Des changements durables

Une croissance à n’importe quel prix

Les récents et nombreux articles parus dans les journaux sur les perspectives de croissance économique pour 2018 dans notre pays, présentées comme positives et réjouissantes de par leur robustesse, m’ont ramené à l’esprit les propos pour le moins déconcertants qu’avait tenu un ministre  vaudois dont je tairai le nom ici (un indice tout de même, il est en charge de l’économie…) lors d’un débat télévisé dans le cadre des élections cantonales 2017.

Questionné par un autre candidat sur les limites d’une politique de promotion économique construite sur l’attraction sans cesse croissante d’entreprises et capitaux étrangers, il s’était lancé dans une diatribe sur les effets de la décroissance (sic.) sur certaines régions françaises, pour qui “c’est quand même pas drôle”.

Il a commis là une erreur que font bien souvent – et sans doute de bonne foi – celles et ceux qui défendent notre modèle économique et attaquent les alternatives possibles : confondre récession et décroissance.

La première est caractérisée, selon la définition qu’en donne le Larousse, par un “ralentissement diffus de l’activité industrielle et commerciale”. Autrement dit, un recul généralisé et linéaire de tous les secteurs économiques ou presque, avec à la clef augmentation du chômage, baisse des investissements publics, politiques budgétaires restrictives etc.

La seconde,entendue dans son sens économique et philosophique, est la prise de conscience de ce que l’augmentation irréfléchie de la consommation de biens et de ressources mène à terme à l’épuisement de ces dernières. Il s’agit de modifier certains comportements et modes de vie ou de consommation, afin de tendre vers une durabilité dont nous sommes malheureusement bien loin aujourd’hui.

Il est donc très important de bien choisir les termes employés dans un débat qui risque de s’intensifier ces prochaines années, cela même si le “dogme de la croissance à n’importe quel prix” semble avoir encore de beaux jours devant lui.

On part en effet aujourd’hui systématiquement du présupposé, que ce soit dans le débat politique ou dans les commentaires journalistiques, que toute croissance est intrinsèquement bonne, et que son renforcement constitue un but en soi.

Personne ne peut nier les effets positifs que la croissance économique a eu sur nos sociétés occidentales depuis la Révolution industrielle. Des effets en termes de niveau de vie, de santé, d’accès à la formation qui se font aujourd’hui sentir également dans les pays en développement.

Cela dit, penser que ces effets se feraient sentir indéfiniment, et qu’une croissance infinie est possible dans un Monde aux ressources finies semble pour le moins contestable, et mérite d’être mis en question.

On ne peut de même pas nier les effets négatifs que cette croissance a eu et continue à avoir sur l’environnement, que ce soit en matière de déforestation, de pollution de l’air ou de l’eau, de dérèglements climatiques ou encore d’imperméabilisation des sols.

Prétendre que toute croissance est intrinsèquement bonne me paraît ainsi tout aussi contestable qu’affirmer que toute croissance est intrinsèquement mauvaise.

Chaque projet économique devrait être évalué en termes d’avantages et inconvénients pour l’environnement, la qualité de vie, l’emploi etc. On se rendrait ainsi rapidement compte que si certains projets ont un faible impact environnemental tout en créant beaucoup d’emplois et de richesse, d’autres sont gourmands en terres et ressources, émettent beaucoup de substances polluantes en ne profitant qu’à peu de monde.

Il urge donc de passer d’un modèle économique du “toujours plus” vers un modèle économique du “toujours mieux” ou qualité de vie et durabilité prendraient le pas sur la course effrénée aux points de PIB. Notre qualité de vie et surtout celle des générations futures en sortiront renforcées !

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