économiques et politiques. Ceci n’est pas nouveau. Ce qui l’est d’avantage, c’est la réaffirmation de leur pouvoir politique et de leur autonomie. Il s’agit d’une ré-affirmation puisqu’avant le 17e siècle et la formation des Etats-Nation, les réseaux de villes – pensez à la Ligue hanséatique – étaient puissants. La prise de parole d’Ada Colau rend visible une autre face de ce pouvoir, qui est le pouvoir de solidarité. Il existe en effet aujourd’hui de nombreux réseaux de villes qui ne sont pas orientés uniquement vers la croissance économique, mais vers d’autres fins: la qualité environnementale, le commerce équitable ou l’accueil des réfugiés. Non seulement les villes sont une force politique plus affirmée, mais souvent plus progressiste aussi.

Rares sont les études sur ce sujet, mais on peut penser que cela est dû à la plus grande proximité avec les citoyens et le fait que les problèmes sont abordés de façon souvent plus concrète à l’échelle d’une ville. Ainsi, Ada Colau a lu lors de son intervention des lettres d’habitants – reçues en nombre à l’Hôtel de Ville-, qui offraient du temps et des chambres pour accueillir des réfugiés. Quand la maire de Barcelone évoque le pouvoir des villes, elle ne fait donc pas un simple effet de manche. Elle montre qu’il faut considérer les lieux du pouvoir politique aujourd’hui comme plus nombreux et plus diversifiés que nous les voyons à travers nos vieilles oeillères étatistes.

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