Chroniques de Charclo

Mardi 15 décembre, Renens, 22 heures et des poussières.

Chronique de Charclo 01:

Mardi 15 décembre, Renens, 22 heures et des poussières.

Je suis adossé au mur de la Coop, emmitouflé dans une couverture, ma tablette sur les genoux je regarde les nouvelles fraiches d’un monde pourri. Un sac à dos, une brique de thé froid, des chips, feuilles et tabac à rouler sont posés négligemment à mes pieds. Une homme d’une trentaine d’années marche dans ma direction, brun et basané, une tête de rebeu, il s’arrête devant moi et me salue.

– Excusez-moi vous n’avez pas de maison, d’appartement?

– Ben non…

– Qu’est ce qui vous est arrivé, pour vous retrouver comme ça?

– Bah rien d’extraordinaire, en général c’est soit la faute d’un proprio soit celle d’une femme, cette fois c’est une femme.

– Vous avez besoin de quelque chose?

Étant habitué à l’indifférence et à l’égoïsme des passants sur le moment la question avait un coté surréaliste.

– Heu non, merci c’est sympa mais j’ai ce qu’il me faut, lui répondis-je en désignant mon thé froid et mes chips. Il me dit au revoir puis fait demi-tour.

Dix minutes plus tard j’aperçois le même homme accompagné d’une jeune fille, elle doit avoir 12-13 ans et tient une assiette cellophanée, lui un sac plastique, les deux viennent dans ma direction.
Le père (oui ils sont père et fille) m’explique que ça fait depuis la veille que sa gamine me voit au même endroit et lui demande s’il s’agit d’un SDF et ce qu’on peut faire pour lui. Ils sont donc venus m’apporter un émincé de poulet avec une sauce aux champignons, des choux-fleurs, du riz et dans le sac plastique il y avait des bonbons (Haribo-Coca) et deux cannettes de jus de fruit. Ensuite il m’a donné son adresse ainsi que son nom de famille afin que je puisse mettre l’assiette et les couverts dans la boîte à lettre. J’ai mangé, c’était chaud, c’était bon et lorsque j’ai été mettre les couverts dans la boîte à lait il avait une carte signé “Hamed et Yasmina” avec une billet de 10.- .

En parlant des anars Brel chantait “Y’en a pas un sur cent et pourtant ils existent” apparemment c’est pareil pour les gens bien, il y en pas des masses mais on est bien content de tomber sur eux.

 

Traduction de l’image: Sadaqa en arabe qui veut dire aumône.

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