Une chronique politique sans parti pris

L’affaire Alain Berset

 

Quelques médias alémanique ont poussé le ridicule jusqu’à souhaiter la démission d’Alain Berset. Sans raison précises sinon l’accumulation de faits divers. Un bon conseiller fédéral doit être sans histoires, aussi banal que possible, cible inexistante des journalistes. Or Berset est le contraire. Les journalistes le traquent et dévoilent avec des trémolos dans la plume des incidents de sa vie de tous les jours. A savoir : A.B.  en WE en Allemagne, rappelé d’urgence à Berne s’est fait ramener par sa voiture de fonction ; un de ses collaborateurs aurait eu éventuellement une condamnation pénale ;  A.B. a piloté un avion sur le territoire français où il a traversé un espace militaire interdit.

Rien de tout cela ne correspond à une faute pénale commise par A.B. ou a des erreurs dans sa gestion de la Confédération. En fait, certains essaient de liquider un contentieux datant de l’épidémie. Forcément A.B. apparaissait souvent en conférence de presse, ce qui suffit à susciter des jalousies de collègues. Il transmettait des décisions, pas toujours agréables comme le confinement, l’arrêt de certaines entreprises, la pression pour le vaccin. Aussitôt des voix se sont élevées pour le taxer de dictateur, en oubliant que le Conseil fédéral est solidaire dans toute décision collégiale et que celui qui la communique n’est pas plus qu’un porte-parole.

Les mesures pondérées prises par notre gouvernement ont réalisé le tour de force de contenir l’épidémie dans les capacités des hôpitaux sans nuire démesurément à l’économie ou à la formation. Que le prétendu dictateur ait rempli sa fonction et réussi sa tâche n’a pas désarmé les critiques, bien au contraire. Tous ceux qui dès le début ont voué aux gémonies le vaccin se sentent maintenant un peu ridicules et même coupables. Alors ils cherchent un bouc émissaire. Le simple fait de piloter un avion privé est considéré en soi comme une attaque de l’environnement : un Conseiller fédéral ne devrait pas se comporter en pilote. Cela ne fait pas sérieux. Cela laisse supposer un très bas niveau d’aspiration culturelle, incompatible avec la gouvernance. La loi ne l’interdit pas mais bien les convenances.

Le fond du fond est sans doute la pente irrésistible de la Suisse pour l’acratie, l’absence de pouvoir, la suspicion jetée sur ceux qui en occupent la fonction. Et l’apparence, car le Conseil fédéral ne peut rien sans le parlement attentif à l’opinion publique qui est le véritable souverain. Un Conseiller fédéral n’est qu’un rouage sans autonomie dans une prodigieuse horlogerie politique qui tourne en routine.

On ne peut donc le critiquer et vouloir l’exclure qu’à partir de bagatelles. Alors qu’il faudrait admettre qu’un conseiller fédéral est un homme comme un autre et qu’il a donc droit à l’erreur. Mais le peuple suisse nourrit l’illusion qu’il serait en quelque sorte une exception à l’Histoire, le peuple le plus vertueux du monde. Un Conseiller fédéral doit se mettre à l’unisson de cette chimère et exercer un contrôle rigoureux sur ses actes ou ses paroles, de façon à ne jamais encourir non seulement un reproche, mais le soupçon qu’un reproche puisse être mérité. Il ne suffit pas d’éviter les fautes, aussi mineures soient-elles, au Code. Il faut éviter d’ouvrir la voie à des soupçons imaginaires. Il faut se comporter comme un saint en sachant qu’on est l’objet d’un procès en décanonisation perpétuel.

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