D'ici et d'ailleurs

Féminin-masculin, ces mots androgynes

Contrairement à l’allemand qui possède un genre neutre, en français, il faut choisir: un nom est soit féminin, soit masculin. Sauf que. Des noms androgynes existent aussi. Comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, les francophones parlent transgenre sans y penser.

Iris, prénom masculin et nom commun masculin

Si le mot “après-midi” était un être humain et vivait en Suisse, je lui conseillerais d’opter pour le masculin, histoire d’éviter une perte de salaire de 20%. Et si ce même mot se décidait pour le féminin, il est probable que l’Après-midi ferait grève le 14 juin. Après-midi est, en effet, indifféremment masculin ou féminin. Cette bande de vieux machos de l’Académie française a certes une préférence pour le masculin, mais cela ne nous regarde pas.

Mi-temps, entre sport et boulot

D’autres mots sont comme les mérous, ils peuvent changer de sexe. Mais contrairement aux poissons, les mots changent alors de sens. C’est le cas de “mi-temps”. En football, par exemple, la mi-temps désigne la période de 15 minutes qui permet d’aller se chercher une bière et/ou de l’éliminer sans rater l’action du siècle. Au travail, un mi-temps (masculin) est un job dans lequel vous êtes payé la moitié moins que pour un plein-temps, tout en travaillant largement plus que les heures indiquées sur votre contrat. Pour les voisines et voisins français qui nous liraient: Pénélope Fillon constitue une exception confirmant cette règle.

Délices, féminin-pluriel

Certains mots adoptent un comportement curieux en société: masculins lorsqu’ils sont au singulier, ils deviennent féminins lors qu’ils sont au pluriel. Amour, délice et orgue sont ces trois spécimens ayant le bon goût d’opter pour le féminin au pluriel, chouchous absolus des dictées. À l’inverse, selon la grammaire, il suffit d’un seul nom masculin pour masculiniser une cohorte de féminins pluriels. C’est pourquoi on veillera à adopter un langage égalitaire ou épicène, à l’image du bon usage proposé par le Canton de Vaud.

Appelez-moi Bob

À celles et ceux que ce billet agacerait, je confierai cette expérience personnelle: mes parents m’ont choisi un prénom qui sonne, à l’oreille, pareil au féminin et au masculin. Le tout complété par un patronyme qui est un prénom masculin. Cette heureuse combinaison a pour conséquence un abondant courrier s’adressant à “Monsieur Robert.” Et l’on me demande souvent, lorsque je dois décliner mon identité: “Robert, le nom?” Ce à quoi je réponds: “Appelez-moi Bob, ce sera plus simple”.

Il reste que ces deux petites lettres séparant Emmanuelle d’Emmanuel coûtent à de nombreuses femmes une partie de leur salaire, voire une promotion. Pour elles, et pour que la loi sur l’égalité soit réellement appliquée, je serai dans la rue le 14 juin.

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