Lorsque la réalité dépasse la fiction !

Durant l’entre-deux-guerres, la peur d’un nouveau conflit devait faire naître les idées les plus folles dans les esprits. Les fantasmes d’armes ultra-modernes, de technologies secrètes et de recherches occultes allaient nourrir ces craintes.

L’époque s’y prêtait, le développement de nouvelles technologies, que ce soit l’aviation, le cinéma, le téléphone créait un climat propice à ces visions d’anticipation, ce d’autant plus que la guerre ravageait tout comme de nos jours de larges parties de la planète, quand bien même la guerre mondiale avait pris fin. La guerre civile russe allait se poursuivre jusqu’en 1923 en parallèle au conflit entre la Russie et la Pologne qui devait s’éteindre, quant à lui, en 1921. La Grèce et la Turquie se confrontèrent de 1919 à 1923, alors que la guerre du Rif en Afrique du Nord faisait régulièrement couler l’encre des journaux européens jusqu’en 1925. L’éclatement de la guerre civile chinoise en 1927 suivi par la conquête de la Mandchourie par le Japon en 1931, sans oublier le krach boursier de 1929, ne firent qu’ajouter à l’angoisse du temps.

En 1928, la presse helvétique annonçait ainsi que la France, l’Angleterre et l’Allemagne procédaient à des expériences avec un nouveau moteur d’avion, avion qui aurait été complètement silencieux et invisible, et capable de lancer – rappel des gaz de combat de la Première Guerre mondiale – des gaz mortels sans être repéré. La presse d’alors précisait que les laboratoires russes et allemands, menaient des expériences utilisant des ondes électriques assez puissantes pour foudroyer à distance des êtres humains[1], une peur irrationnelle attachée aux deux pays les plus craints de cette époque. La Russie devenue bolchevique, symbole de la révolution ouvrière contre les classes dirigeantes, était devenue « l’ennemie » potentielle contre laquelle il convenait de se prémunir, alors que l’Allemagne, malgré sa défaite et son désarmement, avait démontré en 1923 des velléités de redressement militaire avec l’échec de la tentative de coup d’État de la Reichswehr noire, l’armée clandestine de Bruno Ernst Buchrucker.

Ces craintes d’armes révolutionnaires allaient s’avérer justifiées, en partie du moins, quelques années plus tard.

À quoi devons-nous nous attendre aujourd’hui ?


[1][1] Gazette de Lausanne, 08.08.1928, p. 4.

 

Christophe Vuilleumier

Christophe Vuilleumier est un historien suisse, actif dans le domaine éditorial, et membre de plusieurs comités de sociétés savantes, notamment de la Société suisse d'histoire. On lui doit plusieurs contributions sur l’histoire helvétique du XVIIème siècle et du XXème siècle, dont certaines sont devenues des références.