Un secret de Polichinelle vient d’être éventé : les candidats suisses à l’EPFL réussissent moins bien en première année que les étudiants étrangers. Seulement 43% de réussites contre 57% pour les Français et même 61% pour les autres étrangers. Les résidents de la Suisse seraient-ils moins intelligents et (ou) moins motivés ? L’EPFL tente de rassurer en démontrant que si l’on sélectionnait les Suisses comme les étrangers, ils réussiraient aussi bien. C’est l’évidence même, cela ne valait même pas la peine de le dire.
Car effectivement tout titulaire d’une maturité suisse, quelle que soit l’option et quel que soit le résultat, doit selon la loi être accepté à l’EPFL. En revanche celle-ci peut fixer les critères d’amission des étudiants provenant de l’étranger. Il faut un bac scientifique avec une note de 16 en moyenne. Ce barrage a été mis en place pour freiner le flux de candidats étrangers attirés par l’excellente réputation de l’EPFL, probablement avec l’ETHZ la meilleure école d’ingénieurs du continent.
Les conséquences sont évidentes. Mieux un étudiant est préparé, plus il a de chances. On est presque gêné de débiter de telles lapalissades mais apparemment elles n’ont pas pénétré le cerveau des décideurs. On peut ajouter qu’un professeur essaie toujours de viser le niveau moyen de son auditoire. Trop au-dessus il perd les plus faibles, trop en dessous il ennuie les meilleurs.
Et donc ces excellents candidats étrangers représentent une aubaine pour l’institution Sa réussite ne dépend pas seulement de la qualité des professeurs mais aussi des chercheurs qu’elle réussit à recruter et former. Il en est ainsi aux Etats-Unis où les meilleures universités de Californie (Berkeley, Stanford, Caltech) ne recrutent bien évidemment pas leurs étudiants parmi les petits Californiens mais aussi à travers le vaste marché de intelligences de tout le pays et au-delà. Le défi est le même pour l’EPFL. Si le recrutement était limité à la Suisse, sa qualité serait bien moindre. Autre évidence.
Mais pourquoi sélectionner plus sévèrement les étrangers, en dehors de leur afflux ? Ne pourrait-on imaginer un système où tous les candidats sont traités de la même façon pour recruter uniquement les meilleurs sans tenir compte de leur passeport. Le passeport rouge à croix blanche ne garantit pas qu’ils bénéficient d’une illumination du Saint Esprit, qui leur soufflerait les bonnes réponses aux examens. Au contraire, engager des porteurs de maturité mal préparés en mathématiques et physique est un véritable traquenard. Parce qu’ils ont le droit juridique de s’inscrire, on les trompe en laissant croire que cela garantit leur réussite.
On peut ajouter que la Suisse souffre du défaut de 26 systèmes gymnasiaux différents. Le communiqué de l’EPFL ne se risque pas à des comparaisons entre cantons. Mon expérience personnelle est que les candidats du Valais et de Fribourg sortaient de la moyenne. Il serait intéressant de confirmer ou d’infirmer cette impression.
Dans une école d’ingénieurs il n’est pas possible de tricher avec sa formation antérieure. Un certain nombre de matières doivent être maîtrisées à fond. On n’a pas le temps de recommencer leur acquisition. Au-delà de la réussite à l’EPFL, cela pose la question d’une unification des exigences au niveau du gymnase.
Et enfin, pourquoi ne pas faire simple plutôt que compliqué. S’il y avait un examen d’entrée pour tous, le problème n’existerait plus. Au dire de l’EPFL c’est impossible. Pourtant c’est le procédé utilisé par beaucoup d’écoles étrangères.