Une chronique politique sans parti pris

La conversion du PDC

 

 

Ce parti dans sa composition actuelle traîne comme un boulet l’héritage du parti catholique conservateur de 1848, qui s’est appelé au fil des décennies : parti populaire catholique ; parti conservateur catholique ; parti conservateur-chrétien social ; parti démocrate-chrétien depuis 1970. Ces changements d’étiquette n’ont pas empêché son érosion de 23,4% des suffrages en 1963 à 11,4% en 2019. Il deviendra sans doute l’Alliance du centre en fusionnant avec le PBD et le PEV et en abandonnant toute référence confessionnelle, puisque celle-ci ne garantit plus un électorat inconditionnel. Il n’y a plus que 13% des catholiques qui soient fidèles à la pratique dominicale et 59% à croire en un Dieu unique. Le parti a suivi la confession dans son effritement. Son avenir se situe dans les valeurs du centre politique qui ne coïncident pas nécessairement avec celles défendues par l’Eglise catholique. La distanciation vient de s’opérer en matière d’homosexualité, que l’Eglise considère comme un péché et que la politique cesse de discriminer.

En témoigne la publication dans Le Temps du 3 juin d’un article plaidant en faveur du mariage pour tous, sous la signature du Conseiller national Vincent Maître. Il se réfère objectivement aux articles 8 et 14 de la Constitution fédérale qui garantissent le droit au mariage et le refus de toute discrimination du fait du mode de vie. Il s’agit de valeurs fondamentales qui se sont petit à petit imposées contre des traditions archaïques. Jadis dans nos contrées et aujourd’hui encore dans d’autres, l’homosexualité était punie de peine capitale. Par la suite elle a encore subi une forme de réprobation et de mise à l’écart. Il a fallu que médecine et psychologie finissent par imposer l’idée que l’homosexualité relève d’une tendance naturelle, commandée par la génétique ou par l’environnement, et qu’elle ne constitue ni une maladie, ni une perversion.

 

Dès lors, le Conseil national a accepté la loi du mariage pour tous par le score écrasant de 132 voix contre 52, avec des suffrages provenant non seulement du PDC mais même de l’UDC. Ainsi se concrétise dans la loi une valeur qui devient fondatrice de notre société : l’Etat n’a pas la prérogative de spécifier ou de sanctionner les relations sexuelles entre adultes consentants. Il lui reste à réprimer les violences dans ce domaine comme le viol, la pédophilie, le harcèlement, le féminicide, ce qu’il s’abstenait curieusement de faire antérieurement. On sort ainsi d’une double pratique fondée sur l’hypocrisie : la norme contraignait tout le monde sans protéger les faibles.

 

Il reste maintenant à poser la question du mariage civil lui-même. A quoi sert-il s’il n’augmente pas, comme maintenant ,l’impôt fédéral sur le revenu et s’il ne diminue pas les pensions ? D’où sort cette cérémonie communale plus ou moins expédiée comme une corvée par un personnage mandaté à cet effet ?

 

La France a inauguré en 2017 une procédure révolutionnaire : les divorces par consentement mutuel, soit 55% des cas, ne devront plus passer devant un juge pour être entérinés. Si les époux sont d’accord pour la garde des enfants, la pension alimentaire et le partage du patrimoine, il suffit de passer devant un notaire pour confirmer ces conventions. La République vient de faire un grand pas en arrière, dont notre Confédération devrait s’inspirer.

 

Un pas en arrière, car c’est bien la République qui a inventé en 1792 le mariage civil, qui n’existait pas sous la Monarchie, ni ailleurs dans le monde. Il y avait d’une part un éventuel contrat devant notaire pour régler les questions financières et d’autre part un mariage religieux pour authentifier l’engagement moral de fidélité, souvent écorné dans la pratique. Bien entendu l’adultère des femmes était réprimé lourdement tandis que les maris y échappaient.

 

Le mariage civil est une institution hybride, où l’Etat se mêle de ce qui ne le regarde pas. Dans certains pays anglo-saxons, des ministres du culte peuvent célébrer un mariage religieux qui vaut mariage civil. En Israël n’existe que le mariage religieux. On peut donc abolir le mariage civil, sinon comme une application dérisoire du principe de laïcité où l’on abroge la religion d’Etat pour la remplacer par une religion de l’Etat.

 

Dès lors que la France revient pour le divorce à une procédure devant notaire, on peut se demander pourquoi le mariage en Suisse a encore besoin de se célébrer devant un employé municipal affecté à cet office, sinon pour procéder à un simulacre de bénédiction laïque. Un notaire peut tout aussi bien enregistrer le consentement des époux et leurs conventions financières. On en reviendrait à la situation originelle. Aux époux de décider ensuite s’ils souhaitent un mariage religieux, qui seul peut enregistrer un engagement moral de fidélité.

 

 

 

 

 

 

 

 

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