Affaires de droit

Justice pénale : les visioconférences contraires à la CEDH

Le 5 mars 2021, le conseil d’Etat français a jugé que la possibilité d’imposer la visioconférence dans les procédures pénales était contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme.

La plus haute juridiction administrative française s’est ainsi opposée à cette mesure, qui avait été  adoptée en mars 2020 en vue d’adapter les règles de procédure pénale en raison de la pandémie de coronavirus.

Ces dispositions permettaient au juge d’imposer le recours à des moyens de télécommunication audiovisuelle, ou même téléphonique, devant la quasi-totalité des juridictions pénales, sans soumettre  l’exercice de cette faculté à des conditions légales ni l’encadrer par des critères précis. Pour le Conseil d’État de l’Hexagone, ces dispositions portent une atteinte au droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH) eu égard à l’importance de la garantie qui s’attache à la présentation physique du justiciable devant la juridiction pénale. Le contexte de lutte contre l’épidémie de covid-19 ne suffit pas à justifier une telle atteinte.

La Suisse également a adopté une ordonnance comparable au printemps dernier. Toutefois, l’Ordonnance du 16 avril 2020 du Conseil fédéral instaurant des mesures en lien avec le coronavirus dans le domaine de la justice et du droit procédural (Ordonnance COVID-19 justice et droit procédural), dont la durée de validité a été prolongée jusqu’au 31 décem­bre 2021, ne concerne pas les juridictions pénales. Seuls les procès civils sont visés (voir mon billet de blog du 22 avril 2020). En Suisse, le consentement des parties est au demeurant requis, à moins de justes motifs.

Mon opinion personnelle

Je ne suis pas surprise que l’on considère contraire aux droits fondamentaux la possibilité d’imposer la vidéoconférence en matière pénale. La justice, tout particulièrement dans ce domaine, ne doit pas se laisser déshumaniser. A cet égard, la présence physique du justiciable devant l’autorité pénale est effectivement et par principe essentielle. La décision du Conseil d’Etat français est ainsi à saluer. Le législateur suisse s’est pour l’instant et à juste titre montré réservé s’agissant des possibilités d’imposer des visioconférence. L’Ordonnance qui règle cette possibilité en matière civile, précise en effet que le consentement des parties est, sauf exceptions, requis. Continuons de garder à l’esprit la nécessité du respect du droit à un procès équitable au moment d’envisager de nouvelles solutions numériques en justice.

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