Manuel pour habitants des villes

L’échec d’un préfet. Sur la manifestation interdite à Paris.




Il fallait y être pour le voir. Dans la très huppée rue de Martyrs, entre les pâtisseries de renom et les traiteurs vegans, des riverains en train d’acheter leur pain à 7 euros pièce, surpris par la course de jeunes manifestants poursuivis de près par des brigades d’intervention mobiles. Plus loin au carrefour de la rue Rodier et de la rue Maubeuge, des CRS gazaient des policiers non protégés. Panique à bord, les ordres se contredisent. Un autre petit cortège de 500 personnes descend en courant la rue des Martyrs. Un gradé s’emballe : dirigez-vous vers la synagogue rue Buffault ! Son subalterne : Oui, mais par où y aller? Le groupe de policiers part en courant dans la direction inverse. Il y avait du désordre dans la manifestation interdite à Paris, ce samedi 15 mai, mais il y en avait aussi dans la police, avec plusieurs départs de cortèges sauvages. J’en ai compté 6 entre 15:00 et 17:00. Il y en a probablement eu beaucoup plus.  La journée aurait pu être un vrai moment de démocratie, avec une grande manifestation unitaire, regroupant cette jeunesse dite indifférente et apolitique. C’aurait pu être une grande manifestation cadrée puisque la responsabilité en était pleinement assumée par ses organisateurs. Au lieu de cela, ce fut une journée de désordre, de frustration pour des milliers de manifestants et de déni démocratique. Ce fut une journée de répression pour une colère justifiée qui aurait dû pouvoir s’exprimer dans un pays qui se dit républicain. Ce fut une journée dangereuse aussi avec des riverains non-sympathisant conspuant les manifestants depuis leur fenêtre. Au-delà de la responsabilité politique d’interdire, ce fut aussi un grand moment de désordre pour la police débordée par la beauté d’une jeunesse qui, parfois pour la première fois, sortait dans la rue. Un tel échec, une telle incapacité ne mérite-t-elle pas une démission?
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