Une balle dans le pied?

Dans son message du Nouvel An, le Pape a, entre autres, déploré une "mentalité égoïste et individualiste qui s'exprime au travers d'un capitalisme débridé et sans régulation".  Amen. L'enfer de Benoit XVI est certainement pavé de bonnes intentions, car en matière de capitalisme débridé, le Vatican n'a pas grand chose à apprendre.

Pour commencer, deux mots sur la Banque du Vatican, le bien nommé "Institut pour les Oeuvres de Religion". Connu pour son opacité et pour abriter des fonds plus que douteux, notamment de la mafia, cet Institut "peine" à respecter les normes européennes en matière de blanchiment et aurait des notes insuffisantes pour 8 des 16 recommandations fondamentales en matière de recyclage d'argent sale.

Ensuite, une petite question: à eux seuls, les diocèses des Etats-Unis ont payé, depuis 1950, plus de 3 milliards de francs en dédommagement à des victimes d'abus sexuels. D'où venait cet argent? Impossible de le savoir, pas plus qu'on ne peut connaître le montant d'une éventuelle participation de la maison-mère, le Vatican.

Enfin, quelques informations: en Suisse, le financement public des Eglises catholique romaine et évangéliques réformées s'élève "au moins" à 556 millions de francs par an. En plus, leurs membres versent 1,3 milliards par an d'impôts ecclésiastiques selon une étude réalisée par Dr. Michael Marti de Ecoplan, qui évoque aussi le sérieux manque de transparence des flux financiers.

Consolons-nous: ce n'est guère mieux chez nos voisins français: l'Eglise catholique a un budget annuel de 840 millions de francs et la transparence fait tout autant défaut. Selon une enquête de "La Croix", l'Eglise possède 3000 églises, 40 à 50000 immeubles à usage pastoral et des biens locatifs rapportant 27 millions par an. La Conférence des évèques de France refuse toutefois de fournir de liste ou d'en indiquer la valeur.

Cher Pape, qu'as-tu à regarder la paille qui est dans l'oeil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton oeil à toi, tu ne la remarque pas?(Matthieu VII, 3)

 

 

Berk et Beurk !

En cette fin d'année, on peut avoir envie de vomir avant même les excès du réveillon. Il suffit de lire l'enquête du Matin Dimanche et de la Sonntagszeitung sur les 300 millions planqués au Crédit Suisse par Alaa et Gamal Moubarak, les deux fils de l'ancien président egyptien.

Selon leur avocat, le jeune et fringant Lionel Halpérin, les deux frangins sont "des hommes d'affaires actifs dans la finance qui, comme d'autres, ont très bien gagné leur vie dans les années 1990 et 2000". Mouais… moi aussi, j'ai bien gagné ma vie pendant ces belles années, mais pour me mettre 300 millions de côté, il m'aurait fallu économiser pendant 2.000 ans sans rien dépenser. Passons. Il est vrai que mon père n'exerçait pas le métier de dictateur et que je ne suis sans doute pas très doué pour la finance…

Le fait qu'ils aient été des PPE (personnes politiquement exposées) signifie que le Crédit Suisse devait connaître aussi bien les clients que l'origine des fonds. Cela semble bien avoir été le cas puisque les organes de lutte anti-blanchiment de la banque avaient plus que froncé les sourcils. Mais le conseiller des frangins, Olivier Meystre, directeur de la division Moyen-Orient du CS, les a amenés à fermer les yeux. Par pure commisération sans doute. Et peut-être aussi par amitié pour ce grand voyou de Hussein Salam, âme damnée des Moubaraks, bon client du Crédit Suisse et heureux bénéficiaire de généreuses rétro commissions que lui versait la banque pour les clients qu'il amenait.

Hussein Salam qui, soit dit en passant, s'est tiré en Espagne au début du printemps Egyptien et négocie en ce moment le remboursement de dizaines ou centaines de millions acquis illégalement contre l'annulation de sa condamnation à 15 ans de prison par un tribunal égyptien.

Bref, après les frangins Abacha (fils de l'ancien dictateur du Nigéria) qui avaient également planqué quelques centaines de millions en Suisse, il y a une quinzaine d'années, on retrouve le même scénario: contre l'avis du comité anti-blanchiment de la banque et grâce à ses relations privilégiées, le conseiller des sympathiques frère obtient que les comptes restent actifs et vogue la galère.

Si on peut se réjouir pour le jeune Lionel – qui va certainement se faire un saladier en honoraires – et pour le fisc genevois qui va lui en piquer la moitié – on ne peut qu'être triste d'être ainsi confronté à la connerie humaine et notamment celle de la direction du Crédit Suisse.

Certes, les attaques dont fait l'objet la place financière suisse sont souvent aussi sournoise que peu désintéressées. Mais lorsqu'il s'agit de se tirer des balles dans le pied et d'alimenter les attaques, on n'a besoin de personne. Chantons donc en choeur ce texte de Gilles, qui date des années 1960, mais n'a rien perdu de son actualité.

Bien qu´à cheval sur la morale
Portant des vertus l´étendard
Nous avons nos petits scandales
Qu´on étouffe avec beaucoup d´art.
Il y en a de militaires
Avec d´austères colonels
Et d´autres, moins spectaculaires
Mais tout aussi traditionnels
Dans la pédale et la finance.
Mais comme on en signale en France
Gardons-nous d´affirmer surtout
"Y en a point, y en a point comme nous!"

 

 

Vacances en HLM

Votre cité dortoir vous manque pendant vos vacances ? Royal Caribbean International a pensé à vous et vient de commander son troisième méga bateau de croisière du type Oasis aux chantiers navals STC France. Son coût ? de l'ordre de 1,2 milliard de francs.

Ces petites bêtes accueillent jusqu'à 6.300 passages et 2.384 membres d'équipage sur 16 étages. En toute intimité (à gauche, la cité vacances; à droite, la cité dortoir)

 

 

Comme on est en période de fêtes et donc de grandes bouffes, voici un exemple de ce qui est embarqué pour une semaine de croisière (liste non exhaustive):

– 41.000 kg de viande

– 10.000 kg de volailles

– 14.000 kg de poissons

– 40.000 kg de fruits et légumes

–  6.000 kg de sucre

–  3.000 kg de riz

– 220.000 oeufs

– 12.000 bouteilles de vins et alcools

– 25.000 bouteilles de bière

On embarque aussi du fuel, bien évidemment (1,3 millions de litres) et les 4 millions de litres d'eau consommés quotidiennement proviennent de l'eau de mer, traitée à bord. Largement de quoi se laver, alimenter les 21 piscines et arroser le parcours de golf de 9 trous, ainsi que le parc central abrité avec ses 12.200 plantes et arbres.

Si vous optez pour une croisière dans les Caraïbes, vous pourrez débarquer pour quelques heures à Labadie, en Haïti. Pas de quoi faire peur aux habitants: vous ne le verrez pas! La station balnéaire en question est en effet privée et louée à la Royal Caribbean.

Vous pourrez aussi vous dégourdir les jambes à Farmouth, en Jamaïque: 6.300 passagers qui débarquent pour faire du shopping, cela ne peut que faire plaisir aux 7.780 habitants de la ville.

Bonnes fêtes de fin d'année et… bonnes vacances !

Mon joli compte de Noël

"Notre coopérative compte 43.000 femmes et notre chiffre d'affaires est de 120 millions de francs".

Pas de doute, Lijjat Papad est un GROS succès. Crée en 1959 par 7 femmes, avec un capital initial emprunté de 10 dollars, Lijjat offre à ses membres une occasion unique de générer un revenu décent et donc de vivre dignement. Comment ? En fabriquant et en vendant des papadum (ou papad) ), sortes de galettes dont les Indiens sont friands et que l'on trouve d'ailleurs dans tous les restaurants indiens. Vous l'aurez compris, ce petit bijou a son siège en Inde.

"Toute femme capable de travailler, sans distinction de caste, de croyance et de couleur devient une coopératrice dès son premier jour de travail". Et comme le but de Liijat est de permettre à des femmes de gagner leur vie par leur travail, tout est fabriqué à la main. Si l'organisation dispose d'une centrale à Mumbai, chacune des 79 branches est autonome, car Lijjat croit fermement à la propriété collective et toutes les décisions se prennent par consensus.

Et les hommes ? Ils peuvent être employés comme comptables, chauffeurs ou garde, mais ils sont salariés et ne peuvent pas devenir coopérateurs.

Comme le raconte Sébastien Farcis de France Inter: "il est 7 heures du matin et l’activité bat son plein dans le sous-sol de la branche de Bombay. Les 800 femmes qui y sont rattachées viennent chercher la pâte qui leur servira à rouler les papadam à la main et au rouleau. Chaque femme doit rouler un minimum de 5 kilos de galettes par jour, et touche 50 centimes d’euro le kilo. En plus de cela, en tant que copropriétaires, elles touchent des dividendes sur les profits. Dans cette branche de Bombay, ils se sont élevés à 300 euros par an par personne en 2011. Et Swati Paradkar, qui a commencé comme rouleuse à l’âge de 10 ans, est aujourd’hui la présidente nationale de Lijjat".

Elle est fière d'avoir modernisé l'organisation, qui exporte dorénavant ses papadams en Europe et aux Etats Unis, mais aussi d'avoir diversifié en fabriquant d'autres produits alimentaires . Fière aussi de la rigueur de l'organisation: "nous inspectons le lieu de travail des femmes qui fabriquent les papadams et les conseillons quant à l'hygiène. De plus, nous nous assurons de la qualité de nos produits et livrons aux femmes une pâte prête qu'elles viennent chercher le matin. Le lendemain, elles nous ramènent les galettes et sont payées le surlendemain pour ce qu'elles ont livré" peut-on lire sur le site internet de l'organistion.

Savez-vous comment on appelle la mise en commun des moyens de production et la suppression des classes sociales ? Le communisme. Comme quoi, à la base, l'idée n'était peut-être pas si mauvaise…

 

http://www.lijjat.com/

 

UBS est sauvée !

Qu'y a-t-il de commun entre Bernard Madoff, Charles Ponzi, UBS, Billy the Kid, Monsanto, Ronnie Biggs, Al Capone, Fernand Legros et Albert Spaggiari ?

– Ils ont tous été objets de films et/ou livres décrivant leurs agissements.

– Ils ont tous été condamnés une fois au moins pour des méga vols, escroqueries, manipulations et/ou contraintes.

– Ils sont tous à la fois pointés du doigt comme incarnation du mal et en même temps, objets d'une certaine admiration.

Admiration ? Eh oui… on tend à admirer la réussite, où qu'elle aille se nicher. Que pendant des années – et en toute impunité – UBS ait pu générer des milliards en encourageant l'évasion fiscale et en manipulant les taux d'intérêt, fallait le faire ! On est quand même les meilleurs ! D'ailleurs, le dernier petit scandale concernant le Libor n'a d'ailleurs entraîné ni retraits massifs de fonds, ni chute de l'action chez UBS.

Comme l'a récemment dit Nicolas Bideau, le chef de Présence Suisse: "cette année, le modèle suisse a convaincu. En ces temps de crise économique et financière, la stabilité de notre économie et le dynamisme de notre démocratie directe viennent renforcer notre image à l'étranger. Nous jouissons d'une excellente position dans les classements internationaux".

Nos montagnes, notre air pur, notre démocratie, notre stabilité financière et nos grands escrocs. Pas de doute, nous avons d'excellents arguments pour attirer les individus et fonds douteux en quête de refuge. Après tout, entre escrocs, on se respecte…

 

 

 

Dans l’baba ou… 我们正在性交

Parler le suisse-allemand a certes ses vertus, surtout pour ceux qui veulent grader à l'armée ou faire carrière chez UBS. Mais c'est plutôt le mandarin que l'on devrait enseigner aux p'tits jeune de chez nous, si l'on en croit l'article de Séverine Saas*, paru cette semaine dans l'Hebdo.

Les Chinois débarquent achetant tout ou presque sur leur passage. En Afrique, mais aussi aux Etats-Unis et en Europe. J'exagère? Oui, bien sûr. Mais la tendance est là.

Un petit dernier qui n'a pas fait grand bruit chez nous, c'est le rachat par un consortium chinois de 80 % de ILFC pour 4,23 milliards de dollars.

ILFC? C'est International Lease Finance Corporation (http://www.ilfc.com), la plus importante compagnie de location opérationnelle d'avions commerciaux. ILFC, qui achète en gros – et est donc le plus important clients des constructeurs – est propriétaire de quelque 1.000 avions, qu'elle loue à plus de 200 compagnies aériennes. Et quand on sait qu'un Airbus A380 coûte 350 millions de francs à l'achat, on comprend que certaines compagnies préfèrent la location.

Comme le relève "Le vent de la Chine" (http://www.leventdelachine.com), "ILFC a plus de 200 appareils en option chez Boeing et Airbus. De la sorte, ce consortium, très proche du Parti Communiste Chinois, se dote d’un impressionnant levier sur les deux géants avionneurs. Car face à leurs modèles d’avenir, ILFC est roi. Vu sa force de frappe d’achats en tir groupé, tout projet qu’il sabre est condamné".

Et si dans 10 ans, ILFC décidait de n'acheter que des avions chinois.

P.S.: une bonne nouvelle dans ce monde de brutes: les irréductibles Gaulois de 2012, ce sont les Islandais. Ils viennent à nouveau de refuser à Huang Nubo, PDG du groupe Zhongkun, le droit de louer 300 km2 de côte islandaise pour y construire un hôtel de luxe et un hippodrome. Ils craignent – et n'ont peut-être pas tort – que Beijing se serve de ce projet pour s'offrir un port en vue de l'ouverture imminente de la route Arctique.

*Cette semaine, L'Hebdo consacre un grand dossier sur la présence chinoise en Suisse, en pleine ascension, et publie la première carte exclusive des investissements chinois dans notre pays. A lire en ligne, ou à découvrir en kiosque, dans le numéro spécial de fin d'année de L'Hebdo.

 

 

Joyeux Noël les salopiauds!

C'est toujours le même cirque: les petits font de la tôle et les gros du golf, pas vrai les Marcel (Ospel et Rohner)? Pas vrai, Peter Wuffli? Vous étiez les patrons de UBS entre 2001 et 2009, une période au cours de laquelle la banque a commis une floppée de crimes et délits pour lesquels le listing des amendes est impressionnant: il y en a pour 2,3 milliards de francs.

Et ce n'est pas fini: les autorités monétaires de Hong Kong, soupçonnant UBS de manipulation des taux d'intérêts viennent d'ouvrir une enquête. (http://www.hkma.gov.hk/eng/index.shtml)

Evidemment, le petit dernier dont la presse s'est fait largement écho, concerne les manipulations du Libor et l'amende de 1,4 milliard de francs que UBS va devoir payer. Ce montant est trois fois plus élevé que l'amende infligée à la banque Barclays, pour les mêmes motifs. Pourquoi ? Parce que chez UBS, qui a joué un rôle clé dans ces manipulations, on a pratiqué à grande échelle. Ali Baba, c'était Thomas Hayes, 33 ans et ils étaient une quarantaine de voleurs à s'envoyer des mails interne, genre: "pense à moi quant tu seras sur ton yacht à Monaco" ou "coco, on devient super bons à ce jeu du Libor, hein !".

Arrogants et stupides, hum… pas grand chose de nouveau depuis l'affaire des fonds en déshérence…

Selon le Wall Street Journal (dont un article publié il y a 4 ans est à l'origine de l'enquête sur le Libor), si le Département de la Justice américain a décidé de ne pas engager de poursuites pénales contre UBS, c'est pour éviter de mettre sa stabilité en danger. Un beau cadeau de Noel !!!

Certes, entre 30 et 40 collaborateurs d'UBS se sont fait virer, mais les chefs, les Ospel, Wuffli et Rohner notamment, vont s'en sortir avec leurs retraites dorées. Des poursuites pénales ? Elles seraient tout à fait envisageables, mais la banque ne compte pas de déposer plainte contre ses anciens dirigeants. Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette…

Une famille si ordinaire…

Nancy Lanza, la mère de l'auteur du massacre de Newtown habitait une petite ville du Connecticut de 27.000 habitants dont 96 % de blancs.

Les 8.325 ménages de cette bourgade ont une revenu annuel médian de 120.000 dollars, soit plus du double de la moyenne américaine. La criminalité y est particulièrement basse: 7 cas de crimes avec violence par 100.000 habitants et par an, contre 281 cas en moyenne dans l'Etat du Connecticut et 676 au niveau national.

Malgré cela, et, comme le dit sa tante Marsha, parce qu'elle vivait seule et qu'on ne sait jamais… Mme Lanza possédait une douzaine d'armes à feu dont un pistolet Glock, un Sig Sauer et une carabine Bushmaster .223 M4 de type militaire.

Nancy Lanza était financièrement indépendante et avait charge de ses enfants suite à son divorce en 2008. Elle aimait jardiner et allait boire un verre de temps en temps à "My Place". Le chef de la police Donald Briggs la décrit comme "une jeune femme très attentionnée, très respectée et bien intégrée dans la communauté".

Nancy Lanza a été la première des 27 victimes et de son fils et de ses propres armes. Un drame qui a ému le monde entier, Pape, Président des Etats-Unis, Secrétaire général de l'ONU et Mme Widmer-Schlumpf inclus.

Un drame qui ne devrait pas nous faire oublier que si le droit de posséder des armes figure dans la Constitution américaine, ce n'est pas une obligation: il n'est marqué nulle part que chaque famille doit avoir au moins un fusil-mitrailleur chez soi.

N'oublions pas non plus que ce même jour, quelque 18.000 autres enfants sont morts. De malnutrition.

Dans un cas comme dans l'autre, on déplore…Et si on agissait ?

 

 

 

 

Myret et les banquiers

En Italie, accuser un homme de "ne pas avoir de couilles" est un délit punissable d'une amende, a estimé la plus haute instance judiciaire du pays. Ne voulant pas risquer de faire jurisprudence en Suisse, je ne dirai donc rien des attributs de nos banquiers.

Mais sacré nom, à part se lamenter, se jeter des sacs de cendres sur la tête, se plaindre d'être incompris et proposer un code de conduite pour détecter les fonds non fiscalisés, ils ne font pas grand chose, si ce n'est brasser du vent.

Cela fait pourtant bien des années qu'ils savaient qu'une guerre commerciale sans merci était en préparation et que pour leurs hypocrites concurrents américains et anglais notamment (et leurs gouvernements), tous les coups seraient permis. Mais, pour paraphraser Jules Renard, ils n'ont écouté que leur courage, qui ne leur disait rien, et se sont gardé d'intervenir.

Comme le sais-je ? J'y étais ! Le Conseil de la Fondation Genève place Financière tout comme l'Association Suisse des banquiers et le Groupement des banquiers privés savaient, il y a 20 ans déjà, que ça allait chauffer. Je sais, je fais un peu "ancien combattant", mais nous étions quelques-uns – y compris l'ancien Procureur général de Genève, Bernard Bertossa – à avoir évoqué le problème avec eux.

Ils auraient eu le temps et les moyens de prendre l'initiative et donc, de bonnes chances de gagner la bataille. Ils ont préféré jouer aux autruches, profitant d'un avantage compétitif (le secret bancaire) bien juteux pour gagner plein d'argent.

Conséquence: comme l'écrit Myret Zaki dans Bilan, "alors que la Suisse doit chasser le moindre franc non déclaré, les sociétés les plus opaques peuvent être crées aux Etats-Unis, au Canada ou au Royaume-Uni… même lorsque les clients donnent tous les signes qu'ils sont blanchisseurs d'argent criminel, des officiels corrompus ou des terroristes".

Elle poursuit: "le plus surprenant, c'est que les divisions internes entre Suisses aient pris le pas sur la seule division réelle qui existe: celle qui oppose la Suisse aux places financières concurrentes, qui récupèrent impunément ses parts de marché".

Mais pour qu'au niveau politique on en prenne conscience et qu'on agisse, il faudrait des parlementaires et des Conseillers fédéraux ayant une vision à long terme et un peu plus de poil au … Bref, il nous faudrait peut-être des Myret Zaki au Conseil fédéral…

Et sans à propos, malgré nos relations quelque peu tendues avec les Etats-Unis, la qualité suisse y a bonne réputation. Le Sig Sauer .223-Caliber Semi-Automatic, utilisé hier par Ryan Lanza lors du massacre dans une école du Connecticut est une des armes à feu les plus populaires aux USA. Comme le dit leur pub: "SIG SAUER rifles are fast gainig a reputation for revolutionary design, exceptional accuracy and engineered reliability"…

 

http://www.bilan.ch/editoriaux/mz/mais-non-ne-defend-pas-le-secret-bancaire

http://www.sigsauer.com/Products/Default.aspx

http://www.swissarms.ch/

Si, si, le crime, ça paie !

Moi, Stuart Gulliver, patron de la banque HSBC, je me marre !

Accusée d'avoir blanchi des milliards des cartels mexicains de la drogue, réalisé un saladier avec des transactions secrètes avec l'Iran et poutzé plein d'oseille de banques saoudiennes finançant le terrorisme, ma banque a annoncé qu'elle allait payer 1,92 milliard de dollars pour mettre fin aux poursuites aux Etats-Unis.

Vous vous demandez pourquoi je me marre ? Vous trouvez l'amende salée ?

Bof… elle correspond à peine à 5 semaines de notre bénéfice de 2011, alors on ne va pas en faire une maladie !

Je me suis fendu d'un petit mea culpa bien torché: "nous assumons la responsabilité de nos erreurs passées (…) HSBC est toutefois aujourd'hui une organisation fondamentalement différente de celle qui a commis ces erreurs"  Et hop, le tour est joué ! Notez bien que j'ai parlé d'erreurs et pas de faute grave…faut quand même pas exagérer…

Poursuites pénales ? Recherche des responsables ? Prison ? Ha ! On voit bien que vous ne connaissez rien à la haute finance. Dire qu'il y a encore des parents qui enseignent à leurs enfants que le crime ne paye pas…C'est sans doute vrai pour les petits et c'est bien ainsi. Moi, je vous le dit: pour éviter les ennuis, il faut voir GRAND.

Se taper de la tôle pour quelques dizaines de milliers de francs est un signe évident d'amateurisme. Pour bien faire les choses, je ne peux que le répéter, il faut voir grand. Grand comme UBS et ses milliards engrangés par l'encouragement à l'évasion fiscale. Grand comme Goldman Sachs et ses milliards de subprimes. Grand comme la Barclays et les milliards qu'elle a générés par sa manipulation du taux d'intérêt interbancaire Libor. Grand comme mes 11 millions de salaire…

Mes collègues avaient aussi fait leur petit mea culpa: UBS s'est excusé devant une commission d'enquête du Sénat américain et Bob Diamond, le patron de la Barclays avait déclaré: "il y a eu clairement des erreurs (sic), je suis désolé". Ca fait un peu mal au ventre de s'excuser pour des trucs qu'on a pas fait, mais franchement, entre ça et la prison, y'a pas photo.

"Too big to fail = too big to jail" comme on dit chez nous (trop gros pour faire faillite et trop gros pour aller en prison). Et ne venez pas me seriner avec votre Jean de la Fontaine et son "selon que vous serez puissant ou misérable//les jugements de la cour vous rendront blanc ou noir". La morale de l'histoire, c'est qu'il n'y en a pas. Amusant, n'est-il pas vrai ?