Alors que les résultats de la votation sur l’asile sont tombés, il importe de se demander s’il valait la peine de lancer le referendum. Les voix critiques de l’ensemble du spectre politique avaient prévenu que le referendum serait certainement contreproductif. On s’attendait à une campagne propice à tous les dérapages, menée sur le dos des demandeurs d’asile et des migrants en général.
Surprise : la campagne a plus été inexistante que déshonorante. Les organisations de défense des migrants ont pu faire valoir leurs arguments dans de nombreuses rencontres et conférences, sans jamais parvenir à lancer une véritable campagne. Etrange situation où les adversaires du referendum semblaient particulièrement absents, se bornant à répéter sans cesse le mantra de l’ « attractivité de la Suisse».
Ce dimanche, c’est surtout une certaine façon de faire de la politique et de poser la question de l’asile qui sort gagnante. Une politique « symbolique » qui fait tourner la machine législative pour donner l’impression de prendre des mesures fortes. Qu’importe l’efficacité de ces décisions, seule compte leur importance symbolique. Ainsi, sur nombre de propositions particulièrement disputées, on a entendu les promoteurs des changements répéter en boucle la nécessité de faire baisser l’attractivité de la Suisse. Mais où sont les chiffres qui montrent que les mesures urgentes de septembre 2012 pourraient permettre d’atteindre ce but? Au-delà de débats sur la tradition humanitaire suisse, les citoyens ont-ils reçu des preuves tangibles de l’efficacité des mesures proposées ?
Sans surprise sur le fond, cette politique du symbole a reçu aujourd’hui une reconnaissance démocratique impressionnante par son ampleur. Et cela de la meilleure façon possible, ayant réussi à éviter tout débordement xénophobe. Politiquement, la cause des demandeurs d’asile et des migrants est devenue plus dure, la majorité des citoyens ayant montré qu’elle ne se souciait pas de chiffres et de preuves. A ce titre, le score massif indique même que les politiciens du symbole ont reçu une forme d’encouragement populaire. Pourvu que le Parlement fédéral légifère, le reste importe peu. Mais les citoyens doivent se méfier et exiger des décideurs politiques des preuves tangibles de l’efficacité des lois promulguées. A défaut, on risque de basculer dans le brassage d’air législatif mené sur le dos de ceux qui n'ont aucun moyen de se défendre politiquement.