Il y a bientôt un an, Facebook lançait son opération séduction auprès des producteurs de vidéos, notamment les médias, afin de les débaucher de Youtube pour les inciter à poster leurs contenus sur Facebook. Au Temps, on aime bien expérimenter, on a donc joué le jeu. Il faut dire que Mark Zuckerberg a mis en place une arme quasi-absolue: l’autoplay, un système où les séquences se jouent toutes seules sur l’écran des internautes. Avec pour effet d’offrir aux diffuseurs la fierté de statistiques très impressionnantes. Nous aurions aimé au Temps avoir de telles audiences. Mais ces centaines de milliers de vues sont largement mensongères.
1. La statistique qui fait rêver
Tous les éditeurs (comme nous) ont fait la même expérience: comparées à Youtube ou Vimeo, les statistiques mises en avant par Facebook quant aux vidéos donnent le vertige. Des dizaines de milliers de vues – souvent 10 à 20 fois plus que les plates-formes spécialisées. Notre vidéo la plus virale affiche par exemple près de 315 000 vues (désolé, il ne s’agit pas de chats mais d’une explication infographique du génocide arménien).
2. La désillusion
Pour dépasser ce chiffre factice, il faut aller voir les statistiques détaillées de la vidéo, les «video insights» qui s’atteignent (entre autres) depuis le menu options sous la visionneuse.
La courbe de fidélisation – ou rétention – nous indique alors le nombre d’internautes restant tout au long de la vidéo. Si l’entier des visiteurs a bien commencé à visionner la séquence, ce chiffre baisse très rapidement. Chez nous, c’est une constante que nous observons sur toutes nos vidéos. Après une dizaine de secondes, le nombre de personnes visionnant la vidéo baisse drastiquement.
C’est la conséquence de l’autoplay. Puis elle s’arrête lorsque la personne fait défiler son flux de nouvelles et cache la vidéo. Par déduction, il semblerait donc qu’une nouvelle Facebook s’affiche en moyenne une dizaine de secondes.
De plus, la vidéo qui démarre automatiquement est (heureusement) muette: à moins d’avoir réalisé un montage fait pour être compris sans son – et certains s’y mettent – il y a peu de raisons à comptabiliser cette audience passive.
3. Le vrai chiffre
Alors comment comptabiliser les «vrais visionnements»? Ici, tout se complique et c’est à vous, producteur, de savoir ce que vous visez: considérez-vous que seules comptent les vues de l’entier de votre séquence? Ou votre message essentiel est-il délivré après 20 ou 30 secondes déjà? Certains, comme le New York Times, ont adapté leur format et diffusent une bonne part de vidéos très courtes qui servent de mise en bouche (comme ce «blacktwitter after #ferguson») .
Facebook propose une information plutôt précieuse: le nombre de personnes ayant vu plus de 30 secondes.
Quitte à pleurer à chaudes larmes face à des statistiques moins glorieuses, nous avons opté pour une solution plus radicale: ne prendre en considération que les personnes ayant réellement demandé à voir la vidéos.
La deuxième courbe (en bleu foncé sur l’écran ci-dessus) est alors bien plus intéressante:
- on voit immédiatement qui, parmi ceux qui ont décidé de voir notre séquence explicative, est resté jusqu’au bout précisément. Dans ce cas, bonne nouvelle: une bonne partie de l’audience a regardé presque jusqu’au bout notre vidéo de plus de 2 minutes.
- on obtient aussi le pourcentage de ceux qui ont demandé à voir la vidéo (caché par le menu dans l’écran ci-dessus).
Dans notre cas, sur les 263 303 vues (à noter: le chiffre diffère de celui indiqué sur la première capture d’écran, sans que nous ne puissions expliquer pourquoi), seules 17 831 (soit 7%) sont des vues «actives».
Dans la majorité des cas, le chiffre de Facebook se rapproche ainsi des statistiques de Youtube. Dans notre pratique, nous utilisons les deux plates-formes de manière complémentaire: Facebook pour générer un pic d’audience sans lendemain (en trois jours, nos contenus deviennent obsolètes sur la plate-forme) et Youtube pour créer du trafic à long terme.
Pour aller plus loin, nous aimerions nous assurer qu’un internaute activant le son d’une vidéo soit comptabilisé dans les vues «clicked to play» mais nous n’avons pas trouvé cette info. Il existe un guide expliquant les statistiques vidéo de Facebook mais il est plutôt succinct.
PS. Pour tous ceux qui n’aiment pas les images qui bougent toutes seules, un réglage permet de désactiver l’autoplay.