Les Américains

Bill Clinton met son épouse, la ministre de la Justice et l’administration Obama dans l’embarras

In this photo taken May 5, 2016, former President Bill Clint speaks in Portland, Ore. while campaigning for his wife, Democratic presidential candidate Hillary Clinton. The former president spoke with Attorney General Loretta Lynch during an impromptu meeting in Phoenix, but Lynch says the discussion did not involve the investigation into Hillary Clinton's email use as secretary of state. (AP Photo/Don Ryan)

Bill Clinton vieillit mal. Lui qui fut sans doute l’un des présidents les plus habiles et les plus doués quand il s’agissait de s’adresser à Middle America, à la classe moyenne, vient de commettre une bourde sans précédent. Lundi dernier, il s’est trouvé sur le même tarmac que Loretta Lynch, la ministre de la Justice à un aéroport de Phoenix en Arizona. Cette apparente coïncidence a donné des idées à Bill Clinton qui est allé rendre visite à Loretta Lynch dans son avion officiel. La discussion a duré environ une demi-heure.

L’épisode fut suffisant pour déclencher une tempête politico-médiatique. Pour Bill Clinton, le moment n’aurait pas pu être plus mal choisi. Son épouse Hillary Clinton, probable candidate officielle à la présidentielle du 8 novembre prochain, fait l’objet d’une enquête du FBI au sujet de la messagerie privée qu’elle a utilisée exclusivement quand elle était secrétaire d’Etat de 2009 à 2013. La brève visite de l’ex-président américain dans l’avion de la ministre de la justice ajoute de nouveaux doutes sur la capacité de jugement des Clinton. Elle peut laisser entendre que les Clinton sont au-dessus des lois appliquées aux communs des mortels et que le système judiciaire fera tout pour ne pas inculper la candidate à la Maison-Blanche.

Loretta Lynch, qui fut nommée procureur fédérale à Brooklyn par Bill Clinton, a été mise dans une situation impossible. Elle a dû expliquer aux médias que la discussion ne s’était articulée qu’autour de la vie personnelle de chacun, de leurs grands-enfants. Elle a aussi dû préciser qu’elle ne chercherait pas à bloquer ou à modifier les recommandations faites par le FBI dans le cadre de l’enquête sur les emails d’Hillary Clinton. De la part de Loretta Lynch, ce fut sans doute une erreur de jugement de recevoir Bill Clinton. Mais refuser une visite même impromptue d’un ex-président des Etats-Unis, qui plus est qui vous a nommé à un poste de procureure fédérale n’est pas une décision facile.

La ministre de la Justice Loretta Lynch s’explique lors d’une conférence à Aspen, (AP Photo/Jordan Curet)

Hillary Clinton est elle-même restée muette à ce propos avant de communiquer samedi qu’elle avait été auditionnée par le FBI. Une manière de montrer que l’enquête n’est en rien biaisée en dépit des impressions. Son adversaire républicain Donald Trump ne pouvait pas espérer un meilleur cadeau de la part de Bill Clinton. L’affaire renforce l’idée propagée par le milliardaire new-yorkais et partagée par nombre d’électeurs que les Clinton sont toujours au-dessus des lois. Le principale problème d’Hillary Clinton est le manque de confiance qu’elle suscite auprès des électeurs notamment en raison de la manière dont elle a défendu l’usage exclusif d’une messagerie privée au Département d’Etat. La présente controverse renforce encore ce sentiment. Ce d’autant qu’Associated Press a révélé voici quelques jours que les 55 000 courriels qu’Hillary Clinton a remis au Département d’Etat ne représentaient pas tous les emails qui pouvaient susciter l’intérêt de l’administration. L’ex-cheffe de la démocratie avait déclaré avoir donné tous les emails professionnels et effacé les emails privés de son serveur. Or selon AP, plusieurs emails effacés et retrouvés par les enquêteurs ont été jugés d’ordre professionnel.

Pour l’administration de Barack Obama, c’est aussi embarrassant. Le président démocrate, qui a certes attendu que son ex-secrétaire d’Etat remporte les primaires démocrates pour la soutenir officiellement dans l’optique de la présidentielle, s’est lui aussi beaucoup avancé. Or rien ne dit que l’enquête ne va pas aboutir, même si cela paraît improbable, à une inculpation d’Hillary Clinton.

L’épisode Bill Clinton-Loretta Lynch n’a duré qu’une demi-heure. Mais il va servir à Donald Trump au moins jusqu’au 8 novembre prochain. Bill Clinton, un boulet pour la campagne électorale de son épouse? On a l’impression de revivre la campagne de 2008. En pire.

Quitter la version mobile