Le temps des réfugiés

Renvois impossibles vers l’Érythrée, des solutions pragmatiques s’imposent

Aujourd’hui une manifestation a eu lieu à l’occasion de la remise d’une Pétition adressée au Grand Conseil et au Conseil d’Etat de Genève. Cette pétition, signée par près de 4’000 personnes, soutient les requérants Érythréens déboutés de l’asile et démis de leur permis F (Admission provisoire).

Les signataires comme moi considèrent que les conditions ne sont pas réunies pour organiser des renvois vers l’Érythrée et que cette politique ne fait que grossir le nombre de personnes à l’aide d’urgence encourageant la clandestinité de jeunes dont beaucoup ont déjà fait leurs preuves dans le monde professionnel en Suisse.

La pétition “Droit de rester pour les Érythréen-e-sdemande aux autorités politiques genevoises de ne pas exclure de l’aide sociale cette  population et d’éviter leur précarisation. Elle demande aussi d’autoriser les Érythréens déboutés à poursuivre leur formation dans le canton et de leur permettre de travailler à Genève. Elle prie les autorités cantonales d’intervenir auprès du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) pour qu’il suspende les levées d’admissions provisoires et pour qu’il accorde aux Érythréens le droit de rester en Suisse en mettant en place une action de régularisation extraordinaire.

Gardons à l’esprit que le SEM est dans l’incapacité d’organiser des renvois vers l’Érythrée. L’article Bloqués en Suisse de Marie Vuillemier (Swissinfo.ch) démontre bien la situation ubuesque dans laquelle les Érythréens se retrouvent aujourd’hui. D’ailleurs, la Suisse est aussi le seul pays à rendre des décisions de renvoi à l’égard des ressortissants Érythréens.

Revirement politique injustifié vis-à-vis des requérants Érythréens

 

En s’appuyant sur plusieurs jugements du Tribunal administratif fédéral (TAF) en 2017 et en 2018 (1) et sur des informations impossibles à vérifier sérieusement sur le terrain, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) a modifié drastiquement sa politique vis-à-vis des requérants d’asile originaires de ce pays connu pour avoir l’un des pires bilans en matière de violations des droits humains.

 

Depuis, beaucoup d’Érythréens ont reçu des décisions de renvoi et le SEM réexamine aussi depuis avril 2018 les dossiers de 3000 personnes admis à titre provisoire (Permis F) qui résident en Suisse depuis déjà quelques années.

 

 

Un rapport de l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers (ODAE) explique ce durcissement en se basant sur des cas concrets. Le rapport intituléDurcissement à l’encontre des Érythréen·ne·s : une communauté sous pression“ explique la dérive juridique que cette politique pose sur le droit d’asile en général.

 

Trouver des solutions pragmatiques

 

La protection des requérants d’asile et des réfugiés à Genève et en Suisse est trop souvent abordée de manière partisane ce qui nuit aux requérants d’asile en général mais aussi aux contribuables suisses et étrangers résidents dans notre pays. Pourquoi? Parce que les décisions des autorités d’asile peuvent s’avérer incohérentes, inefficaces, dangereuses pour les personnes concernées et finalement coûteuses pour les PME en Suisse qui ont commencé à former des apprentis performants et appliqués. Ces décisions ont aussi un impact négatif sur les cantons qui allouent des subventions importantes dans  des programmes d’intégration de personnes maintenant déboutées et pourtant utiles au développement économique de la Suisse.

 

Faire disparaître ces personnes dans la clandestinité n’est pas une option intelligente. En ce qui concerne les personnes érythréennes déboutées de l’asile et en ce qui concerne les personnes érythréennes démises de leur permis F (admission provisoire) qui ne peuvent plus travailler ou continuer leurs formations, les femmes et les hommes politiques de Genève ont l’occasion de décider s’il est préférable que les Érythréens restent dans la lumière et ne soient pas forcés à la clandestinité en Suisse. Elles et ils ont l’opportunité de décider en faveur de la continuation de leur formation et de leur emploi puisque les renvois vers l’Érythrée sont impossibles.

 

Pas besoin de montrer une quelconque humanité ou même une fibre sociale. Il suffit d’être pragmatique et penser aux rentrées fiscales, à la baisse des coûts, aux futurs talents qui feront la joie des Suisses.

 

Lire aussi:

 

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(1) Arrêt E-5022/2017 du 10 juillet 2018 sur l’Érythrée et arrêt D-2311/2016 du 17 août 2017.

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