Des changements durables

Merci M. Weber

Peu de figures auront si fortement incarné l’écologisme que le regretté Franz Weber. Son tempérament bouillonnant et son énergie à toute épreuve ont façonné au fil des décennies la légende d’un infatigable avocat de la Nature, qu’il aura défendue jusqu’au bout.

Franz Weber était un précurseur, qui avait réussi à mettre la protection des paysages, des animaux et de leur environnement à l’agenda politique à une époque, les années 70, où tout cela était trop souvent perçu comme d’inutiles obstacles au progrès et au développement de l’économie. Ne se laissant pas abattre par les attaques pleuvant de toutes parts, il a su aller de l’avant avec une détermination impressionnante, remettant à maintes reprises l’ouvrage sur le métier et surmontant avec brio les inévitables écueils et échecs que toute personne s’engageant pour ces causes trouve sur son chemin.

D’aucuns lui ont reproché ce “jusqu’au-boutisme”, un style parfois agressif et peu enclin à la négociation et au compromis, vertus capitales dans un pays qui en a fait les moteurs de son système politique. Mais peut-on vraiment lui en vouloir ? Aurait-il obtenu les mêmes victoires s’il avait fait preuve de retenue et avait par exemple poliment demandé aux promoteurs immobiliers de bien vouloir arrêter de bétonner les vallées alpines, ou aux chasseurs  canadiens de ne plus massacrer à coups de bâtons les bébés phoques ? Qu’il me soit permis d’en douter…

La destruction de l’environnement et des paysages répond à des intérêts économiques importants, et est menée le plus souvent par des personnes sans grands scrupules, mais avec des moyens colossaux et des connexions politiques importantes. Face à ces rouleaux compresseurs, ce n’est malheureusement bien souvent qu’avec toute l’énergie de la colère qu’on peut être entendus et écoutés. Là où la politique a ses temps longs et ses discussions parfois interminables pour trouver le plus petit dénominateur pouvant convenir à toutes les parties, Franz Weber avait pris le parti de la vitesse et du rapport de forces, dans lequel on gagne ou on perd tout, sans demi-mesures.

Sans oublier que l’homme s’est montré précurseur, presque visionnaire, et il y a fort à parier que les gérants de stations de ski en Valais et ailleurs le remercieront à titre posthume dans quelques années pour avoir sauvé ce qui pouvait encore l’être des paysages alpins, de la même manière que celles et ceux qui l’avaient combattu en Lavaux doivent aujourd’hui lui tirer leur chapeau. Sans Franz Weber ce petit coin de paradis vaudois ne serait en effet certainement qu’une vaste étendue de villas avec vue plongeante sur le Lac, loin de l’UNESCO et de son patrimoine.

En attendant de voir une plaque commémorative comme celle ci-contre déposée à Verbier ou à Crans-Montana, je souhaite à mon tour tirer mon chapeau à Franz Weber.

La prise de conscience quant à l’importance de protéger notre environnement, qui fait peu à peu son chemin dans nos sociétés occidentales, est en bonne partie imputable à l’action de pionniers comme lui. S’il n’avait pas ouvert la voie, même s’il a parfois fallu jouer des coudes ou des pieds, les maigres avancées en matière de protection de l’environnement ne seraient que de lointains mirages, et notre qualité de vie serait sans doute un peu moins bonne qu’elle ne l’est aujourd’hui.

La tâche est encore immense, et la protection de l’environnement et des animaux sont un travail titanesque et ingrat, souvent impopulaire car nous plaçant devant nos contradictions et bousculant nos certitudes. Il n’en reste pas moins nécessaire, et la voie tracée doit être aujourd’hui poursuivie.

Alors un grand Merci M. Weber, notre pays et notre planète vous doivent énormément !

 

 

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